Les sciences aquacoles

Transcription de la vidéo

Narrateur :
Les trois grands océans qui entourent le Canada représentent une des plus grandes richesses du pays.  Assurer la durabilité de leurs ressources aquatiques est le défi que relèvent chaque jour les scientifiques de Pêches et Océans Canada.  En laboratoire et sur le terrain, les chercheurs de la Direction des sciences du ministère contribuent à un développement plus durable de l’aquaculture, de concert avec plusieurs intervenants et parties prenantes du secteur.  Voici un aperçu de leurs travaux.

Sylvain Paradis, Ph.D.
Directeur général, Direction des sciences des écosystèmes, Pêches et Océans Canada, Ottawa  ON

Pêches et Océans aborde aujourd’hui les sciences aquacoles selon une perspective globale. Auparavant, on avait un certain nombre de programmes plutôt isolés les uns des autres : pêche, aquaculture, habitat. Au cours des dernières années, il est devenu évident que toutes ces composantes sont interdépendantes et qu’il faut les considérer en même temps, comme un tout afin de bien évaluer la situation. On doit aller sur le terrain pour constater la qualité, l’expertise et le savoir-faire de nos chercheurs scientifiques.

Narrateur :
Une des tâches les plus importantes des chercheurs de Pêches et Océans est d’étudier les interactions entre les fermes piscicoles (les élevages de poissons) et l’environnement… et ensuite de formuler des avis scientifiques sur les meilleures façons de mesurer – et de limiter – leur impact sur l’habitat. Cette recherche hydrographique aide les scientifiques à déterminer où – et à quelle distance les unes des autres – les exploitations aquacoles devraient être situées, par exemple dans la baie de Fundy et sur le littoral sud de Terre-Neuve.

Fred Page  Ph.D.
Chercheur scientifique, Centre des sciences intégrées en aquaculture, Station biologique de St. Andrews  NB

Un de nos programmes étudie spécifiquement comment l’eau circule entre les différents sites d’élevage de poissons et à l’intérieur des baies où sont localisés ces sites. Le Nouveau-Brunswick, avec l’industrie et Pêches et Océans Canada, a utilisé ces renseignements pour planifier les aires d’aquaculture et la gestion de la santé des poissons. L’industrie a intégré ces renseignements pour décider quand ensemencer et quand récolter. Les gouvernements et l'industrie utilisent ces renseignements pour décider où placer les élevages. Avec nos instruments, on mesure les courants et on se sert des données qui en résultent pour construire des modèles informatiques de circulation d’eau. Ces modèles aident ensuite à prendre des décisions relativement aux échanges d’eau entre les sites d’élevage.

Narrateur :
La recherche menée par Fred Page sur la gestion environnementale de l’aquaculture s’étend à d’autres régions du pays, comme Terre-Neuve et le Labrador.

Gehan Mabrouk, B.V.Sc, M.Sc.
Chef de section, Aquaculture, Aquatic Animal Health and Biotechnology, North Atlantic Fisheries Centre, St. John’s  TN

L’aquaculture a récemment connu une croissance très rapide sur la côte sud de Terre-Neuve. L'objectif de ma section est de s’assurer que cette croissance évolue selon une approche écosystémique et dans le respect du développement durable. C’est un défi immense, compte tenu de la vaste étendue du territoire et des endroits isolés où se produit cette croissance. En plus de l’impact sur l’environnement maritime, on doit aussi se préoccuper de l’impact biologique de cet environnement sur les poissons. Ça implique des échanges constants entre le milieu naturel et le laboratoire.

Narrateur :
Au Canada, l’aquaculture génère annuellement deux milliards de dollars de retombées positives – entre autres, sous forme d’emploi et de produits marins.  Mais le public demeure très inquiet quant à ses impacts sur l’environnement.  Ici à Vancouver-Ouest, pour répondre à ces préoccupations, on examine notamment ce qu’il advient des résidus de l’élevage des poissons.

