La mobilité internationale des travailleurs hautement qualifiés : Synthèse des principaux résultats et de leurs incidences sur les politiques

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Document préparé par Direction générale de la recherche économique et de l'analyse des politiques (alors Direction générale de l'Analyse de la politique micro-économique), Industrie Canada et Direction de la recherche en politiques, Ressources humaines et développement social Canada

Avril 2008

Le document présente les travaux de recherche effectués dans le cadre de l'Initiative de recherche sur les compétences (IRC) et résume les résultats et leurs implications discutés lors des ateliers de l'IRC. Le rapport fait état des points de vue des chercheurs et des participants aux ateliers et ne reflète pas nécessairement les politiques et les opinions d'Industrie Canada, de Ressources humaines et Développement des compétences Canada ou du gouvernement du Canada.

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Table des matières

Sommaire
1. Introduction
2. Données macro-économiques des tendances mondiales et situation du Canada
3. Les motivations et les facteurs socio-économiques connexes
4. La situation dans différents secteurs au Canada : Leçons tirées des données micro-économiques
5. Facteurs sur le plan des politiques qui influencent la mobilité des travailleurs hautement qualifiés
6. Les coûts et les avantages de la mobilité de la main-d'oeuvre hautement qualifiée vus sous un angle différent
7. Messages stratégiques et conclusions
Bibliographie


Sommaire du rapport de synthèse

La main-d''uvre hautement qualifiée est un élément essentiel d'une économie novatrice. Depuis quelques décennies, les travailleurs hautement qualifiés sont plus disposés à aller travailler dans un autre pays. De plus, la forte demande de main-d''uvre spécialisée dans les pays industrialisés a engendré une vive concurrence pour ces travailleurs prêts à se déplacer. L'immigration et l'émigration, temporaires ou permanentes, de travailleurs hautement qualifiés peuvent contribuer à former le bassin de main-d''uvre spécialisée dont le Canada a besoin. Toutefois, si l'attractivité du Canada n'est pas suffisante, ces travailleurs hautement qualifiés iront ailleurs. Le Canada doit s'adapter aux nouvelles exigences professionnelles et à la concurrence mondiale pour une main-d''uvre spécialisée afin d'appuyer une économie du savoir plus novatrice. Pour s'adapter, le Canada doit absolument accroître sa capacité d'attirer et de garder au pays une main-d''uvre hautement qualifiée.

Le principal enjeu pour les décideurs politiques consiste à structurer les moyens d'action afin de bénéficier de la mobilité internationale des travailleurs hautement qualifiés, compte tenu des divers impacts de cette mobilité sur le marché du travail intérieur et l'économie. Le présent rapport de synthèse vise à soutenir l'élaboration des politiques en s'appuyant sur les conclusions des recherches contenues dans les projets menés dans le cadre de l'Initiative de recherche sur les compétences (IRC) ainsi que par d'autres études complémentaires.

Les projets ont porté sur trois domaines de recherche :

  1. Élaborer des méthodes permettant d'évaluer avec plus de précision les tendances mondiales de la migration de la main-d''uvre hautement qualifiée ainsi que de meilleures façons de déterminer la position du Canada sur le marché mondial par rapport à d'autres pays industrialisés.
  2. Accroître notre compréhension des facteurs fondamentaux à l'origine de l'augmentation de la migration de la main-d''uvre hautement qualifiée, surtout dans les économies avancées.
  3. Accroître notre compréhension des coûts et avantages économiques associés à la mobilité internationale de la main-d''uvre hautement qualifiée et des principaux facteurs ayant une incidence sur ces coûts et avantages.

Les principaux « faits stylisés » qui ressortent des études de l'IRC et d'autres études sur ces sujets sont les suivants :

  • Les flux mondiaux de main-d''uvre hautement qualifiée ont augmenté, et les travailleurs hautement qualifiés se déplacent déjà assez facilement entre de nombreux pays.
  • De plus en plus, ces flux représentent des déplacements temporaires plutôt qu'une migration uniquement permanente.
  • Le Canada ne réussit pas aussi bien que les autres économies avancées à attirer des travailleurs hautement qualifiés. Les lourdeurs administratives et les obstacles fiscaux sont peut-être des freins importants.
  • Ces tendances vers une plus grande mobilité de la main-d''uvre hautement qualifiée font partie de la mondialisation généralisée de l'économie et sont étroitement liées aux flux internationaux de capitaux et à la délocalisation de la production.
  • Il y a moins d'obstacles à l'immigration légale pour les travailleurs spécialisés que pour les travailleurs non spécialisés.
  • Les travailleurs hautement qualifiés sont attirés vers les endroits qui offrent des salaires élevés pour leurs compétences (mais il n'est pas évident qu'une grande dispersion des salaires soit un facteur d'attraction).
  • D'autres facteurs, notamment les débouchés professionnels, la qualité de vie, les « distances » sociales et culturelles ainsi que les obstacles administratifs, ont aussi une forte influence sur les décisions de déplacement des travailleurs hautement qualifiés.
  • Le niveau de scolarité est fréquemment utilisé pour mesurer le niveau de compétences relativement à la mobilité internationale, parce qu'il s'agit souvent de la seule mesure qui existe. La qualité des systèmes d'éducation varie énormément d'un pays à l'autre, de sorte que le niveau de scolarité est susceptible de mener à une surestimation de la qualité des compétences des travailleurs de pays où le système d'éducation est de faible qualité, habituellement les pays pauvres. Or, pour savoir si le Canada subit une « fuite des cerveaux », il ne suffit pas simplement de compter le nombre de Canadiens qui quittent le pays et le nombre d'immigrants possédant un niveau élevé de scolarité qui y entrent.
  • Comparativement à d'autres pays, le Canada réussit assez bien à attirer des immigrants permanents qui ont fait des études postsecondaires, mais une proportion relativement faible d'entre eux possèdent un doctorat. Malgré leur niveau de scolarité élevé, les immigrants récemment arrivés n'obtiennent pas de bons résultats économiques. Cela s'explique, en partie, par le fait qu'ils n'ont pas toutes les compétences requises dans l'économie canadienne, par exemple leurs capacités de lecture et d'écriture en français ou en anglais sont insuffisantes.
  • Pour les pays d'accueil, les principaux avantages d'une main-d''uvre qualifiée mobile à l'échelle internationale découlent des externalités de production de cette main-d''uvre, notamment une capacité accrue de former des grappes du savoir et un plus grand accès aux idées et aux technologies de pointe grâce à la participation à des réseaux.

Si l'on accepte ces « faits stylisés », quelles sont les conséquences pour l'élaboration des politiques? Quelles sont les autres incidences des constatations plus détaillées des recherches?

  1. On ne peut pas traiter la stratégie canadienne concernant les questions liées à la mobilité internationale de la main-d'œuvre hautement qualifiée sans tenir compte de la stratégie canadienne pour l'intégration de l'économie à l'échelle nord-américaine et à l'échelle mondiale. Par exemple, si l'investissement direct étranger (IDE) est étroitement lié aux mouvements internationaux de main-d'œuvre hautement qualifiée, les restrictions imposées à ces investissements peuvent restreindre la capacité du Canada de tirer profit de ces mouvements.
  2. La concurrence pour une main-d'œuvre hautement qualifiée sur les marchés mondiaux est susceptible de s'intensifier, en raison de la mondialisation continue, de la croissance économique rapide de l'Inde, de la Chine et d'autres pays moins développés et de la concurrence accrue pour cette main-d'œuvre parmi les économies avancées dont la population vieillit. Il est certes valable de mettre en œuvre des politiques qui facilitent l'entrée au Canada de travailleurs hautement qualifiés et qui facilitent les choses pour les employeurs souhaitant faire entrer ces travailleurs au Canada. Toutefois, dans un contexte de vive concurrence internationale, si le l'attrait du Canada n'est pas assez fort auprès des travailleurs hautement qualifiés, ces derniers iront ailleurs.
  3. Il faut que les politiques portant sur l'immigration de travailleurs spécialisés ne se limitent pas à l'idée que l'immigration de travailleurs spécialisés est principalement un moyen (parmi d'autres) d'atténuer les pénuries de main-d'œuvre spécialisée qui existent déjà. Au contraire, l'une des plus importantes leçons que nous pouvons tirer de la « nouvelle théorie de croissance », du fait de la présence des effets d'agglomération et d'externalités, est que l'arrivée de nouveaux travailleurs qualifiés crée une demande additionnelle de ces compétences de façon qui augmente la productivité de l'ensemble des travailleurs. Ainsi, plutôt que de simplement « remplir le vide », en comblant les pénuries de main-d'œuvre spécialisée, la politique d'immigration du Canada devrait faire preuve de plus de perspective et de créativité et penser à la création de grappes du savoir localisées qui permettent à l'ensemble des travailleurs d'être plus productifs, ce qui contribue à l'attraction davantage de travailleurs spécialisés et à l'augmentation du taux de croissance économique. Étant donné l'importance des grappes, les politiques visant à disperser les immigrants spécialisés pourraient être improductives.
  4. Si le Canada souhaite accroître le niveau de compétences de sa population active en faisant appel à l'immigration économique, il lui faudra mettre en place de meilleurs moyens de recrutement et de sélection des immigrants spécialisés. L'immigration économique comporte des coûts pour le Canada ainsi que des avantages éventuels au chapitre des compétences spécialisées. Il faut comparer les coûts et les avantages d'investir des fonds publics dans le recrutement, la formation et l'intégration des immigrants aux coûts et aux avantages d'investir plus de fonds publics dans l'acquisition et le perfectionnement des compétences des Canadiens nés au pays.
  5. Il se peut que les mouvements temporaires de la main-d'œuvre qualifiée deviennent la forme de mobilité type de la main-d'œuvre qualifiée au niveau international, remplaçant ainsi la migration à long terme. Cela signifie qu'il faudrait réorienter les politiques pour les axer davantage vers des mécanismes d'entrée temporaire afin de bénéficier d'une mobilité internationale de plus en plus grande de la main-d'œuvre hautement qualifiée.

Quelles questions stratégiques découlent de ces « faits stylisés » et de leurs répercussions?

  • La politique d'immigration visant à pourvoir l'économie canadienne d'une main-d'œuvre spécialisée devrait-elle être orientée de manière à favoriser davantage les entrées temporaires, compte tenu du caractère de plus en plus temporaire des mouvements migratoires des travailleurs hautement qualifiés?
  • Le Canada devrait-il recourir à la politique sur les entrées temporaires pour chercher à créer des grappes d'innovation? Jumeler l'élimination des restrictions relatives à l'IDE aux politiques destinées à faciliter l'entrée temporaire d'employés des entreprises étrangères?
  • Le Canada devrait-il chercher à étendre la portée des dispositions relatives à la mobilité des travailleurs hautement qualifiés dans le cadre de ses négociations commerciales? Si c'est la bonne solution, que peut-on faire pour réduire les obstacles à l'entrée temporaire liés à l'administration, aux lois fiscales, à l'assurance sociale et à la reconnaissance des titres?
  • Faut-il modifier la politique de sélection des immigrants spécialisés, étant donné les résultats obtenus, soit des immigrants ayant un niveau de scolarité plus élevé que la moyenne canadienne mais un niveau de littératie inférieur? Si oui, dans quelle direction?
    • Vers un système où l'entrée temporaire pourrait servir de tremplin à l'obtention de la résidence permanente pour un immigrant spécialisé?
    • Vers un système de vérification préalable des compétences linguistiques et des titres professionnels, comme celui qui existe en Australie?
    • Vers une politique qui encourage les étudiants étrangers à étudier dans des universités ou des collèges canadiens pour ensuite leur offrir un accès préférentiel à la résidence permanente une fois qu'ils ont reçu leur diplôme?
  • Les politiques destinées à diriger ou à attirer les immigrants vers des régions autres que les centres urbains habituels auraient-elles tendance à diminuer la contribution économique des immigrants hautement qualifiés?
  • Quelle serait la meilleure façon de répartir les investissements publics destinés à accroître le niveau de compétences de la population active canadienne entre le recrutement et l'intégration des immigrants et l'investissement dans l'acquisition et le perfectionnement des compétences des Canadiens?
  • La plus grande mobilité internationale implique une concurrence accrue pour les Canadiens hautement qualifiés qui ont profité de subventions importantes durant leurs années d'études. Est-ce que cela signifie que nous devrions nous orienter vers un système, où les étudiants au niveau postsecondaire et leur famille devraient assumer une plus grande part des coûts associés à leurs études puisque d'autres pays pourraient bénéficier des avantages des externalités et des impôts sur les revenus plus élevés qui découlent de cette scolarité?
  • Quel est l'équilibre approprié entre les politiques destinées à accroître l'offre de main-d'œuvre spécialisée (telles que les politiques d'immigration traitées aux points précédents) et les politiques destinées à accroître la demande de main-d'œuvre qualifiée grâce à une augmentation des activités novatrices des entreprises canadiennes et à une hausse des investissements directs des sociétés étrangères très novatrices?

