Rapport sur l'examen de la politique nationale sur les pylônes d'antenne

Section D — Six questions liées à l'orientation de la politique

Question 5. De quelle façon et dans quelle mesure l'utilisation partagée de pylônes peut-elle contribuer à réduire le nombre de pylônes?

Bien que la Question 5 porte sur les questions relatives au partage de pylônes, la réponse traite plutôt de l'ensemble des possibilités de partage d'installations, notamment le partage a) de bâtis, b) d'emplacement d'antenne et c) de réseaux (au moyen de l'interopérabilité et d'arrangements complémentaires); la réponse comprend également des recommandations à cet égard. On soutient que chacun de ces types de partage peut permettre une réduction nette des coûts d'infrastructure pour l'utilisateur de système radio et, ce qui est à l'avantage du public, du nombre de pylônes (ou d'autres bâtis) qui doivent être érigés. Le cas échéant, la présente section traitera des questions de partage liées à des catégories particulières de services radio.

Les trois types de partage susmentionnés seront tous définis et les implications particulières, examinées tour à tour.

A. Partage des bâtis

L'installation d'antennes de radiodiffusion ou de réception sur des bâtis existants constitue une pratique courante. Ces structures existantes peuvent servir à des activités de radiocommunication, comme des pylônes, des mâts ou des poteaux, ou servir à d'autres fins, comme des poteaux électriques, des pylônes de lignes de transmission (haute-tension), des châteaux d'eau, des clochers d'église, des porte-drapeaux et des façades d'édifices.

Soulignons d'abord que la circulaire des procédures concernant les clientsFootnote 268 d'Industrie Canada, qui porte sur les obligations en matière de politique des promoteurs de toutes les installations radio importantes, stipule que le Ministère s'attend à ce que certains bâtis d'antenne soient partagés :

En supposant que tous les fournisseurs agissent de façon indépendante afin d'établir des bâtis d'antenne, ceci risquerait de créer des préoccupations légitimes relatives au nombre excessif de ces installations dans un emplacement donné. Afin d'éviter une telle situation, le Ministère demande que les requérants et les propriétaires des bâtis d'antenne, de concert avec les associations industrielles, travaillent en collaboration afin de conclure des ententes qui permettraient et encourageraient le partage des antennes afin d'en restreindre le nombreFootnote 269.

Il est intéressant de noter que dans sa circulaire concernant les clients, Industrie Canada adresse sa demande (de collaborer afin de conclure des ententes de partage) aux fournisseurs de « services de télécommunications fondés sur le spectre ». On peut difficilement déterminer quels fournisseurs pourraient être soumis à cette politique, puisqu'il ne s'agit pas là d'une désignation de services de télécommunications ou de radio établie au Canada. D'après le contexte, il semble que cette politique s'adresse aux utilisateurs du spectre qui pourraient avoir besoin d'antennes et de bâtis d'envergure afin d'offrir des services de télécommunications au public.

Dans ses politiques sur la radiodiffusion, Industrie Canada a adressé une demande directe semblable à toutes les catégories d'entreprises de radiodiffusion. La règle 2.1 des Règles générales s'adressant à l'ensemble des radiodiffuseurs stipule que :

Afin de restreindre le nombre de bâtis d'antenne dans un emplacement donné, le Ministère s'attend à ce que les requérants et les propriétaires de bâtis d'antenne agissent de concert afin de conclure des ententes qui permettraient et encourageraient le partage des bâtis d'antenneFootnote 270.

L'Association canadienne des radiodiffuseurs (ACR) a, dans sa présentation officielle écrite présentée dans le cadre du présent examen de la politique, énuméré les avantages suivants découlant du partage des bâtis. Selon l'ACR, le partage des bâtis permettrait de :

  1. réduire le nombre de pylônes dans la collectivité;
  2. réduire les coûts en capitaux liés aux nouvelles installations;
  3. simplifier l'obtention d'autorisations d'obstacle aérien;
  4. permettre le partage d'infrastructure de soutien, comme des édifices et des générateurs de secours;
  5. permettre la mise en commun du personnel d'entretien et des coûts d'exploitation du siteFootnote 271.

En nous fondant sur de telles présentations et sur la recherche indépendante menée au cours de la phase de collecte de données de l'examen de la politique, nous faisons la recommandation suivante à Industrie Canada :

Recommandation 28 : Qu'Industrie Canada mette en œuvre des politiques nouvelles et plus explicites visant à favoriser le partage des pylônes d'antenne et des autres bâtis servant à l'installation d'antennes radioFootnote 272.

Nous faisons cette recommandation en tenant compte du fait que, dans bien des circonstances, le partage n'est peut-être pas recommandable d'un point de vue technique (génie) et que, pour des raisons non techniques et d'ordre esthétique, le partage des bâtis n'est peut-être pas une solution appropriée pour certains types de services radio.