Terri Sutherland, Ph.D.
Chercheur scientifique, Division de l’aquaculture et des écosystèmes marins, CRAE , Vancouver-Ouest, CB

 Mon programme de recherche sur les écosystèmes côtiers porte sur l’interaction entre l’aquaculture et l’environnement. On examine (où vont les déchets et) ce qu’ils deviennent dans l’écosystème. On passe beaucoup de temps sur le terrain et dans les fermes piscicoles. On subdivise l’aquaculture et le processus environnemental en différents modules. Le premier porte sur ce qui se passe dans les cages. On fait aussi de l’aquaculture de poissons en laboratoire pour recueillir des données plus précises. On installe des trappes à sédiments sous les fermes pour voir ce qui tombe des cages : résidus de nourriture, excréments des poissons. On examine l'empreinte environnementale qui dépend des courants, de la taille des granules de nourriture et de la distance entre les cages et le fond de l’eau. Cette empreinte dépend aussi des autres espèces au fond de l'eau et de ce qu’elles consomment et assimilent de la matière qui tombe des cages. Puis, la dernière chose qu’on regarde, c’est ce qui arrive aux déchets lors des marées et des tempêtes. Quelle quantité de déchets est alors dispersée à d’autres endroits de l’écosystème?

Narrateur :
Pour assurer la durabilité de l’aquaculture en eau douce au Canada, il faut aussi comprendre les interactions entre l’aquaculture et les écosystèmes.  À l'Institut des eaux douces de Winnipeg, des scientifiques de Pêches et Océans, dont Cheryl Podemski, étudient les écosystèmes d’eau douce et leurs réactions aux exploitations aquacoles.

Cheryl Podemski, Ph.D.
Chercheur scientifique, Institut des eaux douces, Winnipeg, MB

Notre projet examine les impacts de l’aquaculture en eau douce à l'échelle des écosystèmes. Pour étudier ces impacts, on a installé notre (propre) ferme piscicole dans un lac intact du nord de l'Ontario. On l’a exploitée pendant cinq ans, selon des méthodes commerciales et on a étudié le lac avant, pendant et après cette exploitation pour voir comment il réagissait à ces activités. Certains résultats nous ont surpris. Bien qu’on ait augmenté la charge de matières nutritives par près de neuf fois la normale nous n’avons pas constaté de grande prolifération d’algues nocives. Le lac n’est pas devenu vert. De plus, les taux de croissance et de reproduction des poissons sauvages du lac ont augmenté et la population de truites sauvages a doublé pendant l’exploitation de la ferme. Avant notre étude en 2001, on savait peu de choses sur l’impact de l’aquaculture en eau douce sur les lacs. Les lacs abondent au Canada et le potentiel de croissance est grand pour l’aquaculture en eau douce. Mais le public, les ONG et les organismes de réglementation veulent (d’abord) s’assurer que ce sera une croissance durable. Notre travail est utile car il permet aux organismes de réglementation de prendre des décisions fondées sur la science.

Narrateur :
La durabilité de l’aquaculture repose aussi sur la santé optimale des poissons d’élevage… non seulement pour la santé de l’environnement mais aussi pour la productivité des fermes piscicoles.Le pou du poisson – un parasite qui affecte les poissons d’élevage comme le saumon – et ses risques d’interactions avec les populations sauvages est un enjeu que les chercheurs de Pêches et Océans, comme Simon Jones à la Station biologique du Pacifique à Nanaimo, prennent très au sérieux.

Simon Jones, Ph.D.
Chercheur scientifique, Station biologique du Pacifique, Nanaimo, CB

Nos travaux portent sur le pou du poisson un crustacé parasite qui se fixe naturellement sur la peau de plusieurs espèces de poissons sauvages. Avant d’être mis dans des cages en mer les poissons d’aquaculture sont élevés dans des écloseries d’eau douce donc ils n’ont pas de poux du poisson quand ils arrivent en milieu marin. Après un an, les saumons ont souvent des poux. C’est commun non seulement ici mais aussi dans d’autres pays qui font l’élevage du saumon. Le défi du pisciculteur est de surveiller ses poissons afin d’intervenir s’ils ont des poux. Le but de nos recherches est de comprendre les risques que pose le pou du poisson d’élevage pour le poisson sauvage. Chaque année, on découvre quelque chose de neuf. Depuis 2003, on surveille les quantités de poux sur de jeunes saumons, pendant deux ou trois mois suivant leur arrivée en milieu marin. En 2004 et 2005, on a détecté de très hauts niveaux de poux. Jusqu’à 60% de ces jeunes poissons en avaient. Puis en 2005, 2006 et 2007, (on a remarqué que) ces quantités diminuaient tant et si bien qu’en 2007-2008, au lieu de 40 ou 50%, seulement 15% des poissons avaient des poux. En 2008 et 2009, ce chiffre a baissé à seulement 5%.

Narrateur :
Ici sur la côte est du Canada, des espèces envahissantes posent un risque pour la santé des écosystèmes et de l’aquaculture.  Pêches et Océans Canada travaille étroitement avec les gouvernements provinciaux et l’industrie pour contrôler la propagation de ces espèces – comme les tuniciers, originaires d’Asie mais qui ont (vraisemblablement) fait le voyage jusqu’à l’Île du Prince-Édouard, accrochés à la coque des navires.