1. Introduction

La main-d'œuvre hautement qualifiée est un élément essentiel d'une économie novatrice. Depuis quelques décennies, les travailleurs hautement qualifiés sont plus disposés à aller travailler dans un autre pays. De plus, la forte demande de main-d'œuvre spécialisée dans les pays industrialisés a engendré une vive concurrence pour ces travailleurs prêts à se déplacer. L'immigration et l'émigration, temporaires ou permanentes, de travailleurs hautement qualifiés peuvent contribuer à former le bassin de main-d'œuvre spécialisée dont le Canada a besoin. Toutefois, si l'attrait du Canada n'est pas assez fort, ces travailleurs hautement qualifiés iront ailleurs. Le Canada doit s'adapter aux nouvelles exigences professionnelles et à la concurrence mondiale pour une main-d'œuvre spécialisée afin d'appuyer une économie du savoir plus novatrice. Pour s'adapter, le Canada doit absolument accroître sa capacité d'attirer et de garder au pays une main-d'œuvre hautement qualifiée.

La principale question qui se pose aux décideurs est de savoir comment structurer les moyens d'action afin de bénéficier de la mobilité internationale des travailleurs hautement qualifiés, compte tenu des divers impacts de cette mobilité sur le marché du travail intérieur et l'économie. Le présent rapport de synthèse vise à appuyer l'élaboration des politiques en tirant profit des conclusions des recherches contenues dans les projets menés dans le cadre de l'Initiative de recherche sur les compétences (IRC) et ainsi que d'autres études complémentaires.

L'Initiative de recherche sur les compétences (l'IRC) est un programme de recherche sur les politiques à moyen terme qui a été mis sur pied en raison des craintes selon lesquelles des pénuries prolongées de main-d'œuvre qualifiée pourraient retarder le développement de l'économie du savoir et la capacité d'innover du Canada.

Le présent rapport de synthèse porte sur « La mobilité internationale des travailleurs hautement qualifiés ». Les domaines pertinents de recherche ont été recensés et ont fait l'objet de discussions à une table ronde de spécialistes, qui a eu lieu au début de 2004. Les trois domaines de recherche sont les suivants :

  1. Élaborer des méthodes permettant d'évaluer avec plus de précision les tendances mondiales de la migration de la main-d'œuvre hautement qualifiée ainsi que de meilleures façons de déterminer la position du Canada sur le marché mondial par rapport à d'autres pays industrialisés.
  2. Accroître notre compréhension des facteurs fondamentaux à l'origine de l'augmentation de la migration de la main-d'œuvre hautement qualifiée, surtout dans les pays développés.
  3. Accroître notre compréhension des coûts et avantages économiques associés à la mobilité internationale de la main-d'œuvre hautement qualifiée et des principaux facteurs ayant une incidence sur ces coûts et avantages.

Les projets de recherche de l'IRC portant sur le thème de la mobilité internationale des travailleurs hautement qualifiés visent à nous faire mieux comprendre ces trois domaines de recherche. Le rapport de synthèse se veut un résumé des résultats des recherches de l'IRC et d'autres études, qui sont liés à ce thème, et il fait ressortir les implications sur le plan des politiques des résultats de ces études.

Le rapport comprend six sections portant sur les trois domaines de recherche susmentionnés. La deuxième section traite du premier domaine de recherche : les tendances de la mobilité internationale des travailleurs hautement qualifiés et la position du Canada sur le marché de ce type de main-d'œuvre. Les trois autres sections portent sur le deuxième domaine de recherche : les facteurs à l'origine de la mobilité. Premièrement, la troisième section se concentre sur les facteurs autres que politiques qui sont à l'origine de la mobilité internationale de la main-d'œuvre qualifiée et les facteurs socio-économiques influant sur les mouvements entre les pays de travailleurs hautement qualifiés. On examine dans la quatrième section la situation des travailleurs spécialisés étrangers sur le marché du travail dans différentes branches d'activité économique au Canada. La cinquième section aborde les facteurs stratégiques qui touchent la mobilité des travailleurs hautement qualifiés. Le dernier domaine de recherche, les coûts et les avantages de la mobilité des travailleurs hautement qualifiés, est étudié dans la sixième section. Enfin, dans la septième section, on examine les implications des travaux de recherche sur le plan politique.

L'Initiative de recherche sur les compétences (IRC)

L'Initiative de recherche sur les compétences a été créée en 2003 dans le cadre d'un protocole d'entente entre Industrie Canada, Ressources humaines et Développement des compétences Canada et le Conseil de recherches en sciences humaines. Elle avait pour but :

  • de favoriser la recherche sur les compétences, dans une optique d'élaboration des politiques, qui s'articule autour de quatre grands thèmes :
    • les incidences du vieillissement de la population canadienne sur le marché du travail et les compétences
    • la mobilité internationale des travailleurs hautement qualifiés
    • la formation parrainée par l'employeur au Canada
    • l'adaptation des marchés aux travailleurs qualifiés au Canada
  • d'alimenter les discussions entre les chercheurs, les décideurs et les praticiens grâce à la tenue de conférences et à la production de publications;
  • d'appuyer la diffusion et l'application aux politiques de recherches sur les compétences, surtout au sein de l'administration publique et du secteur universitaire et entre d'autres intervenants.

Trois ateliers ont eu lieu dans la région de la capitale nationale en 2006 : Les incidences du vieillissement de la population sur le marché du travail et les compétences, La mobilité internationale des travailleurs hautement qualifiés et L'adaptation des marchés du travail aux travailleurs qualifiés (y compris La formation parrainée par l'employeur). À la suite des ateliers, les versions définitives des rapports de synthèse de chaque atelier ainsi que de l'aperçu ont été établies. Les rapports de synthèse contiennent un exposé des résultats des recherches sur chaque thème et de leurs grandes répercussions sur le plan des politiques. L'aperçu fait la synthèse des résultats des recherches effectuées sur chaque thème et présente les grandes répercussions sur le plan des politiques, y compris un diagnostic général.

2. Données macro-économiques des tendances mondiales et situation du Canada

Les échanges internationaux de travailleurs hautement qualifiés touchent considérablement le stock de capital humain au Canada. Les modes d'échange ne se limitent plus à l'immigration ou à l'émigration de travailleurs hautement qualifiés, mais englobent aussi les déplacements temporaires de travailleurs du savoir et d'étudiants de cycles supérieurs.

Il importe tout d'abord de définir ce que l'on entend par « compétences » et « travailleurs hautement qualifiés ». Kuhn (IRC-2005) établit des catégories de paramètres des « compétences » en se servant de la méthode de mesure des compétences. Il s'agit de mesures fondées sur les intrants, sur les tests, sur le salaire et sur le contenu de l'emploi. Selon ces catégories, la main-d'œuvre hautement qualifiée peut désigner un groupe de personnes qui ont un niveau élevé de scolarité ou qui ont obtenu des notes relativement élevées à des tests d'efficience ou qui ont un salaire élevé ou occupent une fonction professionnelle ou un poste de gestion (ou ont de l'expérience dans ces domaines). Dans un sens plus large, la main-d'œuvre hautement qualifiée est celle qui rehausse la capacité d'innover de l'économie. Dans diverses études, les mesures de compétences dépendent beaucoup de la disponibilité des données et du groupe d'intérêt à l'étude. Cette section donne un aperçu des répercussions sur le marché du travail canadien de la situation actuelle et des récentes tendances relatives aux déplacements des travailleurs hautement qualifiés dans le monde.

Depuis les années 1990, les tendances montrent une intensification marquée des flux de travailleurs hautement scolarisés de l'Asie vers des pays développés et une augmentation des échanges de travailleurs qualifiés parmi les pays industrialisés (Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), 2002; Gera, Laryea et Songsakul, IRC-2004). Selon une nouvelle base de données de l'OCDE sur les immigrants et les expatriés, en 2000-2001, les principaux pays de l'OCDE, notamment les États-Unis, le Canada, l'Australie, la France, le Royaume-Uni et l'Allemagne, sont des importateurs nets de travailleurs hautement scolarisés (Dumont et Lemaître, 2005).

La migration temporaire, par exemple les permis de travail et les permis d'études, est un mode de plus en plus important de migration de travailleurs hautement qualifiés dans les pays de l'OCDE à forte mobilité tels que les États-Unis, l'Australie, le Royaume-Uni et le Canada. Même la migration avec droit de résidence permanente est souvent temporaire. En effet, Aydemir et Robinson (2006) ont montré qu'environ un tiers des immigrants masculins ont quitté le pays durant les 20 premières années et que 60 % de ceux qui ont quitté l'ont fait durant la première année suivant leur arrivée.1

Les politiques d'immigration favorisent les personnes hautement scolarisées

Les récentes politiques concernant l'immigration et l'entrée de travailleurs temporaires dans les principaux pays de l'OCDE sont favorables aux travailleurs hautement scolarisés. Le Canada, l'Australie et, depuis peu, le Royaume-Uni, ont un système détaillé de points d'appréciation basé sur les compétences pour la sélection des immigrants hautement scolarisés et dotés des compétences considérées pertinentes sur le marché du travail du pays (Gera et Songsakul, 2005). Le programme d'immigration des travailleurs spécialisés aux États-Unis ne repose pas sur un système de points. Le principal critère de sélection des immigrants économiques aux États-Unis (c'est-à-dire les catégories de préférence selon l'emploi) est l'offre d'emploi attestée. Ce système tend à favoriser les emplois qui demandent un haut niveau de scolarité. Des pénuries dans certaines professions, combinées à des permis de travail provisoires conçus précisément pour attirer des professionnels étrangers en demande, ont aussi donné lieu à des changements importants dans les profils professionnels des travailleurs étrangers. Les afflux importants de travailleurs temporaires des domaines liés à l'informatique de l'Inde et de la Chine aux États-Unis et au Canada dans les années 1990 témoignent, par exemple, de ce phénomène.

Les travailleurs étrangers temporaires et les immigrants hautement scolarisés constituent une part importante du marché du travail canadien. En 2000, un cinquième de la population active du Canada était née à l'étranger (Statistique Canada, Recensement de 2001). On observe de fortes concentrations d'employés nés à l'étranger dans les industries de haute technologie (Hall, IRC-2006) et les professions de la santé (Bourgeault, IRC-2006). Dans leur comparaison de la situation du Canada à celle d'autres grands pays de l'OCDE, Gera et Songsakul (2005) ont trouvé qu'autour de l'an 2000, le Canada a réussi exceptionnellement bien à attirer des immigrants permanents hautement scolarisés par rapport à d'autres pays concurrents (p. ex. l'Australie, le Royaume-Uni, les États-Unis, l'Allemagne et la France). Toutefois, le Canada ne réussit pas très bien lorsque l'on tient compte des entrées temporaires de travailleurs hautement qualifiés et d'étudiants internationaux de cycles supérieurs.