Premièrement, le partage des bâtis pose un certain nombre de défis sur le plan technique. Pour que plusieurs antennes radio soient installées sur un même pylône, mât ou poteau, il faudrait prendre en compte les éléments techniques suivants : la conformité du site existant aux exigences du service radiophonique, la possibilité de brouillages entre les systèmes, les limites quant à la charge que peut supporter le bâtiFootnote 273, les restrictions relatives à la hauteur du bâti et à l'espacement des antennes et (bien que ce soit peu probable) la possibilité que le partage de bâtis d'antenne produise une combinaison d'émissions qui excéderaient les limites du Code de sécurité 6Footnote 274 en ce qui concerne l'exposition humaine à l'énergie des radiofréquences.

Lorsque les antennes radio doivent être installées sur des structures ne servant pas aux services radio, comme des châteaux d'eau, des poteaux électriques ou des façades d'édifice, il se peut que des questions de structures ou d'autres points techniques liés à la fixation et aux limites de poids (charge) soulèvent des préoccupations. Par exemple, l'installation d'antennes radio sur les pylônes servant au transport d'électricité (haute tension) pourrait constituer une menace notable pour le personnel qui doit installer et entretenir ces antennesFootnote 275.

Deuxièmement, le partage des bâtis peut être impossible ou inapproprié pour des raisons étrangères au génie. Tout d'abord, si le site est loué pour la radiocommunication, le locateur (propriétaire) pourrait ne pas permettre le partage des bâtis ou le permettre en imposant des conditions bien trop onéreusesFootnote 276. En outre, même si le partage des bâtis se fait souvent pour des raisons d'ordre esthétique, cette pratique peut, dans certaines circonstances, entraîner une dégradation de l'apparence d'un bâti ou restreindre le déploiement de solutions esthétiques, comme des techniques de camouflage ou le recours à des bâtis (et à des antennes) monovalents fort discretsFootnote 277. De toute évidence, le partage de bâtis ne devrait pas être encouragé s'il dégrade de façon notable à l'aspect esthétique de l'emplacement, ce qui peut se produire si l'on ajoute des éléments d'antenne ou des câbles, ou s'il faut suréleverFootnote 278 ou renforcer le bâti afin de lui conférer l'intégrité structurelle nécessaire pour supporter des charges supplémentaires. Du point de vue esthétique, le partage de bâtis d'antenne constitue une option importante pour le choix de l'emplacement et un objectif sur le plan de la politique, sans toutefois être une panacée.

Pour de nombreux types de services radio ou d'utilisateurs, il ne convient peut-être pas d'exiger le partage de bâtis avec d'autres appareils radio. Les radioamateurs installent généralement leurs antennes et leurs bâtis sur leur propre résidence, et on ne peut s'attendre à ce qu'ils agissent autrementFootnote 279. En outre, il ne faudrait pas insister pour que les gouvernements ou organismes qui doivent assurer la sécurité de leurs communications partagent les bâtis servant à des installations de radio commerciale. Par exemple, pour des raisons de sécurité nationale, les installations de radiocommunication du ministère de la Défense nationale (MDN) ne devraient par être soumises aux obligations de colocalisationFootnote 280.

Les consultations effectuées dans le cadre du présent examen de la politique ont permis de déterminer que les entreprises de radiodiffusion du Canada, comme la Société Radio-Canada (SRC), tendent à partager leurs bâtis d'antenne destinés aux services de radio FM et de télévision avec d'autres utilisateurs radio lorsque cette pratique est rentable et possible du point de vue techniqueFootnote 281. Pour diverses raisons, il est très rare que d'autres types de services radio partagent l'emplacement d'antennes de radiodiffusion AMFootnote 282. Même si les entreprises de radiodiffusion du Canada ont depuis toujours partagé leurs bâtis d'antenne de radio FM et de télévision avec d'autres services radio, comme les fournisseurs de services cellulaires et de SCP, ces derniers n'ont habituellement pas été en mesure de leur rendre la pareille. Les pylônes monovalents contrôlés par les autres fournisseurs de services radio tendent à être trop courts pour permettre la couverture désirée par les radiodiffuseurs. En outre, les bâtis utilisés pour les installations surélevées conventionnelles ne s'élèvent pas suffisamment au-dessus du toit pour permettre une séparation adéquate entre les éléments rayonnants d'une antenne de radiodiffusion et les étages supérieurs où vivent ou travaillent des gens. Pour que les limites d'exposition prévues dans le Code de sécurité 6 soient respectées, il faut que la distance entre les résidents et les éléments d'antenne soit plus élevée.

