Examen législatif de 2021 de la Loi canadienne sur les organisations à but non lucratif Document de consultation

1.0 Introduction

  1. Les organisations à but non lucratif (OBNL) œuvrant au Canada sont extrêmement variées tant sur le plan de la forme que des objectifs visés. De tailles variables, elles poursuivent une multitude de fins dans les secteurs des soins de santé, de l'éducation, des arts, des sports, de l'environnement, des services sociaux et de la défense d'intérêts politiques, notamment. On compte également des organisations à caractère culturel et religieux. Le secteur contribue de façon importante à l'économie du pays, générant plus de 8,5 % du produit intérieur brut et employant plus de deux millions de personnesNote de bas de page 1. Il est aussi reconnu pour ses services aux jeunes et aux personnes en situation de pauvreté ou à faible revenu, ainsi que pour le rôle qu'y jouent les femmes, les immigrants, les minorités visibles, les personnes LGBTQ2+, les personnes handicapées, les Premières nations, les Métis et les Inuits. Un autre signe qui distingue fondamentalement ce secteur et qui enrichit la vie de l'ensemble de la population est le bénévolat altruiste que font chaque jour plus de 12 millions de Canadiennes et de CanadiensNote de bas de page 2.
  2. Il y a environ 170 000 OBNL au Canada, dont quelque 20 % – soit plus de 38 000 – sont assujetties aux dispositions de la Loi canadienne sur les organisations à but non lucratif (la Loi sur les OBNL ou la Loi). Promulguée en 2011, cette loi a été conçue pour favoriser la responsabilisation, la transparence et la bonne gouvernance, tout en étant suffisamment souple pour répondre aux besoins des petites comme des grandes organisations. Fondée sur la Loi canadienne sur les sociétés par actions (LCSA), la Loi sur les OBNL confère aux OBNL les avantages d'une loi moderne sur la gouvernance d'entreprise. Elle a eu pour effet de simplifier d'une manière appréciable le processus de constitution en société, d'améliorer la transparence et la responsabilisation financière et de clarifier les droits et les responsabilités des administrateurs, des dirigeants et des membres.
  3. La Loi exige que dans les dix ans suivant la date de son entrée en vigueur, le ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie présente au Parlement un « rapport sur [ses dispositions leur application] dans lequel il fait état des modifications qu'il juge souhaitables ». Un comité du Sénat, de la Chambre des communes, ou un comité mixte est saisi du rapport, il procède à son étude et il établit son propre rapportNote de bas de page 3.
  4. Cet examen législatif permettra de déterminer si la Loi atteint toujours ses objectifs une décennie après sa mise en œuvre. Le présent document de consultation expose des questions qui ont été cernées par les parties intéressées ou qui se sont posées depuis 2011. Il vise à fournir un cadre pour les consultations publiques qui contribueront au rapport du ministre.
  5. L'examen législatif de la Loi sur les OBNL survient alors que les OBNL et les organismes de bienfaisance sont confrontés à un ensemble de problèmes de ressources et économiques liés à la pandémieNote de bas de page 4. Les organisations ont fait face à une pression et à des perturbations énormes : elles ont dû protéger leurs employés, adapter leurs services et, dans de nombreux cas, trouver d'autres sources de revenus. Elles ont également joué un rôle clé dans la réponse à la crise en fournissant une assistance essentielle aux communautés à travers le pays. Le gouvernement s'est efforcé d'atténuer la pression financière subie par le secteur tout au long de cette période difficile, notamment en garantissant l'admissibilité des organismes sans but lucratif à de nombreux programmes phares de son plan d'action économique. La révision de la loi offre l'occasion de s'assurer que le secteur est soutenu par un cadre juridique solide alors que le pays avance vers la reprise.
  6. L'examen législatif fait suite aussi à la publication du rapport du Comité sénatorial spécial intitulé Catalyseur du changement : une feuille de route pour un secteur de la bienfaisance plus robuste, et à la Réponse du gouvernementNote de bas de page 5 à ses 42 recommandations qui préconisent, entre autres, « que soient établies de nouvelles relations avec le gouvernement fédéral ». Bien que des questions liées à la Loi aient été soulevées auprès du Comité sénatorial dans le cadre de ce processus, celui-ci a souligné dans son rapport qu'un examen législatif devait avoir lieu bientôt et il s'est donc abstenu de faire des recommandations liées au droit des sociétés.

