Allen W. MacLeod, Donald A. MacLeod et D. & A. MacLeod Company Ltd. – 1er décembre 2008

Décision sur la conduite professionnelle

Qu'est-ce qu'une décision sur la conduite professionnelle?

Le BSF ouvre une enquête sur la conduite professionnelle d'un syndic autorisé en insolvabilité (SAI) lorsqu'il dispose d'information laissant croire que le SAI n'a pas rempli adéquatement ses fonctions, n'a pas administré un dossier comme il se doit ou n'a pas respecté la Loi sur la faillite et l'insolvabilité (LFI).

Dans certains cas, les conclusions de l'enquête sont suffisamment graves pour donner lieu à une recommandation de sanction visant la licence d'un SAI [annulation ou suspension de la licence en vertu du paragraphe 13.2(5)] ou imposition de conditions ou de restrictions en vertu du paragraphe 14.01(1) de la LFI.

La décision sur la conduite professionnelle est assimilée à celle d'un office fédéral et peut faire l'objet d'un examen judiciaire par la Cour fédérale.

DANS L'AFFAIRE DE LA LOI SUR LA FAILLITE ET L'INSOLVABILITÉ
L.R.C. 1985, ch. B-3

DANS L'AFFAIRE DU surintendant des faillites

ET DANS L'AFFAIRE des allégations d'inconduite professionnelle contre Allen W. MacLeod, Donald A. MacLeod et D. & A. MacLeod Company Limited

INSTANCE PRÉSIDÉE PAR L'HONORABLE JAMES B. CHADWICK, c.r.

Comparutions :
Me Julie Martin et Alden Christian pour les syndics
Me Gary Wetzel et Mark Taggart pour le surintendant des faillites


Décision

Sursis des procédures

[1] Les syndics requérants ont présenté une requête en sursis de l'instance instituée contre eux. Dans leur requête, qui devait être présentée au début de l'instance, les syndics invoquent divers motifs à l'appui de leur demande de sursis. Ces motifs peuvent être résumés de la façon suivante :

(a) retard;

(b) divulgation de l'enquête au public;

(c) inclusion d'actifs dans les allégations alors que le surintendant des faillites et la Cour avaient approuvé les actions prises par les requérants;

(d) retards, partialité et manque d'équité dans tous les rapports avec les syndics;

(e) retard dans la transmission des lettres de commentaires;

(f) le surintendant des faillites a interdit aux syndics d'étendre leurs activités au Québec et permis à Peter Markham d'ouvrir un bureau alors qu'il faisait l'objet d'une enquête;

(g) destruction des documents et dossiers de Claude Leduc, un employé à la retraite, contrairement à la politique gouvernementale;

(h) commentaires malencontreux par Jean-Louis Boucher;

(i) nomination de Richard Hunter comme surintendant adjoint désigné;

(j) préjudice causé par le bureau du surintendant des faillites.

[2] Pour appuyer leur requête, les requérants ont déposé un affidavit d'Allen W. MacLeod établissant les faits à l'appui de leur position.

[3] L'intimé, le surintendant des faillites, a déposé une réponse ainsi que l'affidavit de Mme Laperrière.

[4] Bien qu'aucun des déclarants n'ait été contre-interrogé sur son affidavit avant l'audience, ils ont tous les deux témoigné à l'audience.

[5] Avant l'audience, j'ai avisé les avocats que je prendrais la requête en délibéré jusqu'à ce que toute la preuve ait été entendue.

[6] Les avocats des syndics ont cité un certain nombre de décisions à l'appui de leur position :

Blencoe c. Colombie-Britannique (Human Rights Commission), [2000] 2 R.C.S. 307

The Superintendent of Bankruptcy v. Pricewaterhouse Coopers Inc. and Robert Brouchu and Serge Morency and Serge Morency & Associates Inc.

Stefani v. The College of Dental Surgeons of BC, 1996 CanLII 877 (C.S. C.-B.) p. 18

The Association of Professional Engineers and Geoscientists of the Province of British Columbia v. Brown (non publié ) (C.S. C.-B.)

Gage v. Ontario, (1992) (C.S. de l'Ont) (C. Div.) 90 D.L.R. (4th) 537

R. c. Regan, [2002] 1 R.C.S. 297

Canada (Procureur général) c. Todd Y. Sheriff et Segal and Partners Inc., (2007) (C.A.F.) Can LII 2007 CAF 90.

[7] Les avocats de l'intimé, le BSF, ont également déposé un certain nombre de décisions, de dispositions législatives et de documents à l'appui de leur position.

Jurisprudence

Blencoe v. British Columbia (Human Rights Commission), 2000 CarswellBC 1860 (Cour suprême du Canada)

Friedman & Friedman Inc. v. Canada (Superintendent of Bankruptcy) 2001 CarswellNat 3180 (Cour fédérale du Canada – Section de première instance)

Groupe G. Tremblay Syndics Inc. v. Canada (Superindentent of Bankruptcy) 1997 CarswellNat 771 (Cour fédérale du Canada – Section de première instance)

Krop v. College of Physicians & Surgeons (Ontario) 2002 CarswellOnt 271 (Cour divisionnaire de l'Ontario)

Roy v. Poitras 2006 CarswellNat 5957 (Cour fédérale)

Sam Lévy & Associés Inc. v. Mayrand 2005 CarswellNat 4657 (Cour fédérale)

Sheriff v. Canada (Attorney General) 2007 CarswellNat 515 (Cour d'appel fédérale)

Stinchcombe v. Law Society (Alberta) 2002 CarswellAlta 539 (Cour d'appel de l'Alberta)

Lois, règlements (c'est-à-dire, les règles), instructions, politiques et programmes

Loi sur la faillite et l'insolvabilité, L.R.C., 1985, ch. B.3, par. 5(2) et al. 5(3)e)

Loi sur la faillite et l'insolvabilité, L.R.C., 1985, ch. B.3, s.-al. 14.01(1) a), b) et c)

Loi sur la faillite et l'insolvabilité, L.R.C., 1985, ch. B.3, par. 14.02(2)

Loi sur la faillite et l'insolvabilité, L.R.C., 1985, ch. B.3, par. 41(8) et (8.1)

Politique sur la publicité des affaires de conduite professionnelle ()

Programme no 1 — Programmes du surintendant des faillites en vigueur le 1er avril 1994 (II. — Taxation des comptes du syndic dans les administrations sommaires)

Note de service du surintendant – Conduite professionnelle et publicité des décisions ()

Je conclue que l'arrêt le plus utile est celui que la Cour suprême du Canada a rendu dans Blencoe c. Colombie-Britannique (Human Rights Commission) 2000 CSC 44,190 D.L.R. (4th) 513.

[8] Dans cette affaire, le requérant, qui occupait une charge publique, faisait l'objet de plaintes de harcèlement sexuel. Les plaintes avaient, en fin de compte, été renvoyées à un tribunal des droits de la personne pour qu'il tienne une audience. Le requérant avait déposé une demande de contrôle judiciaire en vue d'obtenir l'arrêt des procédures au motif que le délai de 33 mois qui s'était écoulé avant la tenue d'une audience violait l'art. 7 de la Charte.

[9] S'exprimant au nom de la Cour, le juge Bastarache avait conclu qu'il n'y avait pas eu violation de l'art. 7 de la Charte. Le tribunal avait alors examiné la question de savoir si le requérant avait droit à une réparation conformément aux principes de droit administratif. Aux paragraphes 101 et 102, le juge déclare ce qui suit :

101. Selon moi, le droit administratif offre des réparations appropriées en ce qui concerne le délai imputable à l'État dans des procédures en matière de droits de la personne. Cependant, le délai ne justifie pas, à lui seul, un arrêt des procédures comme l'abus de procédure en common law. Mettre fin aux procédures simplement en raison du délai écoulé reviendrait à imposer une prescription d'origine judiciaire (voir : R. c. L. (W.K.), [1991] 1 R.C.S. 1091, à la p.1100; Akthar c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1991] 3 C.F. 32 (C.A.). En droit administratif, il faut prouver qu'un délai inacceptable a causé un préjudice important.