Même si, par le passé, les radiodiffuseurs n'ont pas eu recours aux bâtis contrôlés et utilisés par les autres fournisseurs de services radio, cette tendance se modifiera de plus en plus avec le passage du Canada aux signaux de radiodiffusion numériques. En raison des caractéristiques électromagnétiques des signaux de radio et de télévision numériques et des antennes qui y sont associées, il sera possible d'utiliser un certain nombre d'antennes de taille, de puissance et de hauteur moindres afin d'étendre la couverture des signaux. Par conséquent, les radiodiffuseurs utilisant des signaux numériques chercheront de plus en plus à partager des bâtis déjà érigés dans les zones urbaines et suburbaines. Un tel partage devrait être encouragé et facilité.

Les entreprises de télécommunications sans fil (cellulaire et SCP) constituent la seule catégorie de services radio d'Industrie Canada pour laquelle l'octroi de licence est conditionnel au partage de bâtis d'antenneFootnote 283. Ces entreprises doivent permettre aux autres fournisseurs de services de télécommunications sans fil de partager leurs bâtis de façon non discriminatoire et, lorsque la situation le permet, de manière à permettre aux concurrents « d'utiliser uniquement les parties de l'infrastructure du réseau dont ils ont besoin et de payer en conséquenceFootnote 284 ». Dans le principal document de politique publié (en 1995) aux fins d'autorisation de systèmes de SCP, Industrie Canada a indiqué que :

On s'attend à ce que les demandeurs respectent la politique d'Industrie Canada visant à favoriser le partage d'emplacements d'antennes avantageux entre les fournisseurs de services de télécommunications lorsque cette méthode se révèle pratique et que des ententes commerciales appropriées peuvent être concluesFootnote 285.

Les expériences de partage de bâtis et d'emplacement d'antennes par les entreprises de télécommunications sans fil au Canada seront abordées dans la prochaine sous-section.

B. Partage d'emplacements

Il est pratique courante d'installer les antennes de transmission ou de réception radio très près d'autres antennes ou à proximité de diverses infrastructures que la société pourrait considérer comme inesthétiques ou indésirables, comme des corridors de lignes de transport d'électricité, des sous-stations électriques et des cheminées. La co-implantation d'antennes radio (excluant le partage de bâtis) s'effectue généralement au moyen du partage d'emplacements situés sur les toits.

Comme nous l'avons indiqué ci-dessus, les antennes radio peuvent être co-implantées avec d'autres antennes ou d'autres structures urbaines. Les questions de co-implantation doivent être examinées dans le contexte du choix de l'emplacement. Lors du choix de l'emplacement de la plupart des antennes radio (fixes), il faut prendre en compte des facteurs ayant trait à la radiocommunication et d'autres n'étant pas liés aux communications. Par exemple, pour assurer le bon fonctionnement de son réseau de téléphonie mobile ou à large bande, le fournisseur de services doit tenir compte de l'ensemble des exigences liées à la couverture, des modes d'utilisation du système, de la topographie avoisinante et de la qualité du signal radio (p. ex. possibilité de brouillage)Footnote 286.

Lors du partage d'emplacements situés au sol ou sur les toits, les défis en matière de radiocommunication sont fort semblables à ceux qui se posent lors du partage de bâtis. Comme on l'a vu dans la sous-section précédente, un certain nombre de problèmes techniques compliquent l'installation d'antennes de radio FM ou de télévision sur des sites exploités par la plupart des autres services radio. De plus, les signaux émis par les antennes AM seront considérablement perturbés si ces antennes se situent à proximité d'infrastructures urbaines, comme des cheminées ou des sous-stations électriques.

Parmi les exemples de facteurs non liés aux communications devant être pris en compte pour le choix de l'emplacement d'une antenne (pour la plupart des services radio commerciaux), on compte le coût de l'acquisition et de la préparation de l'emplacement proposé, la facilité d'accès à l'emplacement, l'existence de stipulations contractuelles ou de clauses restrictives pouvant gêner l'évolution de l'utilisation proposée, l'accès à des services d'alimentation électrique ou d'autres services sur place, les préoccupations relatives au dégagement des obstacles aériens, les impacts potentiels sur l'environnement, les modifications au projet exigé par l'administration locale, et la possibilité que des résidents s'opposent à l'installation proposée.

Généralement, une fois que l'emplacement a été choisi et que les coûts relatifs aux facteurs non liés aux communications sont engagés (pour l'installation initiale), les coûts des installations érigées par la suite sur ce site sont bien moins élevés. Les promoteurs d'antennes peuvent donc réaliser de véritables économies en partageant des sites terrestres situés sur les toits; de plus, la société en tire des avantages substantiels sur le plan esthétiqueFootnote 287.