2.0 Contexte

  1. Au Canada, la responsabilité du droit des sociétés est une compétence partagée, environ 20 % des OBNL étant réglementées sous le régime de la loi fédérale et les autres sous le régime de lois provinciales ou territoriales. Toutes les provinces et tous les territoires du Canada réglementent les OBNL, soit par une loi distincte comme une loi sur les organisations à but non lucratif ou une loi sur les sociétésNote de bas de page 6, soit par l'usage de dispositions particulières dans leurs lois sur les sociétés par actionsNote de bas de page 7. Malgré ces différences structurelles, la loi fédérale et les lois ou les dispositions provinciales et territoriales qui régissent les OBNL proposent un modèle de gouvernance qui repose sur les cadres de réglementation des sociétés par actions.
  2. La Loi sur les OBNL et son règlement d'application établissent le cadre juridique et réglementaire des organisations sans capital-actions constituées au niveau fédéral. Ce cadre tient compte d'un large éventail d'organisations publiques et privées, y compris des organisations sollicitant des fonds publics à l'appui d'objectifs sociétaux ou se livrant à des activités commerciales.
  3. Malgré le nom de la Loi, les organisations qu'elle réglemente peuvent réaliser des profits et mener des activités commerciales au même titre que les sociétés par actions. Le cas échéant, elles peuvent être assujetties à l'impôt sur les sociétés en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu. La principale différence entre les OBNL et les sociétés par actions tient plutôt à la façon dont elles sont structurées. D'une part, les sociétés commerciales émettent des actions et versent des dividendes aux propriétaires qui détiennent les actions. Bien que les OBNL comportent des membres, elles n'émettent pas d'actions et ne peuvent pas verser de dividendes. Les OBNL disposent d'une certaine souplesse dans l'utilisation de leurs revenus et de leurs bénéfices pour la poursuite de leurs activités, tant que ce soit conforme à leurs statuts et règlements et la Loi.
  4. La Loi sur les OBNL définit la structure de base et les normes requises pour la gouvernance d'une OBNL, mais elle ne prescrit pas dans le détail la façon dont elle doit être gérée et elle n'impose pas de restrictions sur la nature de ses activités sociales, politiques ou commerciales. La Loi établit les règles et prévoit les mécanismes pour faciliter l'interaction entre les administrateurs, les dirigeants, les membres et les autres parties intéressées qui influent sur la prise de décisions, mais elle donne une bonne marge de manœuvre aux organisations pour adapter les exigences à leurs besoins en fonction de leur taille et des fins qu'elles poursuivent.
  5. La Loi sur les OBNL vise à atteindre ses objectifs grâce à une combinaison de dispositions obligatoires et de dispositions par défaut. Les dispositions obligatoires s'appliquent à toutes les OBNL, tandis que les dispositions par défaut établissent les règles de fonctionnement de base (p. ex. quorum nécessaire aux assemblées de membres) qui peuvent être modifiées par l'organisation dans ses statuts constitutifs, ses règlements administratifs ou par une convention unanime des membres.
  6. Les OBNL peuvent élaborer leurs propres règlements administratifs ou utiliser les règlements types élaborés par Corporations Canada, qui propose également de multiples politiques et documents d'orientation conçus pour faciliter le processus de demande et de constitution en société, ainsi que d'éventuels changements à l'organisation.
  7. Une caractéristique clé de la Loi sur les OBNL est la distinction faite entre les organisations qui ont recours à la sollicitation et celles qui n'y ont pas recours. Une organisation est considérée comme ayant recours à la sollicitation lorsqu'elle a reçu un revenu provenant de sources publiques qui excède 10 000 $ au cours d'un seul exercice financier, notamment des donations de tiers, des subventions gouvernementales et des donations d'une autre organisation ayant touché des revenus de sources publiquesNote de bas de page 8. Étant donné que les organisations ayant recours à la sollicitation reçoivent des fonds publics, elles sont assujetties à des exigences plus lourdes en matière de gouvernance et de responsabilité financière que les autres organisations n'ayant pas recours à la sollicitation. La majorité des plus de 38 000 OBNL de régime fédéral ne font pas de sollicitationNote de bas de page 9. Il importe de noter que les exigences de la Loi sur les OBNL sont séparées et distinctes de celles qui s'appliquent en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu. Les organisations ayant recours à la sollicitation ne sont pas toutes des organismes de bienfaisance enregistrés aux fins de l'impôt, mais celles qui le sont doivent respecter les normes de gouvernance et de responsabilité financière établies dans les deux lois.