Selon McHale (IRC-2006) et Ellis (2006), le Canada ne réussit pas très bien à attirer des étudiants d'autres pays aux programmes d'études supérieures comparativement à certains pays concurrents tels que l'Australie et le Royaume-Uni. Les États-Unis restent la destination de choix pour les étudiants de cycles supérieurs et les travailleurs hautement qualifiés qui obtiennent un permis de non-immigrant, tels que les permis H-1B et TN-ALENA.2 Gera et Songsakul (2005) notent que la situation relative du Canada en ce qui a trait aux expatriés hautement qualifiés est pire que celle de tous les autres pays comparables, sauf le Royaume-Uni. Le Canada a encore de la difficulté à garder au pays les travailleurs hautement qualifiés, nés ici ou à l'étranger. Ce qui nous conduit à la question de l'exode des cerveaux.

L'exode des cerveaux du Canada

Les études sur la question de l'exode des cerveaux canadiens sont partagées. D'une part, on estime que la migration vers le sud ne semble pas poser de problème sur le plan du nombre de départs. Ce point de vue est partagé par Zhao, Drew et Murray (2000) et, dans des études plus récentes, par Helliwell (IRC-2006) et Finnie (IRC-2006a). Les chiffres sont relativement petits, beaucoup moins que un pour cent de la population par année3, et le taux de départ diminue alors que la migration de retour augmente depuis 2000.4 Des données provenant d'un recensement des États-Unis semblent confirmer l'existence d'un échange ou d'une circulation des cerveaux. Elles montrent une hausse des séjours temporaires de Canadiens aux États-Unis depuis les années 1990. Un plus grand nombre de personnes nées au Canada, surtout celles qui ont fait des études universitaires, vivent aux États-Unis en vertu de modalités de travail temporaires. Par contre, le Canada reçoit un apport important d'immigrants hautement scolarisés de pays autres que de l'OCDE (Gera et Songsakul, IRC-2005). Dans cette perspective, le problème de l'exode des cerveaux est minime.

Pour certains chercheurs, y compris Harris (IRC2004) et Harris, Easton et Schmitt (2006), la question de l'exode des cerveaux canadiens se pose en terme de « qualité », découlant de la substitution imparfaite des émigrants canadiens par des professionnels immigrants (provenant surtout de pays en développement). 5 C'est le cas particulièrement de certains professionnels, tels que les médecins et les scientifiques, où l'idée que des « grands noms » quittent le Canada pour les États-Unis reste une question litigieuse.6 Il est néanmoins clair que le nombre de ces travailleurs est peu important par rapport à la population active canadienne totale et aux taux historiques d'émigration. On ne compte pas beaucoup de « grands noms »; ce qui rend ces travailleurs si importants, c'est le fait qu'à cause des externalités de la production, il se peut que bon nombre de travailleurs autour d'eux deviennent plus productifs. Un haut dirigeant, qui crée et qui choisit une gamme de produits que les autres entrepreneurs ne voient pas, peut générer une grande richesse, pas seulement pour lui, mais aussi pour les milliers de travailleurs, de fournisseurs et de clients qui traitent avec lui.

La population active canadienne connaît l'immigration et l'émigration de travailleurs mobiles, surtout les travailleurs hautement qualifiés, comme nous l'avons déjà souligné. La question qui demeure est de savoir ce qui motive les travailleurs hautement qualifiés à déménager et ce qui détermine leur destination. La prochaine section, examine et la discussion portent sur les principaux facteurs à l'origine de la migration de la main-d'œuvre qualifiée.

3. Les motivations et les facteurs socio-économiques connexes

Les recherches confirment que les gains d'emploi, le commerce international et l'IDE ainsi que les grappes du savoir exercent un pouvoir d'attraction sur les travailleurs hautement qualifiés. Les politiques en matière d'immigration ont une incidence directe, mais d'autres politiques influant sur ces facteurs socio-économiques déterminent aussi les départs potentiels par des mécanismes d'autosélection.

Qu'est-ce qui motive des personnes hautement qualifiées à se déplacer d'un pays à l'autre? Ces influences ont-elles le même effet sur les décisions des travailleurs faiblement qualifiés et des travailleurs hautement qualifiés? De quels facteurs socio-économiques dispose le Canada pour attirer ou garder au pays les gens de talent?

Les niveaux de gains et la dispersion des gains

Les gains d'emploi restent une motivation importante de la migration comme le confirment bon nombre d'études de l'IRC (Mueller et Hunt, IRC-2006; Gross et Schmitt, IRC-2006; Globerman et Shapiro, IRC-2006). En général, ceux qui ont un revenu élevé sont habituellement plus sensibles aux écarts de revenu que ceux qui ont un faible revenu (voir Finnie, IRC-2006a), à l'instar des personnes hautement scolarisées par rapport à celles qui sont faiblement scolarisées (voir Globerman et Shapiro, IRC-2006), et des personnes hautement qualifiées par rapport à celles qui sont faiblement qualifiées (les qualifications étant mesurées à la fois par la scolarité et l'expérience, voir Mueller et Hunt, IRC-2006).

Depuis Roy (1951) et Borjas (1987), on a fait valoir que les travailleurs très doués sont attirés vers les régions où l'inégalité des revenus (ou la dispersion des gains) est la plus élevée, indépendamment de l'écart sur le plan du revenu moyen. Si cela est vrai, les États-Unis seraient encore plus attractifs pour les Canadiens hautement qualifiés, étant donné le plus faible niveau d'inégalité des revenus au Canada, ce qui se traduirait par un exode des cerveaux plus important. Dans deux études, on a trouvé que l'effet de la dispersion des gains est important mais secondaire par rapport à la différence absolue des niveaux de gains. Pour Gross et Schmitt (IRC-2006), la distribution relative des revenus a très peu influencé la migration de travailleurs professionnels vers la France de 1983 à 2000 et le niveau relatif des revenus est habituellement plus important. Par contre, Mueller et Hunt (IRC-2006) montrent que la migration de travailleurs hautement qualifiés entre les États-Unis et le Canada vers la fin des années 1990 et le début des années 2000 a été déterminée à la fois par la de dispersion des salaires et par leur moyenne plus élevée (après impôts). Toutefois, ce dernier effet est plus important.

En suivant l'hypothèse de Roy et Borjas, Dostie et Léger (IRC-2006) soutiennent que ce ne sont pas tant les différences de gains qui attirent les travailleurs hautement qualifiés que la « prime à la productivité ». Ils ont ventilé les gains des médecins au Canada (de 1989 à 1997) en une composante pouvant être expliquée par des caractéristiques observables telles que l'âge, le sexe et le niveau de scolarité, et en une composante résiduelle (en raison de caractéristiques non observables et d'une variance aléatoire). Selon les auteurs, cette composante résiduelle représente la « productivité », laquelle contribue aux gains au-delà des caractéristiques observables des médecins. Selon les résultats de leur étude, les médecins les plus productifs (ceux dont la composante résiduelle est plus élevée) ont tendance à migrer vers la région où l'écart entre les gains reliés à la productivité est le plus élevé (la prime à la productivité). Le cas échéant, les politiques touchant la prime à la productivité influenceraient davantage la décision de migrer des médecins que celles touchant le rendement des caractéristiques observables des médecins (par exemple la spécialité).

Comme en témoignent les résultats d'entrevues dans Richardson (IRC-2006) et Richardson, McBey et McKenna (IRC-2006) ainsi que les résultats quantitatifs de Dostie et Léger, les travailleurs spécialisés sont aussi attirés vers des endroits où ils ont l'occasion de hausser leur rémunération en travaillant plus fort, plus intelligemment ou mieux. Autrement dit, la rémunération au rendement attire les travailleurs spécialisés; des milieux de travail où la rémunération est indépendante de la performance attirent plutôt les travailleurs peu qualifiés (ou les travailleurs non motivés). Un exemple récent mais très éloquent est l'étude de cas bien connue de Lazear (2000) concernant l'instauration d'une rémunération au rendement dans une entreprise de fabrication (Safelite Glass). Il est peut-être évident que l'ajout d'un élément de rémunération au rendement a incité bon nombre de travailleurs de la Safelite à produire davantage afin de gagner plus d'argent. Ce qui est plus surprenant, est le fait que la moitié de la hausse marquée de la productivité attribuée à l'instauration d'une rémunération au rendement dans ce cas-ci s'est faite sous forme d'autosélection des employés plutôt que d'une modification à l'effort consenti par les employés de l'entreprise. Autrement dit, grâce à la rémunération au rendement, certains employés doués ont jugé plus intéressant de rester chez Safelite et l'entreprise est devenue un employeur prisé pour ce genre de travailleurs. Cet effet de sélection a eu un effet très positif sur le rendement de Safelite.

Autres facteurs économiques

De toute évidence, la situation des affaires en général, surtout l'état de la demande dans certaines industries clés, a une incidence sur les mouvements de travailleurs hautement qualifiés. Finnie (IRC-2006a) a constaté une diminution des mouvements du Canada vers les États-Unis après l'effondrement des entreprises point-com au début de la décennie. On s'attend à une évolution naturelle et cyclique des mouvements de travailleurs spécialisés dans le monde; d'ailleurs, le fait que ces mouvements puissent atténuer les fluctuations cycliques de la demande est un avantage découlant d'une plus grande intégration économique internationale.

Selon certaines études, le commerce international et l'IDE influent sur les mouvements de travailleurs hautement qualifiés dans le monde. Les politiques touchant l'un de ces éléments ont une incidence sur les autres (Head et Ries, 2004). Globerman et Shapiro (IRC-2006) ont trouvé une preuve empirique d'un lien positif entre le commerce et le mouvement du capital financier et du capital humain. Selon les auteurs, l'IDE et les échanges commerciaux bilatéraux sont complémentaires à la migration de travailleurs hautement scolarisés dans les pays de l'OCDE. Toutefois, DeVoretz (IRC-2006), suggère que ce mouvement en tandem est peut-être faux en raison de la possibilité d'une causalité inverse, la migration entraînant le commerce et non le contraire. La question de la causalité par opposition au mouvement en tandem du commerce, de l'IDE et du capital humain reste à être étudiée.

Le rôle des réseaux sociaux et professionnels dans la facilitation des mouvements de travailleurs hautement qualifiés d'un pays à l'autre est une autre question qui mérite d'être examinée. Selon Gross et Schmitt (IRC-2006), toute politique non économique touchant les réseaux culturels ou sociaux réussit habituellement moins bien à stimuler la migration de professionnels comparativement aux travailleurs faiblement qualifiés. Par contre, les réseaux professionnels sont considérés comme un élément essentiel pour le lancement et la poursuite de recherches en collaboration et la rédaction conjointe de documents par des chercheurs de divers pays, comme le laissent entendre Cowan, Feldman et Kogler (IRC-2006). Les réseaux comprennent aussi la collaboration entre les entreprises, comme l'a constaté Richardson (IRC-2006), qui a noté l'importance de ce genre de réseaux et des partenariats financiers dans l'échange de scientifiques et de cadres dans l'industrie de la biotechnologie de la région de Vancouver ces dernières années. Il ne faudrait pas sous-estimer le rôle des multinationales dans l'échange de capital humain entre les pays dans un contexte de mondialisation (Globerman, 1999).