Compte tenu des avantages nets et malgré les défis inhérents aux activités de partage de site, nous recommandons :

Recommandation 29 : Qu'Industrie Canada explore les options d'action qui s'offrent à lui pour favoriser la co-implantation d'antennes sur les emplacements terrestres ou surélevés (toits) et augmenter l'incidence de la co-implantation d'antennes avec d'autres ouvrages d'infrastructure (urbains) pouvant être considérés par la société comme étant inesthétiques ou indésirablesFootnote 288.

Nous formulons la présente recommandation en tenant compte du fait que ces deux types de colocalisation ne peuvent s'appliquer à tous les services (ou utilisateurs) radio et que la co-implantation d'antennes avec des structures urbaines n'est pas de mise dans certaines circonstances.

La planification (de l'utilisation du sol) constitue l'un des principaux facteurs déterminants lorsqu'il s'agit d'accroître le partage des emplacements (d'antenne). Les intervenants fédéraux, provinciaux, régionaux et locaux chargés de l'utilisation du sol doivent tenir compte des exigences relatives au choix de l'emplacement des antennes de radiocommunication lors de la prise de décision aux fins de planification à long et à court termes. Lorsque les responsables de la planification connaissent et appuient les exigences en matière de radiocommunication liées aux installations de services radio particulières, ils peuvent :

  1. désigner des zones convenant parfaitement à l'implantation d'antennes dans le territoire visé par leur planificationFootnote 289;
  2. collaborer avec les promoteurs d'édifices élevés afin que les toits soient prévus de façon à pouvoir permettre l'implantation d'antennes (et des câbles qui y sont associés);
  3. faire connaître aux promoteurs d'antenne les endroits où, dans leur territoire, des citoyens se sont déjà opposés aux développements de nature semblable;
  4. établir des directives détaillées quant aux modes d'implantation qu'ils favorisent ou exigent (comme les types de bâtis et l'obligation d'installer des écrans de camouflage).

Afin d'inciter les promoteurs d'antenne à travailler de concert avec les planificateurs à l'établissement de ces directives, les autorités chargées de la planification devraient adopter un processus qui accélérerait l'approbation des demandes d'implantation respectant les politiques de planification établies. Les planificateurs devraient en outre convenir de limiter, ou au moins de gérer, le développement résidentiel et industriel à proximité des zones désignées pour l'implantation d'antennesFootnote 290.

Recommandation 30 : Que les planificateurs de l'utilisation du sol collaborent avec les fournisseurs de services sans fil en vue d'établir des politiques de planification locales visant à cerner et à désigner les zones convenant à l'implantation de multiples installations d'antenne et d'adopter des politiques de planification (comme un processus d'approbation accéléré) prévoyant des mesures ayant pour objet d'encourager les fournisseurs de services à s'installer dans ces zones.

Au cours de la phase de collecte de données du présent examen de la politique, les responsables de l'utilisation du sol se sont dits très irrités par les politiques d'autorisation d'antennes en vigueur au Canada, car ces dernières ne leur fournissaient pas les connaissances, les occasions et le cadre nécessaires pour que les exigences portant sur le choix de l'emplacement des antennes de radiocommunication soient prises en compte lors de décisions de planification. Certains ont indiqué que le modèle de consultation prévu dans la CPC-2-0-03 d'Industrie Canada pour les responsables de l'utilisation du sol décourageait ces derniers de collaborer avec les promoteurs d'antennes lorsqu'ils devaient approuver des projets d'implantationFootnote 291.

Il est toutefois important de noter que ce n'est pas l'ensemble des planificateurs consultés qui se sentent exclus du processus d'autorisation d'antenne. Par exemple, il ressort que les responsables de la planification des villes de Calgary et de Montréal entretiennent de très bonnes relations de travail avec les entreprises canadiennes de télécommunications sans fil offrant des services cellulaires et des SCP. Les représentants respectifs de ces villes ont pu obtenir des renseignements sur le réseau auprès des entreprises et s'assurer que ces dernières situeraient leurs antennes de manière à rendre les installations plus compatibles avec le contexte local d'utilisation du solFootnote 292. Dans ces deux villes, le personnel a eu l'impression que l'appui offert par le bureau de district d'Industrie Canada a joué un rôle déterminant quant à l'obtention de la coopération des entreprises de services cellulaires et de SCP.