3.0 Analyse

  1. Depuis sa promulgation, la Loi sur les OBNL a fait l'objet de commentaires constructifs de la part des parties intéressées. Bien qu'elles aient été nombreuses à souligner le cadre législatif moderne que fournit la Loi, d'autres sont d'avis que le régime devrait refléter plus fidèlement la diversité et les réalités opérationnelles des OBNL canadiennes.
  2. Des parties intéressées ont recommandé que le gouvernement revoie plusieurs règles obligatoires pour en faire des règles par défaut ou encore qu'il envisage d'incorporer des mesures additionnelles pour accroître la marge de manœuvre des OBNL. Elles ont proposé des réformes visant les exigences relatives aux rapports financiers, à la vérification et aux examens, à la nomination des administrateurs par le conseil d'administration, à la tenue de réunions virtuelles et aux droits de vote. Ces éléments sont analysés individuellement et de façon plus approfondie ci-après.
  3. Bien que cet examen législatif porte principalement sur les mérites de modifier le texte de la Loi sur les OBNL, le gouvernement reconnaît que certaines questions soulevées par les parties intéressées peuvent être abordées de différentes façons, incluant des solutions qui passent par des modifications aussi bien législatives que réglementaires. Les parties intéressées sont donc invitées à indiquer dans leurs commentaires les changements réglementaires qui pourraient s'avérer pertinents ou qui pourraient offrir une solution de rechange à des modifications législatives.

3.1 Obligations en matière de vérification et de rapports financiers

  1. Sous le régime actuel, les obligations en matière d'examen financier d'une organisation diffèrent selon qu'elle ait recours ou non à la sollicitation et le montant de ses revenus annuels bruts :
    • Les règles les plus minimales s'appliquent aux organisations ayant recours à la sollicitation dont le revenu annuel brut est inférieur à 50 000 $Note de bas de page 10 et aux organisations n'ayant pas recours à la sollicitation dont le revenu annuel brut est inférieur à 1 000 000 $Note de bas de page 11. Ces organisations sont tenues par défaut de nommer un expert-comptable, mais elles peuvent déroger à cette règle par une résolution unanime de leurs membres. L'expert-comptable doit effectuer une mission d'examenNote de bas de page 12, mais les membres peuvent adopter une résolution ordinaire pour demander plutôt une vérification. Si aucun expert-comptable n'est nommé, seule une compilationNote de bas de page 13 est requise.
    • Les organisations ayant recours à la sollicitation dont les revenus annuels bruts se situent entre 50 000 $ et 250 000 $Note de bas de page 14 doivent nommer un expert-comptable pour une mission de vérification, mais les membres peuvent adopter une résolution spéciale (2/3 des votes) et opter pour une mission d'examen.
    • En dernier lieu, les organisations n'ayant pas recours à la sollicitation et dont les revenus sont supérieurs à 1 000 000 $ et celles qui ont recours à la sollicitation et dont les revenus sont supérieurs à 250 000 $ doivent nommer un expert-comptable qui effectue une vérificationNote de bas de page 15.
  2. Ces distinctions visaient à assurer des niveaux adéquats de transparence et de responsabilisation, tout en réduisant au minimum le fardeau administratif inutile pour les plus petites organisations. Le maintien de la confiance du public dans le fonctionnement du secteur a été jugé indispensable pour assurer un financement pérenne.
  3. Des parties intéressées se sont dites préoccupées par le fait que les obligations en matière de comptabilité, de vérification et de rapports financiers prévues par la Loi et son règlement d'application portent à confusion et sont inutilement lourdes pour les petites organisations. Elles soulignent notamment que le montant des dons peut varier d'une année à l'autre, créant une incertitude liée aux exigences comptables, et que le fait de déterminer si certains fonds proviennent de sources publiques peut s'avérer pénible pour les petites organisations. Voici quelques-uns des changements ayant été recommandés : augmenter les seuils de revenu qui déclenchent différents types d'examens financiers; calculer les seuils de revenu en fonction d'une moyenne mobile pluriannuelle; diminuer le pourcentage de votes requis pour modifier le niveau d'examen; et, de façon plus générale, permettre aux organisations de choisir le niveau d'examen financier qui leur convient.
  4. Question : Les parties intéressées sont invitées à formuler des commentaires sur la pertinence et la façon de modifier les obligations en matière de vérification et de rapports financiers, notamment en ce qui concerne la réduction du fardeau administratif et le maintien d'une norme suffisamment élevée d'imputabilité et de transparence.