102. Il n'y a aucun doute que les principes de justice naturelle et l'obligation d'agir équitablement s'appliquent à toutes les procédures administratives. Lorsqu'un délai compromet la capacité d'une partie de répondre à la plainte portée contre elle, notamment parce que ses souvenirs se sont estompés, parce que des témoins essentiels sont décédés ou ne sont pas disponibles ou parce que des éléments de preuve ont été perdus, le délai dans les procédures administratives peut être invoqué pour contester la validité de ces procédures et pour justifier réparation (D. J. M. Brown et J. M. Evans, Judicial Review of Administrative Action in Canada (feuilles mobiles), à la p. 9-67; W. Wade et C. Forsyth, Administrative Law (7e éd. 1994), aux pp. 435 et 436). Il est donc reconnu que les principes de justice naturelle et l'obligation d'agir équitablement comprennent le droit à une audience équitable et qu'il est possible de remédier au délai injustifié dans des procédures administratives qui compromettent l'équité de l'audience (voir, par exemple, J. M. Evans, H. N. Janisch et D. J. Mullan, Administrative Law : Cases, Text, and Materials (4e éd. 1995), à la p. 256; Wade et Forsyth, op. cit., aux pp. 435 et 436; Nisbett, précité, à la p. 756; Lignes aériennes Canadien, précité; Ford Motor Co. of Canada c. Ontario (Human Rights Commission) (1995), 24 C.H.R.R. D/464 (C. div. Ont.); Freedman c. College of Physicians & Surgeons (New Brunswick) (1996), 41 Admin. L.R. (2d) 196 (B.R.N.-B.)).

[10] Plus loin, aux paragraphes 105 et 106, il ajoute :

105. Il est bien établi en droit que les instances décisionnelles publiques ont toutes l'obligation générale d'agir équitablement (Martineau c. Comité de discipline de l'Institution de Matsqui, [1980] 1 R.C.S. 602, à la p. 628). Les procédures en matière de droits de la personne, dont il est question en l'espèce, doivent s'être déroulées d'une manière tout à fait conforme aux principes de justice naturelle et d'équité procédurale. Les propos suivants du juge Dickson dans l'arrêt Martineau, à la p.631, illustrent peut être le mieux le sens traditionnel de l'obligation d'agir équitablement en droit administratif :

En conclusion, la simple question à laquelle il faut répondre est celle ci : compte tenu des faits de ce cas particulier, le tribunal a t il agi équitablement à l'égard de la personne qui se prétend lésée? Il me semble que c'est la question sous jacente à laquelle les cours ont tenté de répondre dans toutes les affaires concernant la justice naturelle et l'équité.

106. Dans la jurisprudence qui existe en la matière, on trouve des expressions comme « justice naturelle », « équité procédurale », « abus de procédure » et « abus de pouvoir discrétionnaire ». Dans l'arrêt Martineau, à la p. 629, le juge Dickson (s'exprimant au nom de trois juges, alors que les neuf juges souscrivaient tous au résultat) a dit que « tracer une distinction entre une obligation d'agir équitablement et celle d'agir selon les règles de justice naturelle conduit à un cadre conceptuel de maniement difficile ». En ce qui concerne ces expressions, je suis d'avis de souscrire aux propos suivants du juge Sherstobitoff de la Cour d'appel de la Saskatchewan, dans Misra c. College of Physicians & Surgeons of Saskatchewan (1988), 52 D.L.R. (4th) 477, à la p. 490 :

[TRADUCTION]

Il existe deux dénominateurs communs à chacune des expressions. Le premier est l'impossibilité de les définir avec exactitude en raison de leur portée et de la vaste gamme de circonstances susceptibles de les mettre en jeu. Le deuxième est le chevauchement manifeste des notions d'« équité » et de « franc jeu ». Un délai déraisonnable pourrait justifier d'invoquer l'une ou l'autre.

[11] Il ne fait aucun doute que les présentes procédures auraient pu se dérouler beaucoup plus rapidement. En ce qui a trait à la production de documents, le BSF semblait désorganisé. Bien qu'ils aient produit six cahiers à anneaux pleins de documents à l'appui de leurs allégations, il s'agissait de documents choisis.

[12] Les syndics voulaient savoir à quels autres documents ils auraient pu avoir accès. Cette demande semble raisonnable étant donné la période de temps couverte par les allégations. Par conséquent, les procédures ont été retardées.

[13] Les syndics ont aussi demandé qu'on leur fournisse un sommaire des dépositions de tous les témoins potentiels. D'après le BSF, cette demande était inhabituelle, mais, d'après moi, elle ne l'était pas. Les avocats du BSF s'étant engagé à ce que les témoins limitent leur témoignage à ce qui était contenu dans les allégations, les avocats des syndics ont retiré leur demande. Cela avait eu pour effet de retarder l'audience.

[14] Le BSF a décidé de procéder à un examen des livres et des registres des syndics et il a fait part de son intention aux syndics en octobre 2007. Les syndics étaient à mi-chemin de leur préparation pour la présente audience et ils ont demandé que cet examen des livres et des registres des syndics soit reporté jusqu'après l'audience. Le BSF a refusé. J'ai, par conséquent, ajourné l'audience prévue pour que les syndics aient suffisamment de temps pour se préparer.

[15] En plus du retard, les syndics s'appuient aussi sur les autres allégations que j'ai résumées ci-dessus.

[16] Je suis conscient qu'il s'agit en l'espèce d'une audience administrative conformément à une loi fédérale, et non d'un procès criminel.

[17] Je suis convaincu que les points que les syndics ont soulevés dans leur requête en sursis pourront être tranchés lors de l'examen des allégations au fond. Par conséquent, je rejette la requête en sursis.

Demande de sursis en ce qui concerne Donald MacLeod

[18] Au début de l'audience, Me Martin a demandé au BSF, au nom du syndic Donald MacLeod, d'envisager la possibilité de surseoir aux allégations déposées contre Donald MacLeod en raison de son mauvais état de santé.

[19] Lorsque Me Martin a formulé cette demande, M. MacLeod, âgé de 89 ans, était hospitalisé et suivait des traitements contre le cancer. Les avocats du BSF ont refusé de surseoir aux allégations déposées contre M. MacLeod.

[20] Lors de la clôture de la preuve le 10 octobre, particulièrement après avoir entendu le témoignage d'Allen MacLeod en ce qui avait trait à l'état de santé de son père, Donald MacLeod, j'ai demandé au BSF de reconsidérer la position qu'il avait adoptée à l'égard de Donald MacLeod. Le 12 octobre, le BSF a accepté de surseoir aux allégations déposées contre M. MacLeod. Donald MacLeod est décédé le .

Allégations

[21] Mme Laperrière énonce les allégations contre les syndics dans son rapport de 118 pages. Sous chaque rubrique, elle fournit des détails à l'appui de l'allégation. Les documents à l'appui des allégations sont contenus dans les 6 cahiers à anneaux qui ont été déposés. Les allégations sont formulées de la façon suivante :

Contraventions alléguées

  1. Soldes bancaires de dossiers d'actif et d'insolvabilité déposés dans un compte appelé « Intérêt ».
  2. Demandes de libération du syndic alors qu'il y avait un solde bancaire dans le compte de l'actif.
  3. Surplus provenant du compte en fiducie consolidé des administrations sommaires déposé dans le compte « Intérêt ».
  4. Argent retiré à diverses fins d'un compte « Intérêt ».
  5. États des recettes et des débours.
  6. Retrait non autorisé d'honoraires dans une proposition de consommateur.
  7. « Compte provisoire » utilisé pour reporter des transactions relatives à l'actif.
  8. Mélange de fonds dans les comptes en fiducie consolidés.

    a) Administrations sommaires converties en actifs ordinaires dans le compte en fiducie consolidé des administrations sommaires.

    b) Propositions de la section 1 administrées dans le compte en fiducie consolidé des propositions de consommateurs.

  9. Débours réclamés pour des services rendus par une personne liée.
  10. Utilisation du « compte des dépôts de tierces parties » pour reporter des transactions relatives à l'actif.
  11. Fonds non déposés sans délai.
  12. Retard dans l'administration d'actifs.

    a) Actif de Mary Elizabeth Ann Ruda déposé le .

    b) Actif de 595880 Ontario Limited déposé le .

[22] On n'allègue pas et on ne prétend pas que les syndics ont détourné des fonds.