En milieu urbain, les toits d'édifices (relativement) élevés constituent un choix évident et parfois crucial pour l'implantation d'antennes de bon nombre de services radio commerciaux. Comme de nombreux services radiotéléphoniques mobiles utilisent des fréquences qui se déplacent en ligne droite, seul un nombre restreint d'édifices situés dans des pâtés de maison importants permettent aux antennes qui y sont installées de s'élever au-dessus de l'encombrement aérien et urbain. Outre les avantages sur le plan de la radiocommunication, il existe un certain nombre de raisons motivant l'implantation d'antennes sur les toits d'édifices. L'installation d'antennes sur les toits tend à être beaucoup moins onéreuse que l'implantation requérant des pylônes ou d'autres bâtis. De plus, les toits peuvent être plus aisément protégés des intrus que la plupart des autres emplacements, et ce, à moindre frais. Lorsque la situation l'exige, l'approbation de projets d'implantation d'antenne sur un toit tend à être plus simple et rapide parce que les responsables de l'utilisation du sol et les citoyens préfèrent souvent ces emplacementsFootnote 293.

La politique de réglementation du Canada pourrait également inciter les promoteurs à installer leurs antennes sur les toits d'édifices. Comme on l'a vu précédemment, la CPC-2-0-03 permet aux promoteurs d'antennes de type 1 (services autres que la radiodiffusion seulement) et de Type 2 de déterminer eux-mêmes si la nature de l'installation ou la modification d'antenne proposée sera « importante » ou non. Certains promoteurs d'antenne sont d'avis que la plupart des antennes sur les toits ont si peu d'impact visuel (vu du sol) qu'elles sont de nature « peu importante »; donc, en vertu de la politique fédérale, qu'il n'est pas nécessaire de consulter ou d'aviser la population localeFootnote 294.

Pour des questions pratiques et juridiques, les promoteurs d'antennes utilisent des ententes de location conclues avec les propriétaires ou les gestionnaires des édifices pour obtenir de l'espaces sur les toits. Ils louent de l'espace sur les toits ou, si cette solution se révèle abordable, ils louent le toit entier. Bien que cette pratique soit rare au Canada, certains propriétaires d'édifices gèrent l'exploitation de leur propre « parc d'antennes » et s'efforcent de maximiser les recettes en louant de l'espace sur les toits ou sur des bâtis au plus grand nombre de promoteurs d'antenne possibleFootnote 295. De façon générale, les promoteurs d'antenne soumettant une demande doivent couvrir les coûts afférents aux modifications qui ont trait au service radio et à la structure nécessaires pour garantir la compatibilité avec les installations d'antennes existantes.

Aux États-Unis et au Mexique, il est de plus en plus courant que des tiers fournisseurs d'emplacements d'antenne créent des sites destinés à plusieurs locatairesFootnote 296. Ces entreprises indépendantes louent à long terme des emplacements situés sur des toits particulièrement avantageux et achètent des pylônes d'antennes existants afin d'y louer de l'espace pour qu'on y installe autant de systèmes d'antenne radio que le permettent la prudence sur le plan techniqueFootnote 297, le toit ou le bâti, et les responsables de l'utilisation du sol. Ces tiers fournisseurs d'emplacement sont peu nombreux au Canada.

Partage de pylônes ou de toits par les entreprises de cellulaire/SCP au Canada

Lors de l'examen des activités de partage des pylônes et des toits des quatre principales entreprises de télécommunications sans fil (cellulaire et SCP) au Canada, il importe d'examiner le partage qui s'effectue entre elles, en tant que concurrentes, et de savoir dans quelle mesure elles partagent leurs antennes avec les autres catégories de services radio.

De façon générale, l'établissement de pylônes destinés aux services cellulaires ou de SCP est, comparativement aux autres catégories de services radio, celle qui a attiré le plus d'attention négative de la part des responsables de l'utilisation du sol, des groupes communautaires et des citoyens locaux. Ce phénomène a été observé dans la plupart des pays développés. En raison de la nature même de la configuration physique des réseaux de télécommunications sans fil (habituellement en nid d'abeille ou cellulaire), les antennes et leurs infrastructures de soutien doivent être implantés au sein de la population d'utilisateurs de téléphones cellulaires. Ainsi, les antennes doivent être situées parmi les utilisateurs ou à proximité de ces derniers, notamment dans les zones résidentielles. Elles doivent être implantées le long des corridors routiers (circulation) et dans les zones rurales touristiques (régions de chalets).

De plus, les collectivités du Canada de taille relativement modeste ou petite ont demandé à ce que les services cellulaires numériques évolués leurs soient offerts dans le cadre d'une stratégie de développement économique et communautaireFootnote 298. Plus l'infrastructure de réseau des services cellulaires et de SCP s'étend à l'extérieur des zones urbaines conventionnelles, plus il est probable que les fournisseurs de services devront ériger des bâtis destinés à l'installation d'antennes. Lorsque la densité d'utilisateurs de réseau est faible (et très dispersée), les fournisseurs de services chercheront à ériger un moins grand nombre d'antennes relativement plus élevées afin d'optimiser la couverture et l'utilisation de l'équipementFootnote 299.