3.2 Conseil d'administration

  1. La Loi sur les OBNL prévoit que le conseil d'administration est responsable de la gestion et de la surveillance de la gestion des activités et des affaires internes de l'organisation. Les administrateurs sont élus lors de l'assemblée générale annuelle des membres. Il existe également des règles qui autorisent le conseil d'administration à nommer d'autres administrateurs à condition que les statuts constitutifs le prévoient et que le nombre total des administrateurs ainsi nommés n'excède pas le tiers du nombre des administrateurs élus à la dernière assemblée annuelleNote de bas de page 16. Cette règle du tiers existe pour empêcher que le conseil d'administration d'une OBNL nomme la majorité des administrateurs. Pour les organisations ayant recours à la sollicitation, au moins trois administrateurs doivent être élus, dont deux ne doivent pas être ni dirigeants ni employés de celle-ciNote de bas de page 17. Tous les administrateurs doivent être élus par les membres ou nommés par le conseil d'administration dans les limites des pouvoirs prévus dans la Loi sur les OBNL.
  2. Ces dispositions visaient à établir un équilibre entre des besoins concurrents, à savoir la nécessité de conférer une souplesse et une agilité opérationnelles aux conseils d'administration et celle d'assurer la reddition de comptes aux membres. Toutefois, depuis son adoption en 2011, des parties intéressées ont déclaré que les dispositions de la Loi sur les OBNL relatives à l'élection des administrateurs manquent de souplesse ou qu'elles vont à l'encontre de traditions de longue date de nombreuses OBNL.
  3. Des parties intéressées soutiennent que la règle du tiers est difficile à appliquer et trop contraignante. Elles proposent de la simplifier en diminuant, par exemple, le pourcentage d'administrateurs qui doivent être élus ou en l'appliquant à toutes les élections auxquelles prennent part les membres et pas seulement à celle qui s'est déroulée à la plus récente assemblée générale annuelle.
  4. Parmi d'autres assouplissements demandés, il y a la possibilité de créer des postes d'administrateurs nommés d'office. Ce sont des personnes qui deviennent automatiquement administrateurs en raison du poste qu'elles occupent, par exemple celui de président-directeur général de l'organisation. Les parties intéressées qui préconisent ce changement soutiennent que les OBNL qui veulent avoir des administrateurs d'office devraient pouvoir faire adopter une telle disposition par leurs membres au moyen de leurs règlements administratifs.
  5. Des parties intéressées s'inquiètent également du fait que l'obligation pour les organisations ayant recours à la sollicitation de compter deux administrateurs qui ne sont pas aussi des dirigeants n'est pas pratique pour les petites organisations, dont celles qui oscillent entre le statut d'organisation ayant recours à la sollicitation et le statut d'organisation n'ayant pas recours à la sollicitation.
  6. Question : Les parties intéressées sont invitées à formuler des commentaires sur la pertinence et la façon de modifier la Loi sur les OBNL relativement à la nomination des administrateurs, notamment en ce qui concerne l'instauration d'une plus grande souplesse tout en veillant à ce que le conseil continue de rendre des comptes aux membres.