Luc Comeau,  Ph.D
Chercheur biologiste, Centre des pêches du Golfe, Moncton, NB

Les chercheurs de Pêches et Océans et du Collège de médecine vétérinaire de l’Atlantique étudient ensemble les tuniciers. Les tuniciers sont une menace pour l’industrie de la culture des moules. Ils se fixent à la coquille des moules en élevage, ce qui fait monter les coûts de production. On tente de déterminer si les moules et les tuniciers sont en compétition pour la même nourriture. Actuellement, Pêches et Océans et l’industrie gèrent ensemble la propagation des tuniciers en limitant les transferts entre les sites (d’élevage) infestés et non-infestés.

Narrateur :
L’aquaculture canadienne repose de plus en plus sur le développement d’aliments pour poissons respectueux de l’environnement.  Ian Forster, chercheur scientifique de Pêches et Océans Canada, veut développer des aliments nutritifs et performants pour l'aquaculture dont les ingrédients eux-mêmes proviennent de sources durables.

Ian Forster, Ph.D.
Chercheur scientifique, Division de l’aquaculture et des écosystèmes marins, CRAE , Vancouver-Ouest, CB

 J’essaie de trouver des ingrédients qui favorisent la santé des poissons et l’efficacité de l’élevage. Plusieurs poissons d’élevage sont carnivores et on leur donnait traditionnellement de la moulée faite à partir d’autres poissons souvent pêchés pour cet usage. Mais on se tourne maintenant vers d’autres sources de protéines et de lipides. Cependant, il faut s’assurer de leur qualité. En plus de leur concentration en éléments nutritifs, il faut vérifier leur digestibilité et la rétention de nutriments par les poissons. Les protéines végétales, par exemple, sont plus abordables que la farine de poisson. Si on établit qu'elles sont nourrissantes et faciles à digérer, on les utilisera pour réduire les coûts des élevages.

Narrateur :
Les chercheurs à la station biologique de St. Andrews s’affairent (aussi) à développer un système de production aquacole qui est non seulement écologique mais autosuffisant.  Il s’agit de l’aquaculture multi-trophique intégrée.   Dans ce type d’aquaculture, on combine l’élevage des poissons qui doivent être nourris – les saumons, par exemple – à l’élevage d’autres espèces – des plantes marines et des mollusques – qui peuvent extraire les éléments nutritifs des déchets produits par les saumons et leur nourriture.  Le résultat est un système plus équilibré, plus productif et plus durable.

Shawn Robinson, Ph.D.
Chercheur scientifique, Aquaculture multi-trophique intégrée, Station biologique de St.Andrews, NB

 Un système est durable s'il peut se préserver longtemps par lui-même, sans nuire à son environnement. On essaie de créer ce genre de système. On met en pratique le simple principe naturel du recyclage. On a débuté le projet en associant saumons, moules et varech sur un même site, et ça a été tout un coup d'envoi! On a obtenu toutes sortes d'excellents résultats. La croissance de toutes les espèces installées sur le site s’est avérée supérieure à la normale grâce aux ressources mises à leur disposition. Et c'était notre objectif! En plus, d'autres espèces profitaient de l'habitat que, semble-t-il, on avait créé! Par exemple, les jeunes poissons de certaines espèces se servaient des boudins de moules comme abris. On a fourni une sorte d’habitat secondaire, un genre de récif suspendu, et la biodiversité du site s’est enrichie. Notre travail recrée un contexte global, près de la nature. Ce n'est pas qu'une étude à petite échelle. On étudie vraiment des systèmes.

Narrateur :
Toujours sur la question des moules, à l’Institut Maurice-Lamontage, à Mont-Joli, Québec, des chercheurs de Pêches et Océans, dont Marcel Fréchette, travaillent (de concert) avec des producteurs afin de réduire les coûts de la main-d’œuvre associés à l’élevage de la moule.