Au Canada, les grandes entreprises de télécommunications sans fil ont recours à des technologies et à des fréquences différentes pour fournir des services cellulaires et des SCPFootnote 300. Ces différences peuvent avoir, et ont effectivement, une incidence sur l'emplacement, la hauteur, le type d'antenne et la couverture du service idéaux de leurs antennes respectives. Chacun de ces facteurs peut limiter le partage des bâtis d'antenne et des sites avec les autres entreprises de télécommunications sans filFootnote 301. En dépit de ces différences et de ces restrictions techniques, les entreprises de télécommunications sans fil du Canada offrent des services très semblables à la même configuration de populations urbaine et rurale. En raison de ces deux similitudes, les infrastructures de réseau se retrouveront dans les mêmes zones de marché, ce qui offrira aux entreprises des possibilités de co-implantation, particulièrement si deux entreprises ou plus pénètrent un nouveau marché de concert.

Le gouvernement fédéral a considéré que ces similitudes entre les services et les marchés constituent des moteurs essentiels de la concurrence dans le cadre du modèle réglementaire élaboré pour les services cellulaires et les SCP. On présume que les entreprises pénétreront les nouveaux marchés et implanteront leur infrastructure physique et leurs services pratiquement en tandem.

Avant d'étudier les options stratégiques qui pourraient favoriser le partage de pylônes et de toits, il importe d'examiner les tendances et le contexte relatifs à l'implantation de l'infrastructure sans fil au Canada.

Dans les marchés fort lucratifs des zones urbaines, suburbaines et touristiques du Canada, l'implantation des services sans fil se fait généralement en tandem et en grandes pompes. Dans le cas de ces marchés lucratifs, les entreprises ont pénétré les zones de service en tandem avec le service cellulaire analogique au cours des années 1980 et 1990, puis elles ont effectué un retour à la fin des années 1990 pour passer à la technologie cellulaire numériqueFootnote 302. On pourrait présumer que, comme les entreprises ont percé le marché ensemble et sont soumises à une pression concurrentielle considérable, les administrations locales et régionales concernées auraient pu convoquer des réunions avec les entreprises offrant des services cellulaires ou des SCP afin d'examiner la possibilité de partager des pylônes et des toits. Malheureusement, il est rare que de telles réunions aient eu lieu parce que les entreprises considéraient leurs projets de déploiement d'antenne comme des renseignements stratégiques et confidentiels. Même lorsque les plans ont été déposés au bureau de développement local, les responsables de l'utilisation du sol ne peuvent discuter de ces plans en public ou avec d'autres entreprises. Lorsqu'il a été Question de partage, les entreprises se sont consultées en secret, pour ensuite informer les responsables de la planification du partage éventuel de sites. Si elles ne comptaient pas partager de pylônes ou de toits, les entreprises informaient les représentants locaux ou régionaux que le partage ne pouvait se faire pour des « raisons techniques ». Il a été impossible de contester ces décisions.

Il faudrait procéder à un examen des tendances et du contexte relatifs à la mise en œuvre de l'infrastructure des services cellulaires et des SCP dans les marchés modestes. Sur le plan géographique, ces marchés modestes comprennent la plus grande partie du pays. Le Canada atlantique, les régions du Nord du Québec et de l'Ontario (au-delà des régions de chalets), une bonne partie des Prairies et les trois territoires offrent des perspectives de rendement des investissements modestes à médiocresFootnote 303. L'avantage concurrentiel est absent de ces régions. Les entreprises n'y arrivent habituellement pas ensemble pour y implanter ou y mettre à niveau leurs services. Le fait qu'une entreprise se soit déjà implantée ou soit passée à la technologie numérique pourrait miner grandement des arguments en faveur de nouveaux investissements par d'autres entreprises. La plupart des bâtis utilisés sont des pylônes monovalents souvent très élevés. Dans le cas de l'Ile-du-Prince-Edouard, l'infrastructure et les services de téléphonie cellulaire ont probablement été établis par la direction de service cellulaire de la compagnie de téléphone de la province (ancienne compagnie). Dans cette province, les pylônes mis en place pour ces services cellulaires initiaux, hauts et monovalents, ne pourront vraisemblablement pas supporter de nouvelles antennes.