3.3 Prise de décision hybride et virtuelle

  1. La Loi sur les OBNL prévoit que les réunions doivent se tenir au Canada, dans le lieu que prévoit les règlements administratifs ou que choisisse les administrateursNote de bas de page 18. Les membres sont autorisés par défaut à participer à une assemblée par téléphone ou par des moyens électroniques, sauf si les règlements administratifs en disposent autrementNote de bas de page 19. Au contraire, une organisation ne peut tenir une réunion entièrement par un moyen de communication électronique ou téléphonique que si les règlements administratifs le permettentNote de bas de page 20. Ces dispositions étaient destinées à concilier la nécessité pour une organisation de faciliter la participation de ses membres par les moyens de leur choix et la nécessité de gérer les ressources de la société de façon responsable.
  2. Certaines parties intéressées ont exprimé des préoccupations au sujet de l'incongruité entre les exigences par défaut liées à la participation virtuelle. Elles ont souligné que, compte tenu des progrès de la technologie de l'information et de la disponibilité des services à large bande, la capacité de se réunir ou de participer virtuellement devrait être offerte par défaut à toutes les organisations. Celles qui souhaiteraient l'interdire totalement ou partiellement devraient le faire dans leurs règlements administratifs. Des parties intéressées ont aussi demandé des éclaircissements sur le langage utilisé et les obligations créées par certaines dispositions de la Loi sur les OBNL et son règlement d'application (p. ex. le « lieu » d'une assemblée et l'utilisation du vote anonyme) pour s'assurer que les organisations sont pleinement en mesure de mener leurs affaires entièrement au moyen de réunions virtuelles.
  3. Question : Les parties intéressées sont invitées à formuler des commentaires sur la pertinence et la façon d'apporter des ajustements pour faciliter les réunions virtuelles, notamment en ce qui concerne les possibilités d'économies offertes par l'avancement des technologies de l'information et la nécessité d'assurer la pleine participation des membres relativement aux questions sur lesquelles ils ont le droit de voter.

3.4 Catégories de membres

  1. Les membres d'une OBNL ont certains droits et responsabilités en vertu de la Loi, conformément à la définition énoncée dans les statuts constitutifs et les règlements administratifs de l'organisation, notamment le droit d'élire ou de destituer les administrateurs et de pourvoir aux postes vacants. Les membres votent également les statuts constitutifs et les règlements administratifs de l'organisation ainsi que leurs modifications.
  2. La Loi sur les OBNL prévoit queNote de bas de page 21 les organisations peuvent établir des catégories, des groupes régionaux ou d'autres groupes de membres et qu'elles peuvent assortir des droits de vote différents à ces catégories ou groupes. La formulation de cette caractéristique de la Loi était intentionnellement non normative et visait à tenir compte d'un large éventail de structures organisationnelles et de processus décisionnels. Il est à noter que la Loi est muette sur le vote par délégation et ne le permet donc pas expressément, ni ne l'interdit. La décision de ne pas inclure de dispositions par défaut découlait de la reconnaissance du fait que le vote par délégation ne serait pas requis pour tous les types d'organisations.
  3. Des parties intéressées soutiennent néanmoins que la Loi devrait permettre explicitement le vote par délégation et fournir une orientation en la matière puisqu'il s'agit d'une structure de vote courante au sein des OBNL. Elles font remarquer que beaucoup d'organisations comptent de nombreux membres qui représentent différents secteurs, faisant en sorte qu'il soit impossible et peu pratique qu'ils assistent tous aux assemblées (p. ex. organisations religieuses et professionnelles). Ces parties intéressées soutiennent que des solutions de rechange ont été élaborées pour permettre le vote par délégation en vertu de la Loi, mais qu'elles sont compliquées et ne reflètent peut-être pas la véritable nature des organisations.
  4. Question : Les parties intéressées sont invitées à formuler des commentaires sur la pertinence et la façon d'apporter des ajustements pour faciliter le vote par délégation, notamment en ce qui concerne les avantages et les risques de détailler expressément les règles concernant ce type de structure organisationnelle.