Certaines études sur les grappes du savoir laissent supposer qu'une masse de travailleurs hautement qualifiés exercent un pouvoir d'attraction sur leurs homologues en raison de l'effet d'agglomération (voir, par exemple, Wolfe et Gertler, 2004; Florida, 2005). Par exemple, des travailleurs hautement qualifiés en grand nombre dans une grappe attireront de nouvelles entreprises qui, à leur tour, attireront un plus grand nombre de travailleurs hautement qualifiés dans la région. Les résultats de l'étude de Richardson sur le secteur de la biotechnologie à Vancouver semblent indiquer une propension semblable. Des politiques gouvernementales telles que le Programme des chaires de recherche du Canada, qui visent à favoriser la création de réseaux de centres d'excellence, pourraient contribuer à attirer un plus grand nombre de travailleurs hautement qualifiés grâce à leur appui aux grappes.

Les facteurs autres que pécuniaires

Des facteurs autres que pécuniaires ont aussi une incidence sur la décision de migrer. Globerman et Shapiro (IRC-2006) font remarquer les « distances » géographiques, linguistiques et culturelles qui ont une corrélation négative avec les mouvements transfrontaliers des travailleurs. Des avantages relatifs autres que pécuniaires des diverses destinations, qui influent sur la qualité de vie des migrants et de leur famille, jouent souvent un rôle important dans la décision de migrer (Helliwell, IRC-2006). Ces avantages sont généralement liés à la satisfaction de vivre et à des raisons familiales, par exemple, le climat et l'environnement (Mueller et Hunt, IRC-2006), l'accès à des écoles de qualité pour les enfants (Richardson, IRC-2006), la sécurité publique et le système de soins de santé (Richardson et autres, IRC-2006).

L'exposé ci-dessus donne une vue d'ensemble des facteurs qui influent sur la décision de migrer des travailleurs hautement qualifiés. Nous notons certaines différences lorsque nous examinons différents secteurs et différentes professions plus en détail. La diversité de l'expérience sur le marché du travail et des facteurs touchant la décision de venir travailler au Canada est documentée dans des études de cas qui sont examinées dans la section suivante.

 

4. La situation dans différents secteurs au Canada : Leçons tirées des données micro-économiques

Les incitatifs et les obstacles à la migration internationale varient selon les secteurs au Canada. Des études micro-économiques montrent ce qui a amené des travailleurs hautement qualifiés à certains secteurs canadiens et traitent de l'expérience de ces travailleurs sur le marché du travail canadien.

Le secteur de la haute technologie

D'après Hall (IRC-2006), plus d'un quart des travailleurs de secteurs de haute technologie en 2000 étaient des immigrants, ce qui est supérieur à la moyenne de 20 %, de tous les secteurs au Canada. De plus, malgré ce que les gens pensent au sujet de la non-reconnaissance, par les employeurs, des compétences des étrangers, les employeurs des secteurs de pointe semblent reconnaître et récompenser ces compétences. Hall a analysé les données provenant de la première vague de l'Enquête longitudinale auprès des immigrants du Canada, recueillies en 2001-2002. Il a constaté que la formation et l'expérience en haute technologie acquises avant d'immigrer augmentent les chances d'obtenir un emploi au Canada, tandis que l'expérience acquise dans un autre domaine à l'étranger n'obtient pas ce genre de reconnaissance. Les immigrants récents dotés d'une expérience en haute technologie ont droit en plus à des « emplois de qualité » (c.-à-d. une plus grande probabilité d'obtenir un emploi à temps plein dans leur domaine). Cette constatation, soit que l'expérience acquise dans un domaine autre que de haute technologie avant d'immigrer ne soit pas aussi reconnue, correspond aux résultats d'études antérieures (Aydemir et Skuterud, 2005).

À l'aide de données du Recensement de 2001, Hall montre que la répartition des emplois chez les immigrants n'est pas, dans une grande mesure, aléatoire puisqu'un nombre relativement plus grand d'immigrants travaillent dans le secteur de technologie de pointe plutôt qu'ailleurs. Cela pourrait être lié à la forte demande sur le marché du travail des technologies de l'information (TI) et à l'incidence de la sélection des immigrants et des dispositions relatives à l'entrée temporaire des travailleurs en TI dans les années 1990. Les immigrants qui travaillent dans les secteurs de pointe sont beaucoup plus nombreux dans les grandes villes. Toutefois, la géographie n'a pas une grande incidence sur la probabilité d'emploi des nouveaux immigrants. En ce qui a trait aux gains annuels, en 1990, les immigrants travaillant dans des secteurs de pointe gagnaient, en moyenne, environ 3 500 $ de plus que les travailleurs nés au Canada, mais cet écart avait disparu en 2000.

La constatation de Hall signifie peut-être que, lorsque la demande d'un certain type de compétences est élevée, les employeurs se donnent la peine d'évaluer les titres de compétence acquis à l'extérieur du Canada. Dans de nombreuses industries de pointe (en particulier la programmation et l'analyse informatiques), aucune attestation officielle n'est requise, et les employeurs évaluent directement les compétences de leurs éventuels employés.

Dans une étude sur le secteur de la biotechnologie en plein essor de Vancouver, Richardson (IRC-2006) relève une proportion importante d'étrangers chez les cadres et les spécialistes, soit entre 15 % et 90 % des d'entreprises faisant partie de l'échantillon en 2005. La plupart viennent des États-Unis, alors qu'un pourcentage élevé de scientifiques principaux viennent d'Asie et d'Europe. Il semble y avoir une offre suffisante d'associés de recherche et de scientifiques subalternes7 sur le marché du travail canadien, mais ce n'est pas autant le cas aux échelons supérieurs. Les rendements financiers et pécuniaires ne sont pas les principaux motifs d'acceptation d'un emploi au Canada pour ces étrangers hautement qualifiés, mais l'attrait de l'éclosion de grappes en biotechnologie et de la possibilité d'obtenir un poste de cadre supérieur est plus souvent évoqué. Les facteurs de dissuasion les plus souvent cités sont les taux élevés d'imposition au Canada, la difficulté pour le conjoint de se trouver un emploi et le temps que les étrangers habitant en Colombie-Britannique doivent attendre avant de pouvoir accéder au système provincial de soins de santé.

Les professeurs d'université et les professionnels de la santé

Dans une étude de cas, Richardson et autres (IRC-2006) examinent la décision d'immigrer, l'expérience professionnelle et personnelle et les projets de retour au pays des professeurs étrangers de six universités canadiennes. Les rendements financiers et pécuniaires ne sont pas aussi importants pour les répondants. La plupart ont indiqué avoir accepter un poste au Canada pour le mode de vie et des raisons familiales. Bien qu'en général, les répondants soient satisfaits de leur expérience au Canada, certains ont parlé de quelques difficultés et préoccupations concernant les processus visant la permanence et l'avancement et le financement de la recherche, le statut d'immigrant (le passage du permis de travail à la résidence permanente) et l'emploi pour le conjoint. Les constatations des auteurs mettent en lumière le concept à multiples facettes de l'intégration « scolaire et familiale ». Les auteurs suggèrent que l'unité d'analyse des interventions de recrutement et de sélection ne devrait pas être basée sur la démarche individuelle traditionnelle.8

Dans son étude sur le secteur des soins de santé, Bourgeault examine la migration de médecins, d'infirmières, de psychologues et de sages-femmes en provenance ou à destination du Canada. Bourgeault (IRC-2006) décrit le processus d'entrée nécessaire que ces spécialistes de la santé formés à l'étranger doivent suivre pour pratiquer au Canada. Elle souligne deux grands obstacles à la reconnaissance professionnelle : 1) le manque de renseignements pertinents au Canada sur l'autorisation et les normes professionnelles et 2) les délais, les coûts et le dédoublement possible entourant la pratique et la procédure relatives à l'obtention de permis. De nombreux programmes et comités mixtes du gouvernement et des associations professionnelles ont été créés dans le but de réduire ces obstacles.

Les études sur la mobilité des professionnels de la santé traitent d'une question qui n'est abordée dans aucune autre étude de cas, soit l'aspect éthique du recrutement de professionnels de la santé à l'étranger. Les pays d'origine moins développés de ces professionnels sont pénalisés par la concurrence mondiale, car celle-ci les prive de précieuses ressources humaines au profit des pays riches.9

L'exposé précédent fait ressortir la forte incidence d'une vaste gamme de facteurs sur la décision de migrer et la performance sur le marché du travail des immigrants hautement qualifiés et d'autres travailleurs étrangers dans divers secteurs. De plus, des politiques directes ont des conséquences pour la mobilité internationale (dans les deux directions, en provenance ou à destination du Canada), par exemple la politique d'immigration et les accords de commerce internationaux. La section suivante porte sur l'incidence de ces facteurs sur le plan des politiques.

5. Facteurs sur le plan des politiques qui influencent la mobilité des travailleurs hautement qualifiés

Deux grands types de politiques touchent les mouvements transfrontaliers de travailleurs hautement qualifiés, soit les politiques d'immigration et les politiques liées à l'intégration internationale des marchés du travail. D'autres conséquences découlent des politiques nationales et provinciales, notamment l'imposition du revenu et les avantages sociaux des travailleurs ainsi que les pratiques et la réglementation du marché du travail.

Les questions stratégiques sur l'impact de l'intégration des marchés du travail du Canada et des États-Unis sont particulièrement intéressantes. Harris (2004) désigne cette intégration complète par « la politique de la libéralisation des échanges de services de main-d'œuvre ». À l'heure actuelle, l'entrée temporaire de main-d'œuvre qualifiée circulant entre les États-Unis et le Canada est assujettie aux dispositions du chapitre 16 de l'ALENA (portant sur le visa TN-ALENA), lequel facilite la circulation entre les frontières des voyageurs d'affaires, des spécialistes, des personnes mutées au sein d'une même entreprise, ainsi que des commerçants et des investisseurs.

À l'aide de données de la France et de la Suisse, Gross et Schmitt (IRC-2006) ont constaté qu'une politique de libre circulation de la main-d'œuvre (c'est-à-dire un accord international permettant la libre circulation des travailleurs entre les pays) a une plus forte incidence sur les flux de main-d'œuvre faiblement qualifiée que sur flux de main-d'œuvre hautement qualifiée. À partir de ces exemples, ils supposent qu'une politique de libre circulation entre les États-Unis et le Canada ne changerait peut-être pas beaucoup les mouvements de travailleurs hautement qualifiés. De même, selon Harris, Eaton et Schmitt (2006), l'avènement d'une libre circulation de la main-d'œuvre sur le continent aurait peu d'incidence sur le marché du travail canadien et les flux entre les États-Unis et le Canada, mais pourrait se traduire par une hausse des flux de travailleurs faiblement qualifiés du Mexique vers le Canada.

Dans une comparaison internationale, Gera et Songsakul (IRC-2005) analysent la procédure d'admission des travailleurs temporaires au Canada et avancent que le Canada fait moins bonne figure comparativement à d'autres pays concurrents importants. Selon certains travailleurs étrangers spécialisés et les entreprises qui les embauchent, la bureaucratie et les lourdeurs administratives liées à l'émission des visas, y compris les restrictions concernant l'emploi des conjoints, constituent les principaux obstacles à la mobilité au Canada (voir Richardson, IRC-2006; Richardson et autres, IRC-2006; Bourgeault, IRC-2006). On estime que la lourde procédure d'admission temporaire des immigrants, surtout le processus de validation de l'offre d'emploi, est un obstacle majeur pour les travailleurs étrangers qui veulent entrer sur le marché du travail canadien. Dans les industries qui évoluent rapidement et qui sont fortement spécialisées, comme c'est le cas des entreprises de haute technologie d'aujourd'hui, il semble irréaliste de s'attendre à ce qu'un organisme gouvernemental puisse acquérir suffisamment de compétences pour lui permettre de juger vraiment si des Canadiens qualifiés ont été oubliés du processus de recherche de candidats de l'employeur, comme l'exige le processus de validation de l'offre d'emploi. Ce processus entraîne des frustrations pour certains employeurs; il pourrait être simplifié ou supprimé. L'un des moyens d'action possibles serait d'adopter une procédure « orientée vers l'employeur » pour ce qui est de la validation de l'offre d'emploi pour l'admission temporaire de travailleurs spécialisés semblable au système H 1B aux États-Unis.