Dans ces marchés modestes, l'emplacement et la hauteur des antennes de télécommunications sans fil ont pour la plupart été déterminées en fonction de facteurs techniques, alors que la nature et le type de bâtis l'ont été en fonction de critères techniques et financiers. En d'autres mots, les mesures visant à réduire le plus possible l'impact visuel, comme le choix judicieux du pylône sur le site, le recours à des bâtis peu visibles et le camouflage partiel des pylônes et de l'équipement (avec des bermes ou de la végétation) ont été peu ou aucunement prises en compte lors du choix de l'emplacement. De fait, en raison de leur hauteur, les pylônes typiques ont nécessité (presque invariablement) la pose de balises et de lumières aéronautiques. Il est reconnu que les aménagements esthétiques apportés aux antennes de télécommunications sans fil en font augmenter les coûtsFootnote 304. S'il y avait déjà peu d'arguments en faveur de l'établissement de services sans fil, l'accroissement des coûts pour des motifs d'ordres esthétiques pourrait mettre en péril l'initiative.

On présume que l'augmentation des activités de co-implantation des entreprises de télécommunications sans fil dans les zones non urbaines du Canada pourrait permettre d'atteindre un certain nombre d'objectifs favorables. Outre les avantages généraux de cette pratique vue précédemment, la co-implantation de bâtis d'antennes de services cellulaires et de SCP dans les zones non urbaines pourrait permettre la mise en commun d'idées et de ressources, de sorte que l'on pourrait investir dans des techniques d'implantations délicates et des techniques de camouflages et d'aménagement qui pourraient ne pas être pratiques pour les installations ne relevant que l'une seule entreprise. De plus, il y aurait moins d'obstacles aériens : c'est là un facteur crucial dans les zones non urbainesFootnote 305.

Recommandation 31 : Qu'Industrie Canada envisage des options d'action visant à favoriser la co-implantation d'installations d'antenne pour la téléphonie cellulaire et les SCP dans les zones non urbaines du pays.

Comme nous l'avons indiqué précédemment, les entreprises de télécommunications sans fil constituent la seule catégorie de service radio pour laquelle l'octroi de licence est conditionnel au partage de pylônes et de sites. Dans une lettre qu'Industrie Canada a fait parvenir aux nouveaux titulaires de licence de SCP en 1996, l'organisme de réglementation du gouvernement s'est dit déçu par la lenteur des progrès des fournisseurs de services cellulaires analogiques sur la voie de l'établissement d'arrangements commerciaux de partage mutuel de leurs bâtis :

On s'attend à ce que vous respectiez la politique d'Industrie Canada consistant à encourager l'utilisation partagée des emplacements d'antennes par les fournisseurs de services mobiles de télécommunications. Nous remarquons avec regret l'absence de progrès réels par les secteurs de la téléphonie cellulaire et des services de communications personnelles dans l'adoption de mesures favorisant un partage accru des emplacements d'antennes comme moyen de limiter le plus possible les incidences négatives. Si l'industrie ne se montre pas plus disposée à tenir compte des préoccupations croissantes des autorités responsables de l'utilisation des sols et de celles du public, d'autres mesures d'intervention pourraient être nécessairesFootnote 306.

Au cours des cinq ou six dernières années, les fonctionnaires d'Industrie Canada ont rencontré à quelques reprises des dirigeants d'entreprises de télécommunications sans fil et des représentants de l'association nationale de l'industrie, l'Association canadienne des télécommunications sans fil (ACTS), pour leur indiquer qu'ils étaient insatisfaits du faible partage qui avait cours au sein de l'industrie des télécommunications sans fil et de la participation inégale de certaines entreprises.

Dans le cadre du présent examen de la politique, on a demandé l'aide de l'ACTS afin d'obtenir des statistiques récentes sur la nature et l'importance du partage de pylônes et de toits dans le secteur des télécommunications sans fil. Selon les statistiques obtenues, 68 p. 100 des emplacements d'antenne de téléphonie cellulaire et de SCP au Canada ne sont utilisés que par le propriétaire de l'emplacement en Question (sans partage). Il est intéressant de noter que 79,5 p. 100 des bâtis d'antennes de téléphonie cellulaire et de SCP ne sont pas partagés avec d'autres concurrents du secteur des télécommunications sans filFootnote 307. En outre, 68 p. 100 des installations d'antenne situées sur des toits exploitées par des entreprises de télécommunications sans fil ne sont pas partagées avec d'autres services de radiocommunication. Les statistiques fournies par l'ACTS sont les suivantes :

Partage de pylônes, de toits et d'autres bâtis par les entreprises de télécommunications sans fil au Canada Mars 2004