3.5 Droits des membres

  1. La Loi sur les OBNL exige que tous les votes portant sur les décisions dans lesquelles les membres doivent avoir leur mot à dire soient tenus au cours d'une assemblée des membres. Ces assemblées doivent être convoquées au moins une fois par année, et un avis indiquant l'heure et le lieu doit être fourni aux membres habilités à voter conformément aux règlements administratifsNote de bas de page 22. La Loi précise en outre que les règlements administratifs d'une organisation peuvent prévoir une ou plusieurs méthodes réglementaires selon lesquelles les membres qui ne sont pas présents à une assemblée sont autorisés à voter (vote des membres absents). La Loi n'exige pas le vote des membres absents. Si une organisation choisit de le permettre, elle doit suivre les règles établies dans le Règlement. De plus, bien que la Loi permette aux organisations de créer une catégorie de « membre sans droit de vote » n'ayant pas voix au chapitre sur la gestion courante, elle préserve la capacité de tous les membres d'avoir leur mot à dire avant la dissolution, la prorogation ou la restructuration de l'organisation, y compris les changements aux droits des membresNote de bas de page 23. Globalement, ces différentes dispositions visent à protéger les membres et à assurer une saine gestion démocratique des OBNL.
  2. Des parties intéressées ont demandé un assouplissement des règles relatives aux droits des membres. Entre autres, des modifications législatives ont été recommandées pour que l'obligation de tenir des votes aux assemblées des membres soit une règle par défaut plutôt qu'une règle obligatoire. L'objectif serait de faciliter la tenue de votes en dehors des assemblées. Ces parties intéressées soutiennent que la technologie permettant de tels votes autonomes est maintenant bien établie et fiable.
  3. Des parties intéressées ont également demandé que les OBNL soient habilitées à exiger que les fondés de pouvoir soient membres de l'organisation. Le règlement prévoit actuellement le vote par procurationNote de bas de page 24, mais précise qu'un fondé de pouvoir peut « être membre ou non ». Les parties intéressées qui préconisent ce changement soutiennent que cela ne reflète pas la pratique qui a cours dans le secteur et que la Loi et son règlement d'application devraient être modifiés pour faire en sorte que les statuts constitutifs ou les règlements administratifs des OBNL puissent exiger que les fondés de pouvoir soient membres de l'organisation.
  4. D'autres modifications sont également demandées en ce qui concerne les droits des membres sans droit de vote. Selon certaines parties intéressées, cette règle obligatoire devrait être modifiée pour devenir une règle par défaut pouvant être modifiée par les règlements administratifs des organisations. Ces parties intéressées soutiennent que les membres sans droit de vote dans un système de vote par délégation ne s'attendent pas à prendre part aux décisions, et que leur accorder un droit de vote a des effets perturbateurs et empêche les OBNL de structurer leurs décisions de façon optimaleNote de bas de page 25.
  5. Question : Les parties intéressées sont invitées à formuler des commentaires sur la pertinence et la façon d'apporter des ajustements aux règles de vote, notamment en ce qui concerne l'introduction d'une plus grande souplesse et la protection appropriée des droits démocratiques des membres.

3.6 Distribution autorisée des biens

  1. La Loi sur les OBNL interdit la distribution des revenus ou des biens d'une organisation à ses membres à moins que ce ne soit dans le cadre de la promotion de ses activitésNote de bas de page 26 ou en conformité avec la Loi. Elle exige également que les statuts constitutifs d'une organisation précisent comment s'effectue la distribution des biens après la liquidationNote de bas de page 27. Des restrictions s'appliquent toutefois à certains types d'organisations qui ont reçu des fonds publics (incluant les organisations ayant recours à la sollicitation)Note de bas de page 28.
  2. Des parties intéressées ont demandé que soient apportés des éclaircissements sur les pratiques permises par la Loi pendant le cycle de vie d'une organisation, comme le remboursement par un club social ou une association semblable de frais d'adhésion suivant la démission ou le retrait d'un membre. Elles comparent le manque d'orientation de la Loi dans ces types de situations à la règle prévue dans les cas de liquidation qui semble autoriser expressément l'incorporation d'une déclaration dans les statuts constitutifs de l'organisation attestant que les biens seront distribués aux membres.
  3. Question : Les parties intéressées sont invitées à formuler des commentaires sur la pertinence et la façon d'apporter des ajustements aux modalités de distribution des bénéfices et des biens, notamment pour prendre en compte la diversité dans les organisations régies par la Loi sur les OBNL.