Nature des infractions visées dans la Loi sur la faillite et l'insolvabilité et dans les règlements :

[23] Le paragraphe 14.01 (1) de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité prévoit ce qui suit :

14.01 (1) [Décision relative à la licence]

Après avoir tenu ou fait tenir une enquête sur la conduite du syndic, le surintendant peut prendre l'une ou plusieurs des mesures énumérées ci-après, soit lorsque le syndic ne remplit pas adéquatement ses fonctions ou a été reconnu coupable de mauvaise administration de l'actif, soit lorsqu'il n'a pas observé la présente loi, les Règles générales, les instructions du surintendant ou toute autre règle de droit relative à la bonne administration de l'actif, soit lorsqu'il est dans l'intérêt public de le faire…

[24] Au nom du BSF, Me Wetzel défend la position selon laquelle les questions de diligence et d'intention sont pertinentes au stade de l'imposition des sanctions et non au stade de la détermination de la responsabilité où il s'agit uniquement de se demander si la Loi/Règles/Instructions ont été observées. À l'appui de sa position, Me Wetzel cite la décision rendue dans CTC Crown Technologies Corp. A.S.C.S. 1940. Il s'agit d'une décision de la Commission des valeurs mobilières de l'Alberta concernant une personne qui avait déposé un prospectus auprès de la Commission et dans lequel elle n'avait pas divulgué tous les faits importants. De plus, dans une notice d'offre déposée auprès de la Commission, la personne avait fait une fausse déclaration sur un fait important. À la page 6 de sa décision, la Commission fait les observations suivantes :

[TRADUCTION]

(i) la diligence raisonnable peut-elle constituer une défense dans ce type d'instance?

S'il s'agissait en l'occurrence de la poursuite d'une infraction présumée visée dans la Loi, alors la diligence raisonnable pourrait être une défense complète. Il en est ainsi parce que les infractions visées dans la Loi sont des infractions de responsabilité stricte suivant les catégories d'infractions que la Cour suprême du Canada a décrites dans R. c. Sault Ste. Marie (1978), 85 D.L.R. (3d) 161. Le juge Dickson décrit les catégories d'infractions de la façon suivant aux pp. 181 et 182 :

Les infractions dans lesquelles il n'est pas nécessaire que la poursuite prouve l'existence de la mens rea; l'accomplissement de l'acte comporte une présomption d'infraction, laissant à l'accusé la possibilité d'écarter sa responsabilité en prouvant qu'il a pris toutes les précautions nécessaires. Ceci comporte l'examen de ce qu'une personne raisonnable aurait fait dans les circonstances. La défense serait recevable si l'accusé avait des motifs raisonnables de croire à un état de fait inexistant qui, s'il avait existé, aurait rendu l'acte ou l'omission innocent, ou si l'accusé a pris toutes les précautions raisonnables pour éviter l'événement en question. Ces infractions peuvent être à juste titre appelées des infractions de responsabilité stricte.

Les présentes procédures n'étant pas une poursuite d'une infraction présumée conformément à la Loi, les intimés ne peuvent invoquer la défense de diligence raisonnable (Gordon Capital Corporation v. Ontario Securities Commission (1991), 14 OSCB 2713). Les présentes procédures sont des procédures réglementaires, et les sanctions que nous imposons visent à protéger le public. Cela diffère des procédures quasi pénales telles qu'une poursuite intentée conformément à la Loi et des conséquences pénales qui peuvent découler d'une telle poursuite. Alors, même si les intimés étaient en mesure d'établir qu'ils ont fait preuve d'une diligence raisonnable suffisante pour constituer une défense face à une poursuite conformément à la Loi, cela n'empêcherait pas nécessairement la Commission d'exercer ses pouvoirs réglementaires et discrétionnaires d'imposer des sanctions aux intimés.

Bien que la diligence raisonnable ne soit pas une défense dans ce type de procédures, elle représente un des facteurs pertinents dont la Commission peut, à juste titre, tenir compte quand elle détermine les sanctions qui s'imposent. Même si les actions des intimés sont en deçà d'une diligence raisonnable, elles peuvent toujours être pertinentes quand vient le temps de déterminer les sanctions qui s'imposent.

[25] Au nom des syndics, Me Martin adopte la position selon laquelle ces décisions concernent la conduite professionnelle et que les infractions sont des infractions de responsabilité stricte. Elle cite deux décisions à l'appui de sa position : Stuart v. College of Teachers (British Columbia) (2005) 254 D.L.R. (4th) et Ghilzon v. Royal College of Dental Surgeons (Ontario) (1979) 22 O.R. (2d) 756 (C. div.)

[26] Dans Ghilzon, l'appelant avait fait appel d'une décision du Collège royal des chirurgiens dentistes de l'Ontario. Le Collège avait pris des mesures disciplinaires contre l'appelant parce qu'il avait permis à une personne qui n'était pas titulaire d'un permis d'exercer l'art dentaire. Le Collège avait conclu à la culpabilité de l'appelant et avait également tiré des conclusions quant à la crédibilité. En appel, le juge Henry, de la Cour divisionnaire, s'exprimant au nom de la Cour, avait cité la décision rendue dans Regina c. Sault Ste. Marie. Il avait examiné les trois catégories d'infractions, soit celles pour lesquelles il fallait prouver l'existence de la mens rea; celles pour lesquelles il n'était pas nécessaire de prouver l'existence de la mens rea, mais seulement l'accomplissement de l'acte prohibé, laissant à l'accusé la possibilité d'écarter sa responsabilité en prouvant qu'il a pris toutes les précautions nécessaires. Et troisièmement, les infractions de responsabilité absolue, où il n'est pas loisible à l'accusé de se disculper en démontrant qu'il n'a pas commis de faute.

[27] La Cour a conclu que l'infraction dont il était question en l'espèce s'inscrivait dans la deuxième catégorie. Bien que l'appelant ait offert une explication, le comité de déontologie ne l'avait pas acceptée. De même, la Cour avait conclu que l'appelant n'avait pas réussi à démontrer qu'il avait pris les précautions raisonnables pour éviter la perpétration de l'infraction dans les circonstances.

[28] J'estime que les allégations d'inconduite conformément à la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, aux règlements et aux instructions sont des infractions de responsabilité stricte. L'intimé a la possibilité de prouver qu'il a pris toutes les mesures raisonnables dans les circonstances. Je n'accepte pas l'argument selon lequel l'intimé doit attendre au stade de l'audience où l'on impose les sanctions pour fournir des explications.

[29] Conformément à la Loi sur la faillite et l'insolvabilité (la « LFI »), le Bureau du surintendant des faillites (le « BSF ») a la responsabilité et le pouvoir de délivrer des licences de syndic de faillite, de superviser leurs activités et de prendre des mesures disciplinaires à leur égard. Diverses mesures disciplinaires, notamment le retrait de la licence du syndic, peuvent être appliquées. Le BSF se trouve dans la situation plutôt particulière d'avoir à exercer toutes ces fonctions.

[30] Les syndics à qui le BSF délivre une licence ont le devoir et la responsabilité d'exécuter leurs fonctions conformément aux dispositions de la LFI, des règlements pris en vertu de la LFI et des instructions que le BSF publie de temps à autre.

[31] Le surintendant des faillites peut déléguer son pouvoir d'enquêter à quelqu'un d'autre conformément aux dispositions des articles 14.01 et 14.02 de la LFI.

[32] Lorsqu'il a terminé l'enquête, le délégué rédige un rapport à l'intention du surintendant, et si, dans son rapport, le délégué allègue qu'il y a eu inconduite de la part du syndic, alors le délégué recommande également des sanctions. Une copie du rapport est par la suite signifiée au syndic, et ce dernier a droit à une audience conformément aux dispositions des paragraphes 14.02(1) et 14.02(2) de la LFI. Le surintendant peut tenir une audience lui-même ou déléguer cette responsabilité à quelqu'un d'autre.

Preuve et conclusions

[33] Sylvia Laperrière était analyste principale dans le bureau du surintendant des faillites. Le , le surintendant des faillites lui a demandé d'enquêter sur le bureau des syndics. Pour se préparer pour son enquête, elle avait examiné les rapports de suivi et de vérification antérieurs que ses collègues avaient préparés.

[34] Elle a également rencontré diverses personnes au bureau du surintendant des faillites et elle a effectué des interviews. Elle a conservé très peu de notes, s'il en est, de ses interviews à l'interne.

[35] Le premier rapport de suivi sur lequel Mme Laperrière s'est appuyée est un rapport préparé par Barry Schur. Ce rapport était le fruit de sa visite aux bureaux des syndics entre les et . Au cours de cette période, il avait examiné 10 dossiers d'actif. Neuf dossiers ouverts et un dossier fermé. Son examen lui avait permis de relever huit irrégularités.

[36] L'irrégularité la plus grave avait trait à l'utilisation d'un compte en fiducie appelé « Intérêt ». Les fonds dans le compte représentaient les intérêts accumulés sur un grand nombre d'actifs qui n'avaient pas été distribués.

[37] M. Schur avait recommandé que des mesures correctrices soient prises, et, entre autres, que le compte « Intérêt » soit fermé et que les fonds soient remis au BSF. Il n'avait pas recommandé de mesure ou de procédure disciplinaire.

[38] Le rapport suivant qu'elle a examiné est celui de Jean Louis Boucher. Le rapport de M. Boucher est daté du . Il avait visité les bureaux des syndics entre les et (sic).