Tout élargissement de la portée d'accords sur le commerce des services tels que l'Accord général sur le commerce des services, sous les auspices de l'Organisation mondiale du commerce, et des dispositions des accords de la Coopération économique de la zone Asie-Pacifique sur les gens d'affaires, aura certes un effet sur les flux de travailleurs hautement qualifiés en provenance ou à destination du Canada. Ces accords internationaux traitent de l'échange temporaire de travailleurs hautement qualifiés.

Quand il s'agit de flux permanents, c'est la politique d'immigration qui entre en jeu. En comparant les politiques, on s'aperçoit que la politique d'immigration du Canada est bien conçue pour attirer des immigrants hautement scolarisés, mais que le problème réside dans l'intégration de ces immigrants sur le marché du travail (Gera et Songsakul, IRC-2005). Par exemple, Aydemir et Skuterud (2005) ont constaté que les gains des nouveaux immigrants au Canada se sont détériorés dans les années 1980 et 1990. Certains soutiennent que les critères de sélection des compétences actuellement utilisés sont peut-être favorables à une combinaison de compétences des immigrants qui ne sont pas applicables au marché du travail canadien.

D'un autre côté, DeVoretz (IRC-2006) attribue une partie du blâme à la façon dont est conçue la politique d'immigration. Il examine l'évolution de la politique d'immigration du Canada au cours des 30 dernières années, et il conclut que la décision du Canada de conserver et même d'accroître les flux d'immigrants durant une période prolongée de faiblesse économique dans les années 1990 est, en partie, responsable de la détérioration de la performance des immigrants sur le marché du travail. La politique expansionniste dans les années 1990, qui reposait sur l'admission d'un nombre suffisant de travailleurs immigrants hautement qualifiés pour répondre à la demande croissante de main-d'œuvre dans certains professions, a fait en sorte que le Canada s'est retrouvé avec « un héritage d'immigrants hautement scolarisés dont les titres de compétence ne sont pas reconnus ou ne correspondent pas aux normes canadiennes ».

Les compétences des immigrants et la politique de sélection

Le pourcentage d'immigrants adultes possédant une formation universitaire est plus élevé que celui de la population adulte générale du Canada (36 % pour les immigrants récents et 21 % pour l'ensemble des immigrants contre 15 % pour la population selon le recensement du Canada). Toutefois, comme Coulombe et Tremblay (IRC-2006) l'ont montré, une mesure des compétences basée sur le nombre d'années de scolarité n'est pas une bonne indication des capacités de lecture et d'écriture des immigrants. À l'aide de données tirées de l'Enquête internationale sur l'alphabétisation et les compétences des adultes de 2003, les auteurs ont constaté qu'en moyenne, un immigrant qui a 13 années de scolarité possèdent des capacités de lecture et d'écriture comparables à celles d'une personne née au Canada et qui possède 9,7 années de scolarité. Sweetman (2004) attribue l'écart des gains des immigrants à la qualité de l'enseignement dans les pays d'origine des immigrants. Confirmant cet état de fait, Coulombe et Tremblay ont constaté que l'ampleur de l'écart entre les compétences et la scolarité est étroitement liée au produit intérieur brut (PIB) du pays d'origine et que l'écart disparaît complètement chez les enfants d'immigrants nés au Canada (qui ont fait leurs études primaires et secondaires au Canada). En outre, l'expérience professionnelle des immigrants nouvellement arrivés montre l'importance de la connaissance de l'anglais et/ou du français dans la possibilité d'obtenir un emploi dans les six premiers mois (Hall, IRC-2006). Ces constatations signifient que l'écart relevé dans le rendement d'une année de scolarité entre les immigrants et les personnes nées au Canada est attribuable, entièrement ou en partie, au niveau moins élevé de compétences pertinentes sur le marché du travail canadien, notamment leur connaissance des langues officielles. Ceci suggère que les critères d'immigration basés uniquement sur le niveau de scolarité ne permettent peut-être pas, aussi efficacement que l'on pense, de choisir les immigrants les plus spécialisés. Il y aurait peut-être lieu d'améliorer les critères de sélection du programme des immigrants spécialisés, notamment l'évaluation des études, des compétences relatives aux langues officielles et des compétences générales applicables au marché du travail canadien.

La « qualité » des compétences des immigrants et la pertinence de leurs compétences pour le marché du travail canadien sont étroitement liées à la question de la reconnaissance des titres de compétence étrangers. Les décideurs ont l'habitude de pointer du doigt la reconnaissance des titres de compétence étrangers comme étant le principal problème des pratiques et des règlements sur le marché du travail canadien. Partons du fait que les immigrants ont un rendement moins élevé de leurs années de scolarité et de leur expérience professionnelle que les personnes nées au Canada. La question comporte deux volets : les immigrants ont-ils acquis moins de compétences utilisables sur le marché du travail canadien pour chaque année de scolarité (ou d'expérience professionnelle)? Ou s'agit-il d'un problème de reconnaissance des titres de compétence?

Le premier volet est lié à la sélection des immigrants hautement spécialisés et à la qualité de leurs études et de leur expérience professionnelle, comme nous l'avons déjà mentionné. Le deuxième a trait à un problème d'information. La preuve selon laquelle de nombreux immigrants ont beaucoup de difficulté à faire reconnaître par des organismes de réglementation leurs titres de compétence professionnelle pour pouvoir pratiquer au Canada peut être interprétée comme étant une preuve de compétences inadéquates, de problème d'information, ou les deux. Dans une certaine mesure, il se peut fort bien que des pratiques administratives onéreuses ou restrictives et qu'une complexité relative aux champs de compétence rendent difficile l'obtention d'une reconnaissance professionnelle (par exemple les obstacles à l'entrée attribuables au nombre maximal de médecins admis à l'internat). Cependant, ce ne sont pas là les seules difficultés auxquelles sont confrontés les immigrants désireux de faire reconnaître leurs titres de compétence. Par exemple, en Ontario, le taux d'échec aux examens visant à établir le droit de pratiquer au Canada est aussi élevé que 79 % dans le cas des diplômés en médecine de l'étranger et de 66 % dans le cas des infirmières formées à l'étranger (Bourgeault, IRC-2006). Cela étant dit, aucune donnée n'indique dans quelle mesure la difficulté pour un immigrant d'obtenir le droit de pratiquer est attribuable à des problèmes administratifs avec les organismes de réglementation et dans quelle mesure elle est attribuable au fait que ses compétences ne correspondent pas aux normes de pratique au Canada. Toutefois, la deuxième cause a moins d'impact sur la capacité du Canada de livrer une concurrence pour obtenir une main-d'œuvre qualifiée : si leurs compétences sont inadéquates ici, elles le seront dans tous les pays occidentaux. Inversement, la première cause freine la capacité de concurrence : les immigrants spécialisés iront là où les obstacles sont moins grands. Donc, la question des obstacles réglementaires mérite d'être étudiée en vue d'une amélioration.

Les régimes de rémunération du travail jouent un rôle important dans la « sélection » basée sur les compétences non observables des travailleurs. L'attrait pour les travailleurs qualifiés provenant d'un environnement au rendement marginal élevé par rapport à l'effort a deux incidences possibles sur la politique d'immigration. Premièrement, alors que les caractéristiques observables, telles que la scolarité, peuvent aider dans une certaine mesure à choisir les immigrants, la sélection des immigrations basée sur les aspects difficiles à observer tels que l'énergie, la motivation, la tolérance au risque et le dynamisme peut être réalisée plus efficacement grâce à un environnement économique qui incite les travailleurs dotés de ces caractéristiques à faire de l'autosélection. La « sélection sur les caractéristiques observables », comme on dit en jargon économique, n'est pas d'une très grande utilité. Deuxièmement, cet argument semble indiquer des problèmes institutionnels dans certains secteurs canadiens, lesquels peuvent entraver la capacité de concurrence du Canada pour obtenir les meilleurs. C'est le cas, par exemple, du secteur universitaire, où le niveau élevé de syndicalisation des enseignants peut limiter la disponibilité de la rémunération basée sur le rendement pour ces travailleurs hautement qualifiés.

Autres politiques touchant la mobilité des travailleurs hautement qualifiés

D'autres politiques, outre les pratiques et les règlements sur le marché du travail susmentionnés, influent sur le choix du lieu de migration des travailleurs mobiles. Les politiques relevant des domaines de la fiscalité et des avantages sociaux, qui touchent les travailleurs de tous les groupes et secteurs, sont abordées dans la prochaine section. Il importe de noter que diverses autres politiques ont une incidence sur la décision de migrer de certains groupes, notamment les politiques en matière de sciences et de technologie pour les scientifiques, la réglementation de la concurrence et du marché pour les entrepreneurs et les cadres, la politique sur les soins de santé pour les professionnels de ce secteur ainsi que la politique d'éducation pour les enseignants et les étudiants. Des études plus détaillées sur les politiques influant sur la migration des travailleurs de certaines professions se trouvent, par exemple, dans les études de Bourgeault, Richardson, Richardson et al., et McHale élaborées dans le cadre de l'IRC.

Une personne sera incitée à déménager là où le rendement de l'investissement dans son capital humain sera le plus élevé, toutes choses étant égales par ailleurs. Ainsi, si le salaire avant impôts est égal dans deux territoires de compétence, soit les États-Unis et le Canada, la personne sera attirée par les États-Unis à cause des taux d'imposition relativement plus bas.10 En outre, les plus faibles taux d'impôt sur le capital et le traitement fiscal plus favorable des options sur actions aux États-Unis pourraient intéresser davantage les travailleurs hautement qualifiés dans les secteurs où la rémunération sous forme d'actions est importante et dans les secteurs en plein essor où il y a de nombreuses entreprises en démarrage.

Malgré la différence entre les taux d'imposition applicables aux États-Unis et au Canada, les résultats des recherches sur l'effet de l'impôt et de la migration de travailleurs hautement qualifiés sont contrastés. Wagner (2000) a constaté que les écarts au chapitre de l'impôt sur le revenu contribuent à l'exode des cerveaux du Canada vers les États-Unis; toutefois, la réaction aux modifications fiscales est peu importante. Selon Saez et Veall (2005), les réductions du taux d'imposition marginal du revenu ne sont pas intervenues dans la hausse marquée de la proportion de ceux qui gagnent les plus hauts revenus au Canada au cours des 20 dernières années. Ils attribuent la hausse de la proportion de personnes qui gagnent les plus hauts revenus au Canada à la concurrence livrée aux États-Unis pour obtenir les gestionnaires et les professionnels les plus hautement qualifiés. D'un autre côté, selon des simulations effectuées par Mueller et Hunt (IRC-2006), si l'on ramenait le taux moyen d'imposition du Canada au taux des États-Unis (tout en réduisant les dépenses publiques pour maintenir l'équilibre budgétaire), on diminuerait considérablement la migration vers le sud de travailleurs canadiens hautement qualifiés.

Les écarts d'impôt entre les pays peuvent pénaliser les travailleurs qui changent de lieu de résidence, que ce soit des travailleurs étrangers au Canada ou de travailleurs canadiens à l'étranger. Les travailleurs qualifiés ont habituellement plus d'avoirs financiers que les autres travailleurs. Comme le montrent clairement Li (IRC-2006) et Richardson (IRC-2006), le traitement fiscal de certains avoirs financiers constitue une entrave importante à la capacité d'attirer des travailleurs hautement qualifiés au Canada. Li indique les politiques fiscales qui font actuellement obstacle aux mouvements de contribuables entre les États-Unis et le Canada. Les décalages et les complications concernant l'impôt sur les salaires, les investissements, les options sur actions et les gains en capital, ainsi que le traitement de certains avantages sociaux applicables aux travailleurs hautement qualifiés qui passent d'un pays à l'autre entraînent des problèmes de double imposition, d'impossibilité de transférer un régime de pension ou d'y investir et de perte de revenu (en raison des coûts de transaction élevés pour traiter et régler les cas liés à la fiscalité). Cela n'encourage pas les personnes à accepter une offre d'emploi à l'étranger. L'auteur propose quelques solutions, notamment des changements à la loi sur l'impôt et aux traités internationaux.