3.7 Évolution récente de la législation sur les sociétés par actions

  1. Depuis l'adoption de la Loi sur les OBNL en 2011, la Loi canadienne sur les sociétés par actions (LCSA) a été modifiée pour tenir compte de l'évolution de la gouvernance d'entreprise en ce qui concerne a) la divulgation de renseignements relatifs à la diversitéNote de bas de page 29, b) l'information sur la propriété effective d'une sociétéNote de bas de page 30 et c) les obligations fiduciaires des administrateursNote de bas de page 31.
  2. Au chapitre de la diversité, on reconnaît de plus en plus qu'une équipe de direction plus diversifiée représente un atout et que les sociétés plus diversifiées sont plus aptes à obtenir de meilleurs résultats organisationnels. Afin de favoriser la diversification des équipes de direction et de gestion, les modifications apportées en 2018 ont obligé les sociétés sous le régime de la LCSA ayant fait appel au public (cotées en bourse en règle générale) à faire rapport annuellement aux actionnaires et à Corporations Canada sur la diversité dans leur conseil d'administration et leur haute direction. Elles doivent également rendre compte de leurs politiques visant la promotion de la mixité, y compris des cibles de représentation, en utilisant l'approche « se conformer ou s'expliquer » – si elles n'ont pas mis en place de telles politiques, elles doivent en donner la raison. Les exigences visaient à favoriser le dialogue entre la direction et les actionnaires et à encourager les entreprises canadiennes à reconnaître les avantages des origines variées dans la prise de décisions. L'approche « se conformer ou s'expliquer » a également été conçue pour s'aligner plus facilement avec des obligations semblables relatives à la représentation des femmes qui existent pour la plupart des sociétés cotées en bourse au titre de la réglementation provinciale sur les valeurs mobilières. En imposant plus largement ces exigences, on croyait d'une manière générale que les grandes sociétés cotées en bourse devraient être assujetties à des normes de gouvernance et d'imputabilité plus contraignantes que les autres sociétés.
  3. Concurremment à l'adoption de ces modifications, le Comité sénatorial spécial sur le secteur de la bienfaisance a publié son rapport sur le secteur de la bienfaisance recommandant que le gouvernement du Canada, par l'intermédiaire de l'Agence du revenu du Canada, inclue des questions dans les formulaires T3010 (pour les organismes de bienfaisance enregistrés) et T1044 (pour les organismes sans but lucratif constitués en vertu d'une loi fédérale) au sujet de la diversité dans les conseils d'administration en fonction des lignes directrices existantes sur l'équité en matière d'emploi. Dans sa réponse, le gouvernement a indiqué qu'il appuyait la recommandation et que le Comité consultatif sur le secteur des organismes de bienfaisance devrait envisager de mener une étude plus approfondie sur cette question.
  4. En ce qui concerne les renseignements sur la propriété effective des sociétés, le gouvernement a modifié la LCSA pour exigerNote de bas de page 32 que les sociétés sous son régime créent et tiennent un registre contenant des renseignements sur les « particuliers ayant un contrôle important de la société ». L'objectif est de lutter contre les personnes malveillantes qui cherchent à dissimuler la propriété et le contrôle d'entreprises à des fins illicites, notamment le blanchiment d'argent, le financement du terrorisme et l'évasion fiscale. Lorsque les malfaiteurs profitent de la possibilité de créer des structures de propriété complexes et d'utiliser des actionnaires et des administrateurs désignés, l'identité des personnes physiques ou des "bénéficiaires effectifs" qui possèdent et contrôlent les sociétés peut rester cachée à ceux qui pourraient avoir besoin de la connaître, comme les autorités policières et fiscales. Afin d'améliorer la disponibilité pour certaines administrations de renseignements sur la propriété effective, la LCSA a été modifiée de nouveauNote de bas de page 33 de façon à exiger que ces mêmes sociétés mettent leurs registres à la disposition de certains organismes d'enquête sur demande (sous réserve de certaines conditions).
  5. Tout comme les sociétés par actions, les entités sans but lucratif sont vulnérables aux abus; elles jouissent de la confiance du public, elles peuvent avoir accès à des sources de financement importantes et elles possèdent parfois une présence sur la scène internationale. Cela dit, la Loi sur les OBNL, la Loi de l'impôt sur le revenu et la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes comportent déjà des mesures de protection pour lutter contre les activités illicites. Plus précisément, la Loi sur les OBNL exige que les sociétés préparent et tiennent à leur siège social un registre des administrateurs, des dirigeants et des membres, ainsi que les statuts constitutifs et les règlements administratifs, les procès-verbaux des assemblées des membres et les résolutions des membres. Les OBNL doivent aussi tenir des registres comptables adéquats, et les dispositions de la Loi qui exigent le recours à un expert-comptable aident à assurer l'examen minutieux de leurs activités.
  6. Enfin, le gouvernement a modifiéNote de bas de page 34 la LCSANote de bas de page 35 pour indiquer clairement que les administrateurs et les dirigeants de toutes les sociétés régies par la LCSA, lorsqu'ils exercent leur obligation fiduciaire d'agir au mieux des intérêts de la sociétéNote de bas de page 36, peuvent tenir compte d'un large éventail d'intérêts, dont ceux des parties intéressées, y compris les actionnaires, les employés, les pensionnés et les retraités, les créanciers, les consommateurs, les gouvernements et l'environnement. Ce principe avait déjà été reconnu par la Cour suprême du Canada et se trouve également dans certaines lois européennes et américaines sur les sociétés.
  7. La Loi sur les OBNL exigeNote de bas de page 37 actuellement que tous les administrateurs et les dirigeants agissent avec honnêteté et de bonne foi au mieux des intérêts de la société dans l'exercice de leurs pouvoirs et de leurs fonctions. Rien dans la Loi ou dans son règlement d'application ne précise ce que le conseil d'administration d'une OBNL devrait prendre en compte pour déterminer ce qu'il entend par « au mieux des intérêts de la société ».
  8. Le gouvernement a pris en compte les différences importantes qui existent entre le secteur des entreprises et celui des organisations à but non lucratif dans les réformes susmentionnées et il a choisi de ne pas transposer les nouvelles dispositions de la LCSA dans la Loi sur les OBNL. Toutefois, encourager une plus grande diversité, lutter contre l'utilisation illicite de structures d'entreprise et promouvoir une gouvernance responsable demeurent globalement des priorités importantes. L'examen législatif fournit l'occasion d'examiner dans son ensemble le caractère adéquat de la Loi sur les OBNL à la lumière de ces objectifs.
  9. Question : Les parties intéressées sont invitées à formuler des commentaires sur la pertinence et la façon de prendre en considération l'évolution récente de la législation sur les sociétés par actions dans le contexte des OBNL.