[39] M. Boucher a examiné les procédures bancaires du syndic, notamment les comptes bancaires consolidés, celui des administrations sommaires, celui des propositions de consommateurs et celui des dépôts de tierces parties.

[40] Il a noté les irrégularités concernant les comptes bancaires et l'administration du bureau. Il a recommandé des mesures correctrices, mais pas de procédures disciplinaires.

[41] Ni M. Schur ni M. Boucher n'ont témoigné à l'audience.

[42] Richard Hunter a effectué une vérification du bureau des syndics en juin 2003. Il a rédigé un rapport contenant un certain nombre de recommandations. Après que le surintendant l'eut mandaté pour effectuer une enquête, Mme Laperrière a demandé à M. Hunter de se présenter de nouveau au bureau des syndics, d'effectuer une autre vérification spéciale de leur bureau et de mettre à jour son rapport de juin 2003. M. Hunter a visité le bureau des syndics entre les 6 et 22 juin. À l'audience, M. Hunter a témoigné qu'il avait dû faire non seulement le suivi de son rapport de 2003, mais également, comme on le lui avait demandé, examiner l'actif de 595880 Ontario Inc. et l'actif d'un certain Michael Browne. J'examinerai son rapport de façon plus détaillée.

[43] Mme Laperrière a passé à travers son rapport de 25 pages et de 115 paragraphes concernant les allégations d'inconduite déposées contre les syndics. Elle a, de plus, fait référence aux six volumes de documents qui ont été déposés à l'appui de son rapport.

[44] Comme l'interrogatoire principal de Mme Laperrière reflétait son rapport, je n'examinerai pas tout son interrogatoire principal. Toutefois, je vais examiner chaque allégation énoncée dans son rapport, qui, à première vue, semblait très complet. Par contre, au cours du contre-interrogatoire de Me Christian, j'ai constaté que le rapport avait été rédigé pour appuyer les allégations et qu'il manquait d'impartialité et d'objectivité.

[45] Me Christian a posé une série de questions à Mme Laperrière sur les principes qui doivent être suivis lors de la tenue d'une enquête impartiale. Voici les questions de Me Christian et les réponses de Mme Laperrière :

[TRADUCTION]

Q. Mme Laperrière, étant donné votre expérience en la matière, seriez-vous alors d'accord avec moi pour dire que, durant une enquête, il est très important de garder les principes suivants à l'esprit? Pour commencer, que vous devez faire preuve de neutralité et d'impartialité en ce qui concerne le résultat?

A. Oui.

Q. Que vous devez faire preuve d'objectivité et éviter d'exprimer des opinions personnelles?

A. Oui.

Q. Que vous ou l'enquêteur devez agir à titre de collecteurs de faits, et non de décideurs?

A. Oui.

Q. Que vous devez faire preuve d'un haut degré de professionnalisme?

A. Oui.

Q. Que vous devez adhérer aux règles et aux lignes de conduite pour que l'audience soit équitable, équilibrée et menée avec un esprit ouvert?

A. Oui.

Q. Que vous devez maintenir la confidentialité en tout temps le mieux que vous le pouvez dans le contexte de l'enquête?

A. Oui.

Q. Et, principe fondamental, seriez-vous d'accord avec moi pour dire que vous devez recueillir la preuve qui existe, que cette preuve condamne ou exonère?

A. Oui.

Me Christians-[ a également demandé à Mme Laperrière s'il était juste de regrouper une série de 10 actifs de 1997 jusqu'à maintenant et que ces actifs servent de fondement à des mesures disciplinaires. Mme Laperrière a répondu ce qui suit :

[TRADUCTION]

C'est une infraction. Ce n'est pas une question de justice. C'est ce qui s'est passé dans ces actifs. Ils n'étaient pas – quand ils ont été convertis, le syndic n'a pas respecté l'instruction.

[46] Mme Laperrière n'a non seulement pas conservé de notes des interviews, elle n'a pas non plus conservé de liste des documents et des dossiers qu'elle a examinés. Cela avait passablement empêché les avocats des syndics de présenter une défense adéquate aux allégations.

[47] Je suis convaincu que les années d'enquête de Mme Laperrière et son rapport subséquent manquent d'objectivité et d'impartialité et que son témoignage et son rapport doivent, en tant que tels, être évalués et examinés très soigneusement.

[48] La preuve démontre également que tout le monde dans le bureau du BSF n'était pas d'accord avec les mesures disciplinaires prises.

[49] Heureusement, M. Richard Hunter, un ex-agent de la GRC, a pris des notes sur certaines conversations. Une des conversations au sujet de laquelle M. Hunter a pris des notes est une conversation téléphonique du avec Michelle sic Leduc. Les notes de M. Richard Hunter sont rédigées de la façon suivante :

[TRADUCTION]

Date :

7 h 45 Michel Leduc m'a dit que, à la suite de la téléconférence qu'il avait eue avec Sylvie et le SAD du bureau d'Ottawa, il avait été convenu de suspendre l'enquête disciplinaire sur les allégations dans le rapport de vérification pour les raisons suivantes :

  • Jean Louis Boucher n'avait pas été cohérent durant la téléconférence, et il s'était éloigné du sujet initial en ce qui concerne les actions du syndic.
  • Il ne reconnaissait pas la gravité de ce qui avait été fait au rapport de vérification, et il avait ajouté que tout semblait être réglé.
  • Le BSF devrait se concentrer sur le projet IAPO et les rapports visés à l'article 170.
  • Jean-Louis ne voulait pas demander d'enquête disciplinaire puisqu'il l'avait déjà fait.
  • En ce qui a trait au compte « Intérêt » et le montant d'environ 33 000 $, le « S » avait remboursé environ 19 000 $, et la différence avait fait l'objet d'une entente.
  • Quoi qu'il en soit, la différence était constituée de remboursements d'impôt, elle était justifiée en partie et elle avait tout de même fait l'objet d'une entente.

Michel m'a dit que lui et Sylvie Laperrière estimaient que Jean-Louis n'était pas un témoin crédible dans le présent cas, étant donné la position qu'il avait adoptée sur le contenu du rapport de vérification, et qu'il ne sera jamais en mesure de témoigner adéquatement. De plus, étant donné la décision rendue dans Metivier et al., Sylvie veillera évidemment à ce que tous les processus établis soient suivis et, si Jean Louis ne demande pas d'enquête disciplinaire, elle ne prendra pas l'initiative d'en commencer une.

J'ai exprimé haut et fort mon désaccord avec cette décision. J'ai reconnu que, si ceux qui doivent rendre des comptes, comme Raymond Villemure, Patricia Alferez et Jean Louis Boucher, refusent d'assumer la responsabilité, il ne revenait pas à Sylvie de le faire à leur place.

En ce qui a trait à la position de Jean Louis relativement au rapport de vérification, j'ai mentionné à Michel que Jean Louis m'avait déjà dit qu'il estimait que le rapport ne contenait rien de nouveau et qu'il était au courant de tout cela. J'ai ajouté : s'il était au courant, pourquoi n'a-t-il rien fait? De plus, la semaine dernière, nous avons eu une courte conversation à propos de MacLeod et du montant de 33 000 $. J'ai informé Jean Louis de ma réunion avec Michel Leduc concernant ce cas. Rita Lamontagne a également assisté à cette réunion. Je lui ai parlé de l'enquête effectuée sur le montant d'environ 14 000 $, la différence entre le montant de 33 000 $ et celui de 19 000 $ qui avait été remboursé, pour savoir s'il avait conclu une entente relativement à ce montant, et il a dit non. Il m'a également dit que le solde du compte était la seule chose qui avait fait l'objet d'une discussion.

Alors, je ne comprends pas la position que Jean Louis adopte relativement au rapport de vérification, ce qu'il dit maintenant ni le fait que tout cela ait été fait sans discussion préalable.

J'ai tenté de joindre Sylvie Laperrière et j'ai laissé un message dans sa boîte vocale. Elle m'a alors laissé un message m'informant qu'elle avait reçu l'information sur le cas Brown, et que les incidents étaient très graves. Elle voulait en discuter et a suggéré que nous prenions un peu de temps à St-Sauveur pour faire cela.

RH

[50] On a demandé à Mme Laperrière si elle se rappelait cette conversation. Elle a répondu : [TRADUCTION] « Je me souviens de cette conversation, mais pas entièrement, je ne sais pas ».

A. Soldes bancaires de dossiers d'actif et d'insolvabilité déposés dans un compte appelé « intérêt »

[51] Dans son rapport de suivi daté du , Barry Schur fait référence à l'utilisation du compte « Intérêt ». Dans ses commentaires, il recommande que ce compte soit fermé.