Comme on peut le voir à partir de l'exposé ci-dessus, les politiques peuvent faciliter autant qu'entraver les flux de travailleurs hautement qualifiés entre les pays. La question est de savoir dans quelle direction cela devrait mener. La réponse réside dans l'équilibre des avantages et des coûts de la mobilité de la main-d'œuvre hautement qualifiée — le sujet de la prochaine section.

6. Les coûts et les avantages de la mobilité de la main-d'œuvre hautement qualifiée vus sous un angle différent

Les bénéfices et les coûts liés à la mobilité internationale de la main-d'œuvre hautement qualifiée sont complexes. Nous examinons ici, outre les coûts directs habituels de comptabilité de transfert, les effets sur le revenu national, le bien-être, l'accumulation et la répartition des compétences spécialisées et les retombées du savoir. Il ne s'agit pas simplement de minimiser les coûts et de lever les barrières. Les décideurs doivent aussi étudier d'autres mesures de rechange et mesures complémentaires afin de créer, d'acheter et de soutenir la concurrence pour obtenir les talents nécessaires à l'accroissement de la capacité d'innover du Canada.

Un pays devrait-il participer à un plus grand échange de capital humain avec d'autres pays? La réponse est fonction des avantages que tire le pays de ce genre d'échanges. Cela relève de l'économie de bien-être.11 Harris (IRC-2004) montre que les répercussions d'une plus grande mobilité de la main-d'œuvre sur la dynamique de la productivité d'un pays est largement tributaire d'externalités localisées liées au capital humain, aux externalités du savoir au niveau mondial et aux économies de la spécialisation qu'il est davantage possible de réaliser dans un contexte de marchés du travail étroitement intégrés. L'auteur a donc précisé deux grands cadres d'analyse fondés sur l'approche de la migration de facteurs et sur l'approche de l'intégration des marchés du travail. Selon la première approche, la concurrence à somme nulle que se livrent les pays pour obtenir une main-d'œuvre qualifiée signifie que les petits pays peuvent en ressortir perdants à cause du nivellement constant par le bas. Cette situation peut être grave pour les pays qui ont peu de travailleurs qualifiés, mais moins importante pour un pays comme le Canada qui accueille un grand nombre de ressources humaines. D'un autre côté, selon la deuxième approche, les mesures d'intégration des marchés du travail peuvent être très profitables pour les petits pays, puisque l'échange de main-d'œuvre spécialisée peut être rentable aux pays dont les économies sont intégrées. Cela signifie que la croissance à long terme du Canada pourrait être fonction des mesures destinées à accroître la mobilité de la main-d'œuvre hautement qualifiée avec les États-Unis.

Pour un pays, un solde excédentaire de capital humain devrait produire plus d'avantages si l'on se fie à la simple logique de l'approche du transfert de capital humain (c'est-à-dire lorsqu'un pays exporte plus de capital humain qu'il en importe). Toutefois, l'accueil de nouveaux venus, qualifiés ou non, ne se fait jamais sans coûts (Helliwell, IRC-2006). L'amélioration sur le plan du bien-être dépend fortement de la spécialisation et de l'attachement au marché du travail des nouveaux venus. Comme Fougère, Harvey, Mercenier et Mérette (IRC-2005) l'ont montré, à l'aide d'un modèle calculable d'équilibre général, l'immigration pourrait se traduire par une croissance économique faible ou même négative (par rapport au scénario de référence) si les immigrants ne sont pas très attachés au marché du travail intérieur et ne sont pas très productifs. Voilà qui nous conduit à la question difficile de l'intégration des marchés du travail et des niveaux de compétence des immigrants et d'autres travailleurs étrangers, comme nous l'avons discuté plus haut.

Les avantages de l'immigration

Est-il évident (au moins en moyenne) que les résidents actuels du Canada seraient gagnants si on pouvait convaincre un plus grand nombre de travailleurs qualifiés d'immigrer au pays ou un plus grand nombre de travailleurs qualifiés canadiens de rester au Canada? Pour étudier cette question, il faut comprendre que, selon le modèle économique de base, chaque travailleur dans une économie concurrentielle est payé pour sa contribution supplémentaire à l'économie. D'un côté, les travailleurs qualifiés peuvent produire davantage que les autres travailleurs et, d'un autre côté, ils sont payés en fonction de leur productivité plus élevée. Pour que les travailleurs canadiens actuels retirent un avantage net important de l'immigration d'un plus grand nombre de travailleurs qualifiés, il doit y avoir une certaine forme d'externalités, p. ex. un mécanisme selon lequel l'ajout de travailleurs qualifiés immigrants à l'économie fait croître les salaires après impôts des autres travailleurs canadiens.12 Il y a trois grands types d'externalités positives attribuables aux travailleurs qualifiés : la consommation, la fiscalité et la production. Chaque type est traité ci-dessous.

La façon dont la présence de travailleurs qualifiés immigrants peut profiter le plus directement aux Canadiens est l'externalité de la consommation. Il se peut qu'il soit tout simplement avantageux pour les Canadiens d'habiter ou de travailler près de travailleurs qualifiés immigrants ou de voir leurs enfants dans les mêmes classes que celles des enfants des immigrants. Bien que cet argument puisse sembler expliquer pourquoi les Canadiens pourraient préférer des immigrants travailleurs qualifiés, quel que soit leur nombre, aux immigrants travailleurs peu qualifiés, il semble que ce ne soit pas un argument solide en faveur de l'augmentation du nombre total d'immigrants. De plus, il importe de se rappeler que les externalités de la consommation attribuables aux voisins à revenus élevés peuvent être positives ou négatives (une récente étude sur le comportement a montré que la jalousie est un facteur important), question qui peut revêtir une autre dimension sociale lorsque les nouveaux voisins à revenus élevés appartiennent à une minorité visible.

Une deuxième façon dont la présence de travailleurs qualifiés immigrants peut profiter aux Canadiens est l'externalité fiscale, c'est-à-dire qu'un nouveau travailleur hautement qualifié qui gagne plus que le salaire moyen d'un travailleur local peut contribuer plus que proportionnellement à financer les dépenses publiques à cause du système d'impôt progressif. De plus, a) les immigrants travailleurs qualifiés sont moins susceptibles de recevoir une aide au revenu du gouvernement, b) ils ont habituellement été instruits aux frais d'un autre pays et c) ils sont relativement jeunes (ce qui fait qu'ils subventionnent le système de pension public) sont des facteurs qui apportent un effet fiscal net positif à l'immigration de travailleurs qualifiés (et un effet fiscal négatif à l'émigration de travailleurs peu qualifiés). Storesletten (2000) milite en faveur de l'admission d'un plus grand nombre d'immigrants spécialisés aux États-Unis qui, selon lui, constitue une façon de régler les problèmes budgétaires liés au vieillissement de la génération du baby-boom. Les données empiriques sur les externalités liées à la fiscalité sont limitées et, à ce jour, nous ne savons pas si cette affirmation s'applique au Canada.

Enfin, de nouveaux travailleurs hautement qualifiés peuvent procurer au pays d'accueil des avantages supplémentaires, outre le salaire qu'ils reçoivent, grâce aux externalités de la production qu'ils créent. Cela s'explique par l'effet d'agglomération selon lequel un travailleur productif additionnel contribue plus que proportionnellement à l'augmentation de la productivité moyenne de l'ensemble de l'industrie, par exemple en permettant la création de grappes du savoir et en stimulant la croissance découlant des externalités du savoir.13 Puisque ces externalités peuvent influer sur le taux de croissance de la productivité d'un pays14, elles sont susceptibles d'être beaucoup plus importantes que les deux sources d'externalités précédentes. Ce sont ces externalités qui sous-tendent l'orientation de la politique qui crée une demande de travailleurs qualifiés (et, par conséquent, la volonté d'attraction et de rétention des travailleurs qualifiés), ce qui révèle implicitement un argument stratégique de l'industrie en faveur de l'atteinte de « masses critiques » de travailleurs qualifiés pour une économie du savoir. Il est à noter que cette justification de l'immigration de travailleurs qualifiés se démarque sensiblement de l'idée que le Canada est actuellement aux prises avec une « pénurie » de travailleurs qualifiés et qu'il doit recourir à la main-d'œuvre immigrante pour combler cette pénurie.

Une autre raison invoquée pour faciliter la mobilité transfrontalière de la main-d'œuvre hautement qualifiée est l'augmentation des flux de connaissances en provenance et à destination du pays. Rivera-Batiz et Romer (1991) montrent qu'un plus grand flux de connaissances (d'idées) tel que celui produit par la migration internationale peut stimuler la productivité du secteur de la recherche-développement et, ainsi, augmenter le taux de croissance de long terme des régions d'origine et d'accueil. Si l'on appliquait cette proposition au Canada, cela signifierait que le pays pourrait profiter d'une plus grande mobilité internationale des travailleurs qualifiés, par qui se transmet le savoir en provenance et à destination du Canada.15 Oettl et Agrawal (IRC-2006) étudient l'impact de la mobilité de main-d'œuvre hautement qualifiée sur l'historique des flux de connaissances entre les entreprises et au-delà des frontières nationales. Selon leur étude, les pays d'origine et les pays d'accueil retirent des avantages sociaux quand les inventeurs (les scientifiques et les ingénieurs) déménagent. Les auteurs examinent les flux du savoir des scientifiques en se basant sur les citations de brevet de divers endroits, de 1980 à 2000, et ils font état de deux types d'externalités du savoir. Ils ont constaté que les pays d'accueil obtiennent des avantages supplémentaires (outre les avantages dont profite l'entreprise qui a fait l'embauche), ce qu'ils appellent « l'apprentissage national par l'immigration ». À l'opposé, ils observent l'existence de « l'apprentissage de l'entreprise grâce à la diaspora », qui désigne les avantages que retire l'entreprise d'origine en raison du nouveau savoir reçu de la nouvelle entreprise et du pays d'accueil de l'inventeur.

Les grappes du savoir

Si les avantages nets découlant de l'acceptation d'un plus grand nombre de travailleurs qualifiés de l'étranger sont attribuables à leur contribution aux grappes du savoir en plein essor, alors la « masse critique » est quelque chose d'important. Il y aurait peut-être lieu de réévaluer les politiques qui favorisent la dispersion des immigrants spécialisés sur tout le territoire. Par exemple, il importe de savoir où les immigrants choisissent de s'établir au Canada. Tout le monde sait que les immigrants sont fortement concentrés dans les trois plus grands centres urbains du Canada. Toutefois, Hall (IRC-2006) nous apprend aussi que les travailleurs immigrants de la haute technologie se trouvent plus souvent dans les plus grandes villes comparativement à l'ensemble des emplois de la haute technologie. De plus, comme les travailleurs qualifiés préfèrent les endroits qui offrent une bonne qualité de vie et des services locaux adéquats, comme le révèlent plusieurs études de l'IRC basées sur des entrevues, cela implique que des grappes du savoir pourraient voir le jour à ces endroits. Au lieu d'essayer de répartir géographiquement les immigrants spécialisés, il serait peut-être efficace de recourir à une politique favorisant la création d'enclaves dotées d'une haute qualité de vie pour attirer et garder les travailleurs spécialisés.