3.8 Autres questions

  1. Les sujets présentés ci-dessus sont révélateurs, mais non exhaustifs, des réserves pouvant être formulées et de la portée des modifications qui pourraient être apportées à la Loi et à son règlement d'application. Le gouvernement est conscient que des parties intéressées ont soulevé d'autres questions par le passé, notamment à l'égard des définitions et des formulations utilisées dans la Loi et de la création d'obligations spécifiques s'appliquant à des catégories différentes d'OBNL. Les parties intéressées sont également invitées à formuler des commentaires sur les nouvelles tendances qui se dessinent dans le secteur et qui pourraient avoir une incidence sur le fonctionnement de la Loi.
  2. Question : Les parties intéressées sont invitées à formuler des commentaires sur la pertinence et la façon d'apporter d'autres modifications à la Loi sur les OBNL.

4.0 Soumettre des commentaires

  1. Les parties intéressées sont invitées à fournir leurs commentaires sur le document de consultation par écrit d'ici le 30 juillet 2021. Ceux-ci doivent préférablement être envoyés par courriel en format texte ou Word à ic.nfpactreview-examenloibnl.ic@canada.ca.
  2. Sous réserve des considérations ci-dessous, Innovation, Sciences et Développement économique Canada pourrait rendre publiques toutes les réponses reçues des parties intéressées ou fournir des résumés de leurs présentations. Afin de respecter la vie privée et la confidentialité, veuillez indiquer si vous :
    1. souhaitez que votre identité et vos identificateurs personnels soient supprimés avant la publication;
    2. souhaitez que certaines parties de votre présentation demeurent confidentielles (le cas échéant, indiquer clairement lesquelles).
  3. Les renseignements reçus au cours de ce processus de consultation sont visés par la Loi sur l'accès à l'information et la Loi sur la protection des renseignements personnels. Si vous exprimez l'intention que vos commentaires, en totalité ou en partie, soient considérés comme des renseignements confidentiels, le gouvernement fera tout en son pouvoir pour les protéger.