[52] Le compte avait été initialement ouvert en 1998 pour maximiser les dividendes versés aux créanciers dans les dossiers d'administration sommaire. Le syndic avait l'obligation de préparer un état des recettes et des débours (l'« ERD »), et, à l'époque, la banque gelait l'intérêt dans l'actif. En utilisant le compte « Intérêt», les syndics pouvaient faire en sorte que les intérêts continuent de s'accumuler et que tous les créanciers en profitent.

[53] Lors de la préparation de l'ERD, on calculait le montant d'intérêts qui s'accumulerait jusqu'à ce que le dossier soit fermé et que les dividendes soient payés. Le montant d'intérêts courus estimé était ajouté à l'intérêt effectivement gagné au début de la préparation de ERD.

[54] Comme l'intérêt était parfois trop élevé ou pas assez élevé, on se servait du compte « Intérêt » pour rajuster l'intérêt dans l'actif.

[55] Après qu'on eut recommandé que le compte soit fermé, les syndics avaient écrit à Claude Leduc, le surintendant adjoint désigné au bureau du surintendant des faillites. Dans cette lettre, les syndics mentionnaient, entre autres, ce qui suit :

[TRADUCTION]

…Les vérificateurs déclarent que nous ne devrions pas inclure l'intérêt estimé dans les comptes d'administration sommaire, que le compte « Intérêt » devrait être fermé et que les fonds dans ce compte devraient être transmis au surintendant des faillites à titre d'actifs non distribués. Nous avons longuement discuté de cette question avec le vérificateur et, bien qu'il ait été d'accord avec certains de nos arguments, il a indiqué que vous deviez prendre la décision. Nous aimerions discuter de cette question avec vous plus en détail.

[56] Selon le témoignage d'Allen MacLeod, que j'accepte, il a fixé un rendez-vous avec M. Leduc pour discuter de la question. Il l'a rencontré le , comme en fait foi une mention dans le journal de M. Allen MacLeod. Il n'y a pas eu de confirmation par la suite, mais, selon Allen MacLeod, M. Leduc les avait autorisés à conserver le compte « Intérêt ».

[57] À l'audience, Claude Leduc a témoigné que tout ce qu'il pouvait dire était qu'il ne se souvenait pas de la réunion. Il ne pouvait pas nier qu'une telle rencontre avait eu lieu. Il a dit, toutefois, qu'il ne pensait pas qu'il aurait autorisé que le compte « Intérêt » soit conservé.

[58] M. Leduc a pris sa retraite il y a un certain nombre d'années, et malheureusement, tous ses dossiers et documents ont été détruis ou perdus. Par conséquent, il n'avait aucune façon de se rafraîchir la mémoire ou de vérifier ou contredire le témoignage d'Allen MacLeod. Par conséquent, j'accepte le témoignage d'Allen MacLeod et conclus qu'ils ont été autorisés à conserver le compte « Intérêt » jusqu'à ce que Jean-Louis Boucher, alors analyste principal auprès du BSF, les avise, en mars 2003, de fermer le compte et de transmettre tous les montants au surintendant des faillites.

[59] Bien qu'il y ait lieu de se demander si les syndics ont transmis tous les montants, j'accepte l'explication fournie par Allen MacLeod selon laquelle toute différence était le fruit de rajustements effectués dans les actifs.

[60] Le , Jean-Louis Boucher a écrit à Donald MacLeod pour confirmer qu'ils avaient reçu les montants et qu'un solde de 1 126 $ était dû pour fermer le compte. M. Boucher concluait sa lettre en disant :

[TRADUCTION]

Cela devrait mettre fin à nos préoccupations concernant l'accumulation de fonds non distribués dans le compte appelé « Intérêt ».

[61] Pour ces motifs, je conclus qu'il n'y a eu aucune incorrection ou inconduite de la part des syndics dans l'utilisation du compte « Intérêt ».

B. Demandes de libération du syndic alors qu'il y avait un solde bancaire dans le compte de l'actif

[62] On allègue que des montants ont été retirés de certains dossiers d'actifs et d'insolvabilité et déposés dans le compte « Intérêt » après la date de l'ordonnance de libération du syndic. Cela contrevient aux dispositions de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité  et des Règles qui prescrivent que les fonds non distribués doivent être transmis au surintendant avant que le syndic ne demande une ordonnance de libération.

[63] On allègue de plus qu'il y a eu des retraits totalisant 1 160,54 $ dans trois actifs dont Allen W. MacLeod était responsable. Ce montant avait été déposé dans le compte « Intérêt » après la libération du syndic.

[64] Dans deux autres actifs dont Allen W. MacLeod était responsable, des montants ont été remis au BSF à titre d'actifs non distribués, mais seulement après la libération du syndic.

[65] Dans son témoignage, Allen MacLeod, admet qu'il y avait des soldes décrits ci-dessus dans les actifs lorsque les syndics ont présenté une demande de libération. Mais cela était le fruit d'une erreur administrative. Aucun créancier n'a subi de préjudice puisqu'ils ont tous reçu les dividendes au complet.

[66] En ce qui concerne les deux autres actifs, le montant en litige est 74,58 $ dans un cas et 24,74 $ dans l'autre. Encore une fois, cela était le fruit d'une erreur administrative, et les fonds avaient été envoyés au surintendant des faillites. Il est intéressant de souligner l'âge des actifs auxquels il est fait référence dans la présente section. Il y a cinq actifs de six à douze ans au cours d'une période de cinq ans. Même Mme Laperrière était d'accord pour dire qu'ils étaient [TRADUCTION] « un peu vieux ».

[67] Dans son témoignage, M. MacLeod a parlé du nombre d'actifs que son bureau avait administrés. Les syndics ont déposé en preuve un document détaillé qui démontre qu'ils ont administré 2 177 actifs pour lesquels ils ont effectué 89 268 transactions totalisant 21 595 694,41 $. Lorsqu'on examine le volume de transactions et d'actifs, les allégations contre MacLeod semblent avoir été prises hors contexte. C'est comme si le BSF avait été à la recherche de quelque irrégularité, si petite soit-elle, pour appuyer ses allégations d'inconduite.

[68] J'accepte le témoignage de M. MacLeod selon lequel les irrégularités susmentionnées étaient le fruit d'erreurs administratives, aucun actif ou créancier n'a subi de préjudice et les syndics n'ont tiré aucun avantage des irrégularités. Techniquement parlant, il se peut qu'il y ait eu violation de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité et des Règles. Toutefois, ces violations étaient certainement involontaires.

C. Surplus provenant du compte en fiducie consolidé des administrations sommaires déposé dans le compte « intérêt »

[69] Selon les informations contenues dans le rapport de vérification de 2003, des fonds déposés dans le compte « intérêt » incluaient un surplus de 2 381,20 $. Ce montant avait été viré du compte en fiducie consolidé des administrations sommaires au compte « Intérêt» en décembre 1999. Le virement de 2 381,20 $ visait à combler la différence que l'on avait remarquée en effectuant la conciliation bancaire en novembre 1999. Aucun chèque et aucun relevé bancaire n'a été produit à l'appui de cette allégation.

[70] En réponse à cette allégation, les syndics ont fait référence au logiciel, appelé ISS, qu'ils utilisaient et avec lequel ils éprouvaient beaucoup de problèmes. De fait, les syndics ont fait témoigner M. Rick Sack, qui a expliqué les problèmes associés à ce logiciel. Les syndics en l'espèce n'étaient pas les seuls à éprouver des difficultés avec ce logiciel, tous les syndics en avaient. Pour corriger les problèmes, on pouvait, par exemple, passer des écritures de journal, et c'est ce qui avait été fait dans ce cas. Une écriture de journal avait été faite pour virer le surplus du compte en fiducie consolidé des administrations sommaires au compte « Intérêt ».

[71] M. Hunter avait décrit cette pratique dans son rapport du et il avait recommandé que les syndics s'abstiennent de passer des écritures de journal pour concilier les livres et les soldes bancaires. Après que M. Hunter eut fait cette recommandation, les syndics n'ont plus passé d'écritures de journal et ils ont tenu pour acquis que la question était réglée.

[72] Comme M. Hunter a été le premier à attirer l'attention sur cette méthode de comptabilité et que les syndics ont par la suite cessé de l'employer, je conclus par conséquent qu'il n'y a pas eu inconduite de la part des syndics.