Même s'il importe pour ces travailleurs du savoir d'être près les uns des autres sur le plan géographique, il importe aussi qu'ils entretiennent des liens avec d'autres grappes du savoir à travers le monde. Dans toute la mesure du possible, les gouvernements devraient faciliter l'échange de savoir entre les spécialistes et les entreprises à l'étranger tout en favorisant la création d'enclaves de haute technologie au Canada. Comme l'avancent Oettl et Agrawal dans leur étude, il peut être productif pour un pays d'accueil de faciliter le maintien des relations entre les immigrants spécialisés et leurs collègues ainsi que les entreprises à travers le monde, y compris dans leur pays d'origine, et pour un pays d'origine de maintenir des liens avec ses citoyens expatriés. En effet, outre les flux mesurables de brevets et de citations qu'ont étudiés Oettl et Agrawal, nous notons que divers autres flux générateurs de productivité sont susceptibles de se produire par ces voies, notamment la diffusion de nouvelles pratiques commerciales, les innovations aux procédés et même des éléments liés à la culture d'entreprise. Étant donné que la plupart des produits de connaissances (p. ex. la formule d'un médicament, une chanson à succès, une pratique commerciale permettant d'accroître l'efficacité) peuvent être reproduits à un coût marginal pratiquement nul, la possibilité de servir un grand marché plutôt qu'un petit peut augmenter le taux de réussite et les bénéfices de l'entreprise presque sans aucun coût additionnel. De plus, en raison de la nature même des produits de connaissances, la réussite de leur production nécessite une bonne compréhension des besoins des clients. Afin de réussir sur au niveau international il est primordial que les fabricants de ces biens au Canada comprennent la culture de leurs plus grands marchés, y compris celui des États-Unis. L'augmentation plutôt que la réduction du contact des Canadiens avec la culture des États-Unis et des autres pays contribuera aussi au succès des exportations des grappes du savoir canadiennes. (Voir Kuhn et McAusland (2005) pour un exposé récent sur cette notion de la « prime à la culture »).

La mobilité du travail et les stratégies en matière de main-d'œuvre qualifiée

Si, à cause du système d'éducation des pays d'origine des immigrants, les compétences applicables au contexte canadien sont plus faibles (comme l'avancent Coulombe et Tremblay, IRC-2006, selon les résultats des tests mesurant les capacités de lecture et d'écriture), alors la solution simple serait de choisir ceux dont les qualifications se rapprochent le plus des normes canadiennes. Comment y arriver est la question. Pour réussir à recruter des immigrants dont les compétences sont pertinentes pour le marché canadien, certains auteurs dont DeVoretz (IRC-2006), McHale (IRC-2006) et Helliwell (IRC-2006) préconisent de modifier l'orientation du programme des immigrants spécialisés de manière à recruter et à garder ici les étudiants étrangers dont les qualités, lors de l'obtention de leur diplôme, peuvent être évaluées assez facilement par les entreprises canadiennes. Selon McHale (IRC-2006), les avantages découlant du recrutement d'étudiants étrangers sont la génération de revenu et, plus important encore, la meilleure production de connaissances dans les établissements d'enseignement postsecondaire canadiens. Si les systèmes d'immigration et d'éducation touchant les étudiants étrangers sont conçus avec soin, il peut être possible de s'assurer que les avantages excèdent les coûts. L'auteur propose un système d'allocations à deux volets doté d'une structure de stimulants pour maximiser les avantages nets pour les Canadiens. Malheureusement, McHale (IRC-2006) et Ellis (2006) montrent aussi que le Canada accuse un retard sur ses concurrents tels que l'Australie et le Royaume-Uni en ce qui touche le nombre de ces étudiants.

La mobilité complète du capital humain ne se limite pas aux échanges bilatéraux, car elle englobe aussi la migration continue vers un autre pays, ainsi que la migration de retour. DeVoretz (IRC-2006) et Finnie (IRC-2006a) ont observé des flux importants de migration de retour. Le premier parle d'un mouvement triangulaire plus répandu de capital humain et de la nouvelle circulation du Canada par rapport à Hong Kong, alors que le deuxième examine la migration de retour des Canadiens qui ont déjà travaillé ailleurs dans le monde. Qu'est-ce qui motive ces personnes à retourner au Canada? Fait surprenant, les données laissent supposer que les Canadiens qui retournent, surtout ceux qui gagnaient un revenu élevé avant leur départ, n'obtiennent au Canada que peu d'avantages sur le plan des gains liés à leur expérience à l'étranger (Finnie, IRC-2006b). On peut croire alors que les avantages non financiers jouent peut-être un rôle dans leur retour, comme ce qu'ont révélé diverses études de cas. Par contre, il pourrait s'agir d'antisélection puisque ceux qui n'ont pas obtenu de bons résultats à l'étranger ont tendance à revenir au pays.

À partir d'une vue d'ensemble de l'allocation générale des ressources, le recrutement de travailleurs hautement qualifiés de l'étranger est l'une des trois stratégies d'action en matière de main-d'œuvre qualifiée étudiées par Helliwell (IRC-2006). L'auteur souligne que l'immigration de travailleurs hautement qualifiés n'est pas un moyen de compensation sans coûts de la diminution du flux de travailleurs qualifiés nés au Canada qui entrent sur le marché du travail. Il place les questions de l'éducation et de la formation ainsi que du commerce dans les services et de l'impartition dans un contexte général afin de trouver stratégie de création de compétences la plus rentable pour le Canada. Helliwell avance que l'évaluation des politiques et de leurs effets devrait être basée sur leurs conséquences pour le « bien-être », lequel inclut non seulement les mesures économiques conventionnelles telles que le revenu par habitant et la productivité, mais aussi les facteurs non économiques tels que la confiance de la collectivité, l'engagement social et la satisfaction en milieu de travail. Les implications en matière d'orientation des politiques au Canada est que le « partage » (les échanges internationaux de biens et de services incorporant de la main-d'œuvre qualifiée) deviendra un moyen plus rentable pour le Canada que l'« achat » (le recrutement et l'intégration des immigrants), alors que la « création » d'une main-d'œuvre qualifiée (par l'éducation et la formation) sera une option stratégique importante faisant appel au capital humain du pays et au capital humain importé.

Enfin, il faut avoir un aperçu à long terme des avantages et des coûts des immigrants. Même si les immigrants de première génération sont plus susceptibles d'avoir de la difficulté à s'intégrer à leur nouveau marché du travail, l'expérience de leurs enfants n'est pas nécessairement la même. Selon Aydemir, Chen et Corak (2005), les immigrants de deuxième génération dont les parents sont arrivés avant 1980 n'ont pas de difficulté à intégrer le marché du travail canadien. De plus, ils gagnent généralement plus que les Canadiens moyens dont les parents sont nés au Canada. Reste à voir comment se fera l'intégration à long terme des enfants des plus récentes cohortes d'immigrants, puisque les cohortes de deuxième génération étaient issues de parents qui s'étaient intégrés rapidement. Cela ne se produira peut-être pas pour les enfants des récentes cohortes si les facteurs à l'origine du succès de la deuxième génération incluent le succès de la première génération. Si ces facteurs ont une assise plus générale, par exemple un bon système d'éducation, alors la deuxième génération pourrait quand même bien s'en tirer.

Compte tenu des avantages nets pouvant découler du transfert de la main-d'œuvre qualifiée entre les pays, la perspective stratégique envisagée ici vise à faciliter la mobilité des travailleurs hautement qualifiés et à faire en sorte que les employeurs canadiens puissent faire venir aisément au pays le capital humain dont ils ont besoin. Pour une économie du savoir, il est important d'attirer et de retenir des travailleurs hautement qualifiés afin de bénéficier des externalités découlant de leur emploi. La prochaine section porte sur les messages stratégiques soulevés par les résultats des études et les conclusions qui ont été tirées à partir de ces résultats.

 

7. Messages stratégiques et conclusions

Le présent rapport a tout d'abord fait un rappel des trois domaines de recherche de l'IRC sous le thème de la mobilité internationale des travailleurs hautement qualifiés : 1) mieux évaluer les tendances mondiales dans ce domaine et la position du Canada relativement à ces tendances; 2) mieux comprendre les facteurs fondamentaux à l'origine de l'accroissement de la mobilité de la main-d'œuvre hautement qualifiée, surtout parmi les économies avancées; 3) mieux comprendre les coûts et les avantages de cette mobilité.

Les « faits stylisés » qui ressortent des études de l'IRC et d'autres études sur ces sujets sont les suivants :

  • Les flux mondiaux de main-d'œuvre hautement qualifiée ont augmenté, et les travailleurs hautement qualifiés se déplacent déjà assez facilement entre de nombreux pays.
  • De plus en plus, ces flux représentent des déplacements temporaires plutôt qu'une migration uniquement permanente.
  • Le Canada ne réussit pas aussi bien que les autres économies avancées à attirer des travailleurs hautement qualifiés. Les lourdeurs administratives et les obstacles fiscaux sont peut-être des freins importants.
  • Ces tendances en faveur d'une plus grande mobilité de la main-d'œuvre hautement qualifiée font partie de la mondialisation généralisée de l'économie et sont étroitement liées aux flux de capitaux dans le monde et à la délocalisation de la production.
  • Il y a moins d'obstacles à l'immigration légale pour les travailleurs spécialisés que pour les travailleurs non spécialisés.
  • Les travailleurs hautement qualifiés sont attirés vers les endroits qui offrent les meilleurs salaires pour leurs compétences (mais il n'est pas évident qu'une grande dispersion des salaires soit un facteur d'attraction).
  • D'autres facteurs, notamment les débouchés professionnels, la qualité de vie, les « distances » sociales et culturelles ainsi que les obstacles administratifs, ont aussi une forte influence sur les décisions de déplacement des travailleurs hautement qualifiés.
  • Le niveau de scolarité est fréquemment utilisé pour mesurer le niveau de compétences relativement à la mobilité internationale, parce qu'il s'agit souvent de la seule mesure qui existe. La qualité des systèmes d'éducation varie énormément d'un pays à l'autre, de sorte que le niveau de scolarité est susceptible de mener à une surestimation de la qualité des compétences des travailleurs de pays où le système d'éducation est de faible qualité, habituellement les pays pauvres. Or, pour savoir si le Canada subit une « fuite des cerveaux », il ne suffit pas simplement de compter le nombre de Canadiens qui quittent le pays et le nombre d'immigrants possédant un niveau élevé de scolarité qui y entrent.
  • Comparativement à d'autres pays, le Canada réussit assez bien à attirer des immigrants permanents qui ont fait des études postsecondaires, mais une proportion relativement faible d'entre eux possèdent un doctorat. Malgré leur niveau de scolarité élevé, les immigrants récemment arrivés n'obtiennent pas de bons résultats économiques. Cela s'explique, en partie, par le fait qu'ils n'ont pas toutes les compétences requises dans l'économie canadienne, par exemple leurs capacités de lecture et d'écriture en français ou en anglais sont insuffisantes.
  • Pour les pays d'accueil, les principaux avantages d'une main-d'œuvre qualifiée mobile à l'échelle internationale découlent des externalités de production de cette main-d'œuvre, notamment une capacité accrue de former des grappes du savoir et un plus grand accès aux idées et aux technologies de pointe grâce à la participation à des réseaux.

Si l'on accepte ces « faits stylisés », quelles sont les conséquences pour l'élaboration des politiques? Quelles sont les autres incidences des constatations plus détaillées des recherches?