Marcel Fréchette, Ph.D.
Chercheur scientifique, Institut Maurice-Lamontagne, Mont Joli, QC

Les collecteurs autogérés, c’est une nouvelle méthode pour faire l’élevage de la moule qui a été proposée par un miticulteur de Carleton, Éric Bujold qui lui, est intéressé à développer une approche qui permet de faire l’élevage de la moule à temps partiel, c’est-à-dire donc en investissant moins de temps puis d’efforts qu’on le fait normalement pour l’élevage de la moule avec la méthode classique qui elle, est une méthode qui implique le boudinage, qui est simplement le fait de mettre des jeunes moules dans des filets tubulaires puis les suspendre dans l’eau pour l’élevage. Dans le cas des collecteurs autogérés, c’est une étape qui n’est pas faite, tout simplement parce qu’ils laissent les jeunes moules se fixer directement sur les cordes puis ils font l’élevage sur ces cordes-là. Donc il n’y a pas le transfert qui est lié à ce qu’on appelle le boudinage. Donc ils sautent une étape, ce qui leur permet de sauver beaucoup de temps puis donc éventuellement, de faire l’élevage à temps partiel en y investissant moins de temps.

Narrateur :
Toujours à Mont-Joli, des chercheurs comme Denis Chabot étudient d’autres espèces pouvant favoriser la diversification (au sein) de l’industrie et augmenter la viabilité de l’aquaculture (au Canada).  Le loup tacheté est une des espèces à l’étude dans le cadre du développement de l’aquaculture… et son avenir est prometteur.

Denis Chabot, Ph.D.
Chercheur en bio-énergétique, l’Institut Maurice-Lamontagne, Mont Joli  QC

Je suis impliqué dans deux projets complémentaires. Les deux portent sur le loup tacheté, une espèce qui a un potentiel aquacole très intéressant au Québec. La plupart des espèces de poissons marins qui sont élevés dans un contexte d’aquaculture le sont en cage, des cages en mer, ce qui est difficile à faire au Québec à cause de la présence des glaces en hiver. /// On a conçu deux projets qui se complètent. Le premier vise à déterminer dans un contexte qui se rapproche le plus possible des conditions d’un élevage commercial, le taux de croissance du loup tacheté pour déterminer si ça serait rentable ou pas dans une aventure commerciale. Le deuxième porte plus à essayer de comprendre les résultats du premier, c’est-à-dire qu’on veut, on veut mieux connaître le métabolisme du loup. Tous les commentaires que j’ai entendus vont à l’effet que c’est, le goût est excellent. C’est un produit aussi … le loup, on peut utiliser aussi son cuir qui serait commercialisé. Et il y a de plus en plus d’intérêt pour des biomolécules provenant de poissons qui pourraient être utiles pour soit le traitement de maladies ou pour simplement se garder en santé.

Narrateur :
Sur la côte est canadienne, on s’intéresse tout particulièrement au flétan comme espèce pouvant se prêter à l’aquaculture.  D’ailleurs, la production commerciale a déjà démarré, grâce aux fructueuses recherches et au soutien de chercheurs scientifiques comme Debbie Martin-Robichaud à la station biologique de St.Andrews.

Debbie Martin-Robichaud
Chercheur scientifique, Station biologique de St. Andrews, NB

Je porte ce drôle d'accoutrement car je m’apprête à aller dans le bassin des flétans. Je vais examiner les mâles pour voir s’ils sont prêts pour la reproduction. Oui!  Il est bien prêt pour la reproduction! On étudie des technologies de développement de stocks de poissons géniteurs qui favorisent le développement durable pour l’écologie mais aussi, la rentabilité de l’industrie. Un de nos grands succès récents est le développement de stocks de poissons géniteurs qui produisent des stocks de flétans entièrement femelles. Ça, c’est très avantageux pour l’industrie car la femelle du flétan se développe beaucoup plus vite et devient beaucoup plus grosse que le mâle. Grâce à nos recherches, l’industrie emploie maintenant les stocks de géniteurs ne produisant que des femelles et en fait le commerce mondial.

Narrateur :
Les exemples de recherche scientifique qui vous ont été présentés ici permettent au secteur de l’aquaculture canadienne de se développer dans un contexte de durabilité environnementale, d’employer les meilleures pratiques d’élevage et de bien gérer la santé des poissons – tant pour le bénéfice des consommateurs que de l’industrie.

Cette vidéo a dressé le profil de plusieurs chercheurs et des projets qu’ils dirigent pour le ministère Pêches et Océans Canada.

Mais la recherche en aquaculture ne date pas d’hier!  On en fait depuis des décennies.  Et si elle a déjà provoqué de nombreux changements au sein de l’industrie, à mesure que cette dernière évolue, on s’attend à voir plusieurs autres améliorations.

Et pour les années à venir, la recherche menée par Pêches et Océans Canada et ses partenaires continuera d’être une référence fiable permettant à l’industrie de croître dans le respect de l’environnement.