D. Argent retiré à diverses fins d'un compte « intérêt »

[73] Les allégations formulées sous cette section du rapport font référence au rapport de vérification de 2003 dans lequel on avait attiré l'attention sur des retraits du compte en fiducie appelé « Intérêt » ». Ce compte contenait de l'argent provenant de divers actifs. Puisqu'au paragraphe A j'ai conclu que les syndics avaient été autorisés à maintenir le compte « Intérêt » pour une période déterminée et qu'ils l'avaient fermé lorsqu'on leur en avait demandé de le faire, je conclus, puisque les syndics ont suivi les instructions qu'ils avaient reçues, qu'il n'y a pas inconduite de la part des syndics.

[74] Des allégations particulières concernant les questions énoncées sous la présente rubrique sont formulées dans les paragraphes 42 à 50 du rapport de Mme Laperrière. 

[TRADUCTION]

42. Selon le rapport de vérification de 2003 et l'enquête, dans l'actif de Harold Thomas Graham McKay et la proposition de la section 1 de Peter Alan Kent Fallis, le syndic n'a pas transmis un état des recettes et des débours (« ERD ») complet et exact en ne déclarant pas le montant total d'intérêt que le syndic avait reçu. De plus, dans l'actif de Stephanie Marion Smith, dont Allen W. MacLeod était responsable, après avoir transmis ERD définitif, le syndic n'a pas transmis d'ERD additionnel pour déclarer un remboursement de TPS de 398 $ qu'il avait reçu et des paiements à l'avocat de l'actif et à un messager totalisant 259,63 $. De plus, le syndic a retiré le solde de 138,37 $ sans la permission requise.

43. Dans la proposition de consommateur de David Andrew Henry Clarke, dont Donald A. MacLeod était responsable, selon ERD daté du , le débiteur aurait payé 25,325 $ alors que, selon la balance de vérification détaillée de l'actif, il n'avait payé que 24 475 $. La différence de 850 $ provenait du montant de 832,75 $ transféré du compte « Intérêt » et des intérêts additionnels payés à l'actif. De plus, selon ERD, l'intérêt accumulé s'élevait à 194,51 $ tandis que selon la balance de vérification détaillée l'intérêt effectivement accumulé en date du s'élevait à 212,49 $.

44. Enfin, le syndic semble avoir calculé ses honoraires en se basant sur le montant total erroné et le montant d'intérêt erroné. Les honoraires retirés s'élèvent à 2 426,98 $ plutôt qu'à 2 196,03 $, le montant que le syndic aurait pu réclamer sur le 24 475 $ effectivement payé par le débiteur et sur les intérêts de 212,49 $ effectivement gagnés. De plus, selon ERD, le syndic a retiré des honoraires de 2 237,63 $. Or ce montant ne correspond ni au calcul exact des honoraires ni au montant d'honoraires effectivement retirés. L'administrateur Donald A. MacLeod savait ou aurait dû raisonnablement savoir que ERD transmis dans cette proposition de consommateur était erroné.

45. Dans la mise sous séquestre de Sarah Clothes Ltd., dans laquelle D. & A. MacLeod Ltd. agissait à titre de séquestre, ERD définitif a été transmis en décembre 1995. Après cette date, il y a eu des recettes et des débours additionnels totalisant respectivement 3 309,68 $ et 472,92 $. Toutefois, aucun rapport ou état de compte final n'a jamais été transmis.

46. Le ou vers le , dans la faillite de Harold Thomas Graham McKay, le syndic Allen W. MacLeod a transmis un état définitif des recettes et des débours qui ne contenait pas un relevé complet du montant d'intérêt reçu par le syndic et qui indiquait que les intérêts gagnés s'élevaient à 11 213,89 $ plutôt qu'à 12 477,88 $, contrevenant ainsi à l'article 13.5 et au paragraphe 152(1) de la Loi et aux Règles 36 et 39.

47. Le ou vers le , dans la proposition de la section 1 de Peter Alan Kent Fallis, le syndic Allen W. MacLeod a signé un état définitif des recettes et des débours qui ne contenait pas un relevé complet du montant d'intérêt reçu par le syndic et qui indiquait que les intérêts gagnés s'élevaient à 416,31 $ plutôt qu'à 729,42 $, contrevenant ainsi à l'article 13.5 et au paragraphe 152(1) de la Loi et aux Règles 36 et 39.

48. Dans la faillite de Stephanie Marion Smith, le syndic Allen W. MacLeod n'a pas transmis d'état des recettes et des débours amendé ou supplémentaire pour déclarer un remboursement de TPS de 398 $ reçu par le syndic, un paiement de 250 $ à l'avocat de l'actif et un paiement de 9,63 $ à un messager. Le , soit après la transmission de l'état définitif des recettes et des débours, le syndic a également retiré le solde de 138,37 $ sans la permission requise, contrevenant ainsi à l'article 13.5, aux paragraphes 25(1.3) et 152(1) de la Loi et aux Règles 36 et 39.

49. Le ou vers le , dans la proposition de consommateur de David Andrew Henry Clarke, Donald A. MacLeod a signé un état des recettes et des débours démontrant que le débiteur avait payé le montant de 25 325 $ alors qu'il n'avait effectivement payé que 24 475 $, que des intérêts au montant de 194,51 $ avaient été gagnés alors que le montant d'intérêts effectivement gagné se chiffrait à 212,49 $ et indiquant que les débours et les honoraires du syndic s'élevaient à 2 237,63 $ alors que les honoraires effectivement retirés s'élevaient à 2 426,98 $ et auraient dû se chiffrer à 2 196,03 $. En signant un document qui ne contenait pas un relevé complet et exact de tout l'argent reçu et de toute la rémunération demandée, ce que l'administrateur savait ou aurait dû savoir était faux, il a contrevenu à l'article 13.5 et au paragraphe 152(1) de la Loi et aux Règles 36 et 39 et 45.

50. D. & A. MacLeod Company Ltd., agissant à titre de séquestre dans la mise sous séquestre de Sarah Clothes Ltd., n'a pas transmis de rapport ni de relevé de compte définitifs pour déclarer les recettes additionnelles reçues et les débours additionnels effectués après la transmission du relevé définitif des recettes et des débours en décembre 1995, contrevenant ainsi au paragraphe 246(3) de la Loi. »

[75] M. MacLeod a expliqué que les allégations 46 et 47 étaient des erreurs commises par son personnel et qu'il en prend l'entière responsabilité. L'allégation 48 a trait aux honoraires juridiques versés à l'avocat. Lorsqu'il a signé ERD, il pensait qu'ils étaient exacts et légitimes. Les syndics n'ont par tiré avantage de ces erreurs administratives. J'accepte l'explication de M. MacLeod et conclus qu'il n'y a pas eu inconduite de la part des syndics. Si les infractions visées à la Loi sur la faillite et l'insolvabilité sont des infractions de responsabilité absolue, alors aucune défense n'est, bien entendu, recevable à l'encontre des allégations. Une simple faute ou erreur de comptabilité ne saurait constituer une défense adéquate par rapport à ces allégations. Comme je l'ai indiqué auparavant, j'ai de la difficulté à qualifier ces infractions, d'infractions de responsabilité absolue. Cela placerait les syndics dans une très unique position au-dessus de tous les autres professionnels qui ne sont qu'humains et qui commettent des erreurs. Je suis convaincu qu'aucun professionnel n'est en mesure de prétende qu'il n'a jamais commis d'erreur au cours de sa carrière. Comme je l'ai mentionné, les syndics n'ont pas profité financièrement de ces erreurs. Ils ont peut-être utilisé certaines techniques de comptabilité créative pour rajuster les actifs, mais il semble également qu'aucun créancier ou débiteur n'ait subi de préjudice.

F. Retrait non autorisé d'honoraires dans une proposition de consommateur

[76] Dans le présent cas, le syndic a calculé ses honoraires en se basant sur le montant inexact dans l'actif. Le montant inexact était le fruit d'un chèque sans provision de 850 $ qui avait été retourné, ce qui avait eu pour effet de modifier le montant inscrit dans ERD. À titre d'honoraires, le syndic aurait perçu 230,95 $ de plus que prévu au tarif. En défense, les syndics se sont appuyé sur la Règle 129(1)c) des Règles sur la faillite et l'insolvabilité prises en vertu de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité. Cette Règle stipule qu'à titre d'honoraires, un syndic a droit à un pourcentage des sommes distribuées aux créanciers. Les syndics nient avoir retiré des honoraires non autorisés. J'accepte la position que les syndics adoptent à l'égard de cette allégation.