  1. On ne peut pas traiter la stratégie canadienne concernant les questions liées à la mobilité internationale de la main-d'œuvre hautement qualifiée sans tenir compte de la stratégie canadienne pour l'intégration de l'économie à l'échelle nord-américaine et à l'échelle mondiale. Par exemple, si l'IDE est étroitement lié aux mouvements internationaux de main-d'œuvre hautement qualifiée, les restrictions imposées à ces investissements peuvent restreindre la capacité du Canada de tirer profit de ces mouvements.
  2. La concurrence pour une main-d'œuvre hautement qualifiée sur les marchés mondiaux est susceptible de s'intensifier, en raison de la mondialisation continue, de la croissance économique rapide de l'Inde, de la Chine et d'autres pays moins développés et de la concurrence accrue pour cette main-d'œuvre parmi les économies avancées dont la population vieillit. Il est certes valable de mettre en œuvre des politiques qui facilitent l'entrée au Canada de travailleurs hautement qualifiés et qui facilitent les choses pour les employeurs souhaitant faire entrer ces travailleurs au Canada. Toutefois, dans un contexte de vive concurrence internationale, si l'attrait du Canada n'est pas assez fort auprès des travailleurs les hautement qualifiés, ces derniers iront ailleurs.
  3. Il faut que les politiques portant sur l'immigration de travailleurs spécialisés ne se limitent pas à l'idée que l'immigration de travailleurs spécialisés est principalement un moyen (parmi d'autres) d'atténuer les pénuries de main-d'œuvre spécialisée qui existent déjà. Au contraire, l'une des plus importantes leçons que nous pouvons tirer de la « nouvelle théorie de croissance », du fait de la présence des effets d'agglomération et d'externalités est que l'arrivée de nouveaux travailleurs qualifiés crée une demande additionnelle de compétences de façon qui augmente la productivité de l'ensemble des travailleurs. Ainsi, plutôt que de simplement « remplir le vide », en comblant les pénuries de main-d'œuvre spécialisée, la politique d'immigration du Canada devrait faire preuve de plus de perspective et de créativité et penser à la création de grappes du savoir localisées qui permettent à l'ensemble des travailleurs d'être plus productifs, ce qui contribue à l'attraction davantage de travailleurs spécialisés et à l'augmentation du taux de croissance économique. Étant donné l'importance des grappes, les politiques visant à disperser les immigrants spécialisés pourraient être improductives.
  4. Si le Canada souhaite accroître le niveau de compétences de sa population active en faisant appel à l'immigration économique, il lui faudra mettre en place de meilleurs moyens de recrutement et de sélection des immigrants spécialisés. L'immigration économique comporte des coûts pour le Canada ainsi que des avantages éventuels au chapitre des compétences spécialisées. Il faut comparer les coûts et les avantages d'investir des fonds publics dans le recrutement, la formation et l'intégration des immigrants aux coûts et aux avantages d'investir plus de fonds publics dans l'acquisition et le perfectionnement des compétences des Canadiens nés au pays.
  5. Il se peut que les mouvements temporaires de la main-d'œuvre qualifiée deviennent la forme de mobilité type de la main-d'œuvre qualifiée au niveau international, remplaçant ainsi la migration à long terme. Cela signifie qu'il faudrait réorienter les politiques pour les axer davantage vers des mécanismes d'entrée temporaire afin de bénéficier d'une mobilité internationale de plus en plus grande de la main-d'œuvre hautement qualifiée.

Quelles questions stratégiques découlent de ces « faits stylisés » et de leurs répercussions?

  • La politique d'immigration visant à pourvoir l'économie canadienne d'une main-d'œuvre spécialisée devrait-elle être orientée de manière à favoriser davantage les entrées temporaires, compte tenu du caractère de plus en plus temporaire des mouvements migratoires des travailleurs hautement qualifiés?
  • Le Canada devrait-il recourir à la politique sur les entrées temporaires pour chercher à créer des grappes d'innovation? Jumeler l'élimination des restrictions relatives à l'IDE aux politiques destinées à faciliter l'entrée temporaire d'employés des entreprises étrangères?
  • Le Canada devrait-il chercher à étendre la portée des dispositions relatives à la mobilité des travailleurs hautement qualifiés dans le cadre de ses négociations commerciales? Si c'est la bonne solution, que peut-on faire pour réduire les obstacles à l'entrée temporaire liés à l'administration, aux lois fiscales, à l'assurance sociale et à la reconnaissance des titres?
  • Faut-il modifier la politique de sélection des immigrants spécialisés, étant donné les résultats obtenus, soit des immigrants ayant un niveau de scolarité plus élevé que la moyenne canadienne mais un niveau de littératie inférieur? Si oui, dans quelle direction?
    • Vers un système où l'entrée temporaire pourrait servir de tremplin à l'obtention de la résidence permanente pour un immigrant spécialisé?
    • Vers un système de vérification préalable des compétences linguistiques et des titres professionnels, comme celui qui existe en Australie?
    • Vers une politique qui encourage les étudiants étrangers à étudier dans des universités ou des collèges canadiens pour ensuite leur offrir un accès préférentiel à la résidence permanente une fois qu'ils ont reçu leur diplôme?
  • Les politiques destinées à diriger ou à attirer les immigrants vers des régions autres que les centres urbains habituels auraient-elles tendance à diminuer la contribution économique des immigrants hautement qualifiés?
  • Quelle serait la meilleure façon de répartir les investissements publics destinés à accroître le niveau de compétences de la population active canadienne entre le recrutement et l'intégration des immigrants et l'investissement dans l'acquisition et le perfectionnement des compétences des Canadiens?
  • La plus grande mobilité internationale implique une concurrence accrue pour les Canadiens hautement qualifiés qui ont profité de subventions importantes durant leurs années d'études. Est-ce que cela signifie que nous devrions nous orienter vers un système, où les étudiants au niveau postsecondaire et leur famille devraient assumer une plus grande part des coûts associés à leurs études puisque d'autres pays pourraient bénéficier des avantages des externalités et des impôts sur les revenus plus élevés qui découlent de cette scolarité?
  • Quel est l'équilibre approprié entre les politiques destinées à accroître l'offre de main-d'œuvre spécialisée (telles que les politiques d'immigration traitées aux points précédents) et les politiques destinées à accroître la demande de main-d'œuvre qualifiée grâce à une augmentation des activités novatrices des entreprises canadiennes et à une hausse des investissements directs des sociétés étrangères très novatrices?

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1.Il se peut que les chiffres surestiment le taux de départ des immigrants, ce qui s'explique par le fait que, dans l'analyse des auteurs, la définition d'« absence » du pays comprend les immigrants qui n'ont pas rempli de déclarations de revenu pendant certaines périodes.

2.Le visa H-1B est un permis de travail temporaire accordé à des étrangers de certaines professions, notamment les informaticiens, les médecins, les ingénieurs et les enseignants. Le plafond annuel pour l'exercice 2005 a été fixé à 65 000 demandes. Un professionnel canadien ou américain peut faire une demande à la frontière pour obtenir un permis spécial prévu à l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), appelé visa TN-ALENA, lequel peut être renouvelé indéfiniment. Voir Hart (IRC-2004) pour un long exposé sur la portée de l'ALENA sur les marchés du travail au Canada et aux États-Unis.

3.Selon la base de données de l'OCDE sur les travailleurs immigrants et les travailleurs expatriés (2005), 80 % des expatriés hautement qualifiés canadiens dans des pays de l'OCDE, soit environ 343 000 personnes, vivaient aux États-Unis en 2000-2001. À l'inverse, le Canada arrive au premier rang des pays d'accueil des émigrants américains ayant fait des études de troisième cycle, ce qui représente plus de 124 000 expatriés américains, soit environ 30 % de tous les expatriés américains hautement qualifiés dans les pays de l'OCDE.

4.D'après Finnie (IRC-2006a), chaque année de 1982 à 2003, entre 0,04 % et 0,15 % de la population adulte du Canada a quitté le pays, et les taux de départ ont diminué abruptement après le pic atteint en 2000. Par contre, 15 % de ceux qui avaient quitté sont revenus dans les cinq ans après leur départ, et les taux de retour ont considérablement augmenté depuis 2000.

5.Voir un exposé approfondi sur l'exode des cerveaux canadiens à l'ère de la mondialisation dans un livre récent de Harris, Easton et Schmitt (2006).

6.Card (2003) note que, parmi les hommes habitant aux États-Unis, les personnes qui détiennent un diplôme d'études supérieures sont largement surreprésentées (8 %) par rapport à leur pourcentage dans la population canadienne née au Canada. Les données des recensements canadiens montrent une surreprésentation semblable concernant les détenteurs de diplômes d'études supérieures chez les hommes américains vivant au Canada. Cela prouve bien que les personnes les plus hautement qualifiées sont aussi celles qui sont les plus disposées à aller travailler ailleurs dans le monde. Le déficit migratoire net avec les États-Unis signifie que le résultat net du Canada est qu'il perd des diplômés d'études supérieures aux mains des États-Unis, puisque la composition des flux migratoires selon la scolarité du Canada vers les États-Unis et des États-Unis vers le Canada est semblable.

7.Pour ce genre de postes, il faut détenir un baccalauréat ou une maîtrise en sciences.

8.Il faut émettre une mise en garde concernant la plupart des études fondées sur des entrevues parce qu'elles sont axées sur un échantillon précis — ceux qui ont choisi de venir au Canada et qui y sont restés (au moins jusqu'au moment de l'entrevue). On ne peut pas savoir, à partir de ce genre d'études, quels facteurs ont pu décourager les immigrants potentiels de venir au Canada.

9.Dans un ouvrage récent (2005), Kapur et McHale traitent en profondeur des préoccupations concernant la concurrence que se livrent les pays riches pour attirer des travailleurs qualifiés de l'étranger et des effets négatifs de l'exode des cerveaux sur les pays moins développés.

10.Le taux combiné d'impôt fédéral et provincial sur le revenu des particuliers à revenu élevé au Canada est de 50 %, soit 10 % de plus que le taux fédéral correspondant aux États-Unis (Saez et Veall, 2005). Toutefois, les auteurs ont constaté que, lorsqu'ils tiennent compte de l'impôt des États, il y a peu de différence entre les taux d'imposition marginaux des tranches supérieures de revenu au Canada et dans les grands États des États-Unis. Les plus grands écarts ont été notés dans les groupes de revenu élevé sous la tranche de revenu supérieure. L'impôt global sur les gains personnels dépend aussi d'autres formes d'impôts et de subventions (avantages sociaux) telles que les charges sociales, les taxes de vente et d'accise, l'assurance-emploi et l'indemnisation, pour n'en nommer que quelques-uns. Si l'on tient compte de tous les impôts et subventions applicables, le taux d'imposition effectif varie beaucoup même au sein d'un même pays. En moyenne, Mintz (2001) montre que le taux d'imposition effectif de la main-d'œuvre canadienne en 2000 était d'environ 59 %, soit 16 % de plus que le taux aux États-Unis.

11.Gera et autres (IRC-2004) ont examiné la documentation qui existe sur les coûts et bénéfices de la mobilité des travailleurs hautement qualifiés entre les pays, et ils ont cerné diverses voies donnant lieu aux coûts et bénéfices.

12.Ce type d'effets externes positifs est habituellement plus important que les simples gains du commerce découlant de l'apport d'un facteur de production qui complète la dotation en facteurs d'un pays (Borjas, 1994). Cela est particulièrement le cas lorsque les externalités touchent le taux de croissance d'un pays.

13.Cela s'avère pour tout travailleur hautement qualifié supplémentaire, quelle que soit sa provenance. Voir, par exemple, Moretti (2004), concernant les externalités liées à la production découlant de l'éducation, qui s'appliquent aussi à d'autres formes de développement du capital humain.

14.Ceci est proposé dans la littérature sur la nouvelle théorie de croissance, p. ex., Rivera-Batiz et Romer (1991).

15.Même si l'effet qu'ils estiment n'est pas une externalité en soi, Ottaviano et Peri (2005) soutiennent que les immigrants génèrent un effet positif important sur les salaires moyens des travailleurs nés aux États-Unis en supposant que la substitution est imparfaite entre les compétences des immigrants et celles des autochtones. Cette constatation est très différente de celle de Borjas (2003), qui juge que l'augmentation de l'immigration fait baisser les salaires des travailleurs américains moins instruits, en particulier, et de tous les travailleurs nés aux États-Unis, en général.