G. Compte provisoire utilisé pour reporter des transactions concernant l'actif

[77] Sous cette rubrique, Mme Laperrière examine un certain nombre d'actifs dans les paragraphes 54 à 60. Les allégations concernant les actifs se détaillent de la façon suivante :

[TRADUCTION]

54. Selon le rapport de vérification de 2003, en novembre 1999, la conciliation bancaire du compte en fiducie consolidé des administrations sommaires (« CBC des administrations sommaires ») avait fait ressortir que le solde en banque excédait de 2 381,20 $ le total inscrit dans le rapport intitulé « Résumé des soldes d'actifs ». Un compte auxiliaire appelé « compte provisoire » a été créé dans le CBC des administrations sommaires, et l'excédent avait été viré dans ce compte en décembre 1999.

55. Le rapport de vérification de 2003 contient des informations additionnelles sur l'utilisation de ce compte auxiliaire que les syndics ont utilisé du mois de décembre 1999 jusqu'au mois de mars 2003. Dans le rapport, on examine les transactions reliées à deux actifs en particulier, celui de Roxanne Lynn St-Jacques et celui de Vivian June Schroeder, qui étaient administrés par Allen W. MacLeod, et à deux autres actifs en particulier, celui de Mildred Colleen Fischer et celui de Andrew Roger Perrin, qui étaient administrés par Donald A. MacLeod.

56. Dans la faillite de Roxanne Lynn St-Jacques, la balance de vérification détaillée de l'actif indique que le syndic a déposé un remboursement de TPS de 152 $ dans le compte de l'actif en juin 1998 et qu'il a transmis ce remboursement à la débitrice en juin 2000 (chèque #28656). Toutefois, selon la balance de vérification détaillée du « compte provisoire », ce chèque avait été annulé en mars 20901 sic et réémis à l'ordre de la débitrice à la même date (chèque #32104). Selon le rapport de vérification de 2003, bien que le chèque ait passé à la banque, le syndic n'a pas été en mesure de fournir le chèque traité. Toutefois, les deux écritures effectuées dans le « compte provisoire » auraient dû être effectuées dans la balance de vérification détaillée de l'actif.

57. Selon le rapport de vérification de 2003, une situation similaire s'est produite dans la faillite de Vivian June Schroeder où le syndic a retourné 3 remboursements de TPS totalisant 232 $ à la débitrice en novembre 2001 (chèque #35008). Dans le compte provisoire, ce chèque a été annulé en octobre 2002 et réémis à la même date, mais à l'ordre du receveur général du Canada. Selon le rapport de vérification de 2003, ce chèque avait également passé à la banque, mais il n'avait pas été possible de le trouver dans le dossier.

58. Dans la faillite de Mildred Colleen Fischer, la balance de vérification détaillée de l'actif indique qu'un montant excédentaire de 278,26 $ dans les paiements que la débitrice avait effectués aux termes de son ordonnance conditionnelle de libération lui avait été remboursé en septembre 1999 (chèque #24017). Ce chèque avait toutefois été annulé en juin 2000, comme le vérificateur l'avait noté sur la balance de vérification détaillée, puis reporté d'abord comme un dépôt dans le « compte provisoire » puis comme un chèque à l'ordre de Mme Fischer et enfin comme un chèque annulé, ce qui laissait un solde de 278,26 $ dans le « compte provisoire ». Dans le présent cas, il semble que le montant de 278,26 $ n'ait jamais été remboursé à Mme Fischer.

59. Dans la faillite d'Andrew Roger Perrin, la balance de vérification détaillée de l'actif indique qu'un remboursement de TPS de 14,14 $ a été transmis au débiteur en juin 2000 (chèque #28087). Toutefois le montant de 14,14 $ apparaît alors dans le « compte provisoire » qui a été utilisé au lieu de la balance de vérification détaillée pour reporter ce chèque qui a été annulé en mars 2001 ainsi qu'un autre chèque (#32102) réémis pour le même montant lequel a également été annulé en mars 2001.

60. Ces procédés comptables par lesquels certaines transactions concernant un actif étaient reportées dans un « compte provisoire » allaient à l'encontre de procédés comptables sains qui requièrent que toutes les transactions concernant un actif soient reportées dans le compte de l'actif en particulier. Le report de telles transactions dans un « compte provisoire » ne respectait pas les exigences de l'Instruction No 5 sur les fonds de l'actif et procédures bancaires selon lesquelles le CBC des administrations sommaires doit être maintenu en bon ordre et le grand livre d'un actif pour le compte en fiducie doit contenir toutes les transactions qui concernent cet actif en particulier. »

[78] Dans son témoignage, Allan MacLeod, explique le fonctionnement du « compte provisoire ». Ce compte, ouvert en décembre 1999 pour corriger les erreurs continuelles du logiciel ISS, était considéré comme un compte temporaire, et visait à corriger les erreurs du ISS et à faire correspondre plus ou moins le solde du compte en fiducie consolidé avec le solde bancaire.

[79] Dans sa contre-preuve, il a décrit le fonctionnement du compte. Le compte servait à :

(1) faire des écritures de correction se rapportant aux erreurs du logiciel ISS;

(2) annuler les chèques périmés et à transmettre le montant de tels chèques périmés au BSF;

(3) payer des montants au nom des débiteurs.

[80] Le montant de la centaine de transactions au total dans le compte a été fermé en octobre 2001. Dans sa contre-preuve, il fait des commentaires sur chacun des actifs auquel il est fait référence dans les allégations. Il a conclu ses commentaires de la façon suivante :

[TRADUCTION]

Aucune somme d'argent du compte provisoire n'a été perdue, aucune somme d'argent du compte provisoire n'a été reçue par les syndics, et le compte a été administré de manière transparente et ordonnée.

H. Mélange de fonds dans les comptes en fiducie consolidés

a) Administrations sommaires converties en actifs ordinaires dans le compte en fiducie consolidé des administrations sommaires.

[81] Conformément aux instructions émises de temps à autre par le BSF, les syndics ont l'obligation de maintenir des comptes bancaires en fiducie distincts pour l'administration des actifs ordinaires. Ils étaient autorisés à maintenir un compte bancaire consolidé pour les administrations sommaires.

[82] De temps en temps, certains des dossiers étaient convertis en actifs ordinaires. Le syndic avait l'obligation d'ouvrir un compte en fiducie distinct pour cet actif. Selon les allégations formulées dans les paragraphes 63 à 69 qui réfèrent à certains actifs en particulier, le syndic n'a pas suivi les instructions et n'a pas ouvert de compte en fiducie distinct.

[83] On a également fait référence à ces actifs dans des rapports préparés par le BSF en 1997, 2001, 2002 et 2003. Les actifs ont été administrés entre 1994 et 2003. Selon les allégations, il semble qu'ils n'aient pas procédé assez rapidement à l'ouverture de nouveaux comptes en fiducie. L'allégation 69 est rédigée de la façon suivante :

[TRADUCTION]

Le syndic Allan W. MacLeod n'a pas coopéré entièrement avec les représentants du surintendant en n'adoptant pas les mesures correctrices requises à la suite du dépôt des rapports de suivi et de vérification concernant l'ouverture d'un compte bancaire distinct immédiatement après la conversion d'une administration sommaire, contrevenant ainsi à l'article 13.5 de la Loi et à la Règle 37.

[84] En réponse à cette allégation, M. MacLeod a déclaré que cela représentait une très petite partie des actifs qu'ils avaient administrés. Par exemple, en 1997, ils administraient 475 actifs ordinaires et 2423 actifs d'administration sommaire. Quand on lui a demandé quel était le pourcentage d'actifs visés dans les allégations par rapport aux administrations sommaires, il a répondu [TRADUCTION] « un centième d'un pour cent. »

[85] Si le syndic est coupable d'inconduite, elle réside dans le fait qu'il n'a pas ouvert assez rapidement de compte en fiducie distinct. Dans sa contre-preuve, M. MacLeod a déclaré ce qui suit :

[TRADUCTION]

Bien que ces comptes n'aient pas été immédiatement convertis par suite d'une erreur administrative, le montant d'intérêts gagnés dans ces actifs avant la conversion a été équivalent, et aucun des actionnaires, y compris les créanciers n'a subi de préjudice.

b) Propositions de la section 1 administrées dans le compte en fiducie consolidé des propositions de consommateurs.

[86] Les allégations formulées sous cette rubrique font référence au rapport de vérification de 2003 et à l'enquête qui ont révélé que certaines propositions de la section 1 étaient administrées dans le compte en fiducie consolidé des propositions de consommateurs. Une telle pratique contrevient au paragraphe 25(1) de la Loi qui requiert que le syndic dépose dans une banque tous les fonds reçus pour le compte de chaque actif dans un compte en fiducie distinct. L'allégation mentionne deux actifs.

[87] Dans sa contre-preuve, le syndic reconnaît qu'il s'agit là d'une erreur administrative commise il y a 9 ou 10 ans. Il souligne que l'ouverture de ces actifs dans le compte bancaire consolidé était une erreur administrative, mais que cette erreur n'a porté aucun préjudice à l'administration de l'actif, n'a pas mis l'administration de l'actif en péril et n'a porté aucun préjudice au compte bancaire consolidé des propositions de consommateurs.

I. Débours réclamés pour des services rendus par une personne liées

[88] Dans l'actif de William John Rowsome, ERD révèle qu'il y a eu un débours de 341,06 $ pour la préparation des déclarations de revenus pour 1997, 1998 et 1999. Selon le rapport de vérification de 2003, la rémunération réclamée par le syndic dans ERD incluait également le temps consacré à la préparation de ces déclarations de revenus. Cela contrevient à la Loi et à l'Instruction sur l'emploi de personnes liées pour effectuer du travail pour le compte de l'actif et frais imputables à l'actif.

[89] À l'audience, M. MacLeod a fourni une explication, mais elle était un tant soit peu confuse. Il est également revenu sur cette question dans sa contre-preuve. Il mentionne qu'une demande de libération avait été présentée, mais que le tribunal avait accordé une libération conditionnelle au failli. Le failli n'avait pas respecté l'ordonnance de libération conditionnelle et n'avait pas effectué les paiements prévus dans l'ordonnance du registraire adjoint des faillites. Le failli n'avait pas non plus produit de déclaration de revenus pour les années d'imposition 1997, 1998 et 1999.

[90] Le syndic avait rencontré le failli et accepté de préparer les déclarations de revenus qui n'avaient pas été produites, et il y avait eu un important remboursement d'impôt. Selon le syndic, la préparation de ces déclarations de revenus ne faisait pas partie de l'administration de l'actif et l'instruction ne s'applique pas.

[91] Je ne suis pas convaincu que la preuve démontre que le montant demandé pour la préparation des déclarations de revenues était un débours inclus dans ERD et que cela contrevenait à la Loi. Sur ce point, je suis prêt à accorder le bénéfice du doute au syndic.

J. Utilisation du « Compte — dépôts de tierces parties » pour reporter des transactions relatives à l'actif

[92] Le rapport de vérification spécial de 2005 mentionnait que le compte des dépôts de tierces parties avait été utilisé pour reporter des transactions relatives à l'actif en contravention de l'Instruction no 5 sur les dépôts et garanties de tierces personnes. Cette instruction prévoit que le compte doit contenir uniquement les fonds reçus par le syndic à titre d'indemnisation. Le rapport contient des détails additionnels sur une transaction immobilière. Le syndic reconnaît qu'il a commis une erreur et que ces fonds auraient dû être reportés dans le compte en fiducie.

[93] Cette allégation concerne les actifs Deady. Le syndic, avait reçu deux paiements totalisant 1 000 $ après avoir rencontré les faillis. Le syndic avait rédigé un reçu sur une note de service interne non numérotée, mais les fonds n'avaient pas été déposés ni reportés sur la balance de vérification détaillée des actifs. Il y avait eu enquête, et le syndic a constaté qu'il avait commis une erreur. Il a assumé l'entière responsabilité de l'erreur et il a déposé les fonds.

L. Retard dans l'administration d'actifs

[94] Lorsque Mme Laperrière a demandé à M. Hunter s'il pouvait se rendre aux bureaux des syndics pour effectuer une enquête, elle lui avait demandé d'examiner les retards dans l'administration de deux actifs. Un de ces actifs était l'actif Browne et l'autre était l'actif 595880 Ontario Limited. La plainte déposée dans l'actif Browne a été retirée. Ils se sont par conséquent appuyés sur l'actif Rudda dont il avait été question dans la vérification de 2003.

a) Actif de Mary Elizabeth Ann Ruda déposé le

[95] Cet actif comptait un créancier important, soit Cantu Furniture. Si la réclamation de Cantu avait été acceptée, Cantu aurait touché tout le produit de l'actif. Le syndic a contesté la réclamation de Cantu. Le syndic n'a réussi à contester et à faire rejeter la réclamation des créanciers que beaucoup plus tard.

[96] Peter Hargadon c.r., représentait Mme Rudda. Il a présenté une requête en annulation de la faillite au registraire adjoint des faillites. Cette motion d'un caractère plutôt particulier avait été accueillie, et Mme Rudda avait reçu environ 70 000 $.

[97] Les avocats du BSF étaient présents lors de l'audience relative à la requête en annulation devant le registraire adjoint des faillites. Ils n'avaient pas contesté la demande d'annulation, mais ils avaient, par contre, soulevé d'autres questions. La transcription de l'audience devant le registraire adjoint a été déposée en preuve, et il est juste de dire que le BSF n'avait pas été bien accueilli.

[98] Il ne fait aucun doute que le syndic n'a pas administré cet actif promptement et avec diligence. Fait assez intéressant, Mme Rudda était présente à l'audience et elle avait témoigné en faveur des syndics. Si les syndics avaient procédé plus rapidement, Mme Rudda n'aurait probablement rien reçu. Mme Rudda a profité du retard.

b) Actif 595880 Ontario Limited déposé le

[99] L'honorable juge Bernard Manton était l'un des créanciers dans cet actif. L'administration de l'actif avait été complétée en 2004. Entre 1989 et 2004, le juge Manton avait écrit de nombreuses lettres, non seulement au syndic, mais également au BSF. Il avait, de plus, demandé à son député d'écrire au BSF. Bien que le BSF ait menacé d'imposer des sanctions au syndic, il n'avait jamais rien fait de concret. Malgré toute la pression, le syndic n'avait pas procédé rapidement. Le syndic reconnaît que l'actif n'a pas été administré rapidement, mais invoque le fait que le juge Manton avait, en sa qualité d'inspecteur de l'actif, approuvé ERD sans la moindre réserve et qu'il avait, de plus, reçu une lettre de commentaires du BSF approuvant la manière dont l'actif avait été administré. Selon moi, cela ne libère pas le syndic de ses responsabilités.

[100] Je conclus que le syndic a enfreint ses obligations, comme Mme Laperrière l'allègue dans les paragraphes 115 et 116 de son rapport.

Conclusion

[101] Je conclue que les syndics ont utilisé le compte « Intérêt » avec le consentement du BSF et qu'en tant que tel il n'y a pas eu contravention aux dispositions de la Loi, des Règles ou des Instructions.

[102] En ce qui a trait aux allégations formulées dans les paragraphes B, E, H, J et K, elles étaient toutes le fruit d'une erreur administrative. Si j'interprète erronément la nature des infractions et qu'il s'agit d'infractions de responsabilité absolue, alors les syndics ont contrevenu aux diverses dispositions de la Loi. Il faudra tenir compte du fait que les syndics ont commis des erreurs administratives lorsque viendra le temps d'imposer des sanctions dans le cadre de la présente instance.

[103] En ce qui concerne les allégations formulées dans les paragraphes C, D, F, G et I, je conclue que les syndics n'ont contrevenu ni à la Loi, ni aux Règles ni aux Instructions.

[104] En ce qui a trait au retard dans l'administration de deux actifs, je conclus que le syndic a enfreint les dispositions de la Loi et des Règles et qu'il n'a pas complété l'administration des actifs promptement.

Dépens :

Je recevrai l'argumentation écrite des parties sur la question des dépens. Dans leur argumentation écrite, les parties devraient aborder les questions suivantes :
a) Est-ce que j'ai la compétence d'adjuger les dépens contre le BSF?
b) Le cas échéant, devrais-je adjuger les dépens contre le BSF?
c) Quelle échelle devrait être appliquée, et à quel montant les dépens devraient-ils être fixés?

Sanctions :

Si le BSF demande que des sanctions soient imposées au syndic, quelles sanctions demande-t-il?

Délai :

Les avocats du syndic devront déposer et transmettre leur argumentation écrite sur les dépens le ou avant le . Les avocats du BSF devront signifier et déposer leur argumentation écrite sur les dépens le ou avant le . Les avocats du syndic auront 10 jours pour déposer une réponse.

En ce qui concerne les sanctions, les avocats du BSF devront déposer et transmettre leur argumentation écrite le ou avant le . Les avocats du syndic devront déposer et transmettre leur argumentation écrite avant le . Les avocats du BSF auront 10 jours pour déposer une réponse.

DATÉ à Ottawa ce .

L'honorable James B. Chadwick, c.r.
Délégué


Le présent document a été reproduit dans sa version originale, telle que fournie par le délégué du surintendant des faillites.