Nombre total d'emplacement d'antennes de téléphonie cellulaire et de SCP au Canada = 6783
  • 60 p. 100 des sites cellulaires se situent sur des pylônes monovalents
  • 33 p. 100 des sites cellulaires se situent sur des toits ou des édifices
  • 7 p. 100 des sites cellulaires se situent sur d'autres structures (p. ex. châteaux d'eau)
Données sur le partage de sites cellulaires
  • 68 p.100 des sites cellulaires pour la téléphonie cellulaire et les SCP ne sont pas partagés.
  • 20,5 p. 100 des pylônes sont partagés avec au moins une entreprise de télécommunications sans fil concurrente
  • 11 p. 100 des pylônes sont partagés avec un ou plusieurs non-concurrents
  • 30 p. 100 des emplacements situés sur des toits et des édifices sont partagés avec au moins une entreprise de télécommunications sans fil concurrente
  • 2 p. 100 des emplacements situés sur des toits et des édifices sont partagés avec un ou plusieurs non-concurrents
  • 11 p. 100 des autres bâtis sont partagées avec au moins une entreprise de télécommunications sans fil concurrente
  • 38 p. 100 des autres structures sont partagées avec un ou plusieurs non-concurrents

Dans sa présentation officielle écrite présentée dans le cadre du présent examen de la politique, le fournisseur de SCP Microcell Télécommunications Inc. a indiqué que les ententes contractuelles conclues au sein du secteur des télécommunications sans fil nuisaient au partage de pylônes et d'antennes au Canada. Le fournisseur a indiqué que :

Malgré le fait que les titulaires affirment tous être ouverts aux ententes de co-implantation, les conditions précises de ces ententes sont parfois fort éloignées de ce que devrait fixer un marché de co-implantation vraiment concurrentiel. Par exemple, les clauses d'échange un-contre-un ou les exigences de « mise en réserve », qui obligent les entreprises de télécommunications sans fil à offrir l'accès de leurs propres emplacements d'antennes pour pouvoir utiliser ceux d'une autre entreprise, sont de toute évidence discriminatoires envers les nouvelles entreprises, qui possèdent, par définition, moins d'emplacements qu'une entreprise bien établie. Ces pratiques limitent grandement le partage qui aurait réellement lieu autrement et réduisent les avantages que les Canadiens retireraient d'un déploiement plus étendu et intelligent de l'infrastructure du réseau.

Un autre problème vient du fait que des exploitants signent des ententes de location exclusive pour certains emplacements, c.-à-d. des toits ou d'autres endroits ou bâtis préexistants. Cette pratique habituelle[...]provoque une prolifération inutile des pylônes et d'autres bâtis [traduction]Footnote 308.

Après avoir pris connaissance de ces affirmations, on s'est renseigné plus à fond pour en apprendre davantage sur ces ententes contractuelles. On a interrogé les quatre entreprises de télécommunications sans fil au sujet des ententes contractuelles de partage signées avec leurs concurrents et des ententes de locations conclues avec les propriétaires en ce qui concerne leurs emplacements d'antenne.

Premièrement, les quatre entreprises ont toutes conclu des ententes de co-implantation ou de partage avec leurs concurrents respectifs du secteur des télécommunications sans fil. Même si ces ententes sont fort semblables de par leur contenu, chaque contrat peut contenir de légères différences. La vaste majorité des clauses contractuelles de ces ententes touchent les nombreuses implications techniques, pratiques, économiques et juridiques de la co-implantation. Si l'entente en Question traite de l'interconnexion des installations de télécommunications, les tarifs d'interconnexion applicable du CRTC doivent être respectés. Tous les travaux d'électricité doivent répondre aux exigences pertinentes de l'Association canadienne de normalisation (CSA). La partie requérante doit couvrir l'ensemble des frais de préparation et de modification de site ainsi que les frais de consultation relativement au temps et aux efforts déployés par l'entreprise hôte. Habituellement, l'entreprise hôte fournit le chauffage et le refroidissement du site, le branchement au service public d'électricité et une source d'alimentation électrique de secours. Selon les conditions de ces ententes, les ingénieurs de l'entreprise hôte doivent participer entièrement à l'installation et au montage du nouvel équipement. La partie requérante se chargera de la résolution de tous les problèmes de brouillage découlant de la co-implantation. L'espace occupé par les installations d'antenne et l'équipement est facturé par mètre carré et par type d'antenne, généralement à chaque mois. L'alimentation électrique est pour sa part facturée par ampère et par mois; des droits d'usage mensuels s'appliquent pour l'alimentation d'urgence. S'il y a responsabilité légale, l'entreprise requérante doit convenir d'indemniser l'entreprise hôte de tout dommage ou blessure pouvant être subis. À cet égard, la partie requérante doit accepter de souscrire une assurance de responsabilité commerciale générale pouvant couvrir des réclamations éventuelles s'élevant à plusieurs millions de dollars. L'entreprise hôte peut mettre fin à l'entente en donnant un avis de trois mois (environ) si elle a besoin de l'espace occupé par l'entreprise requérante ou si la propriété du site est transféréeFootnote 309.

Les protocoles d'échange un-contre-un et de « mise en réserve » prévus dans ces ententes de partage de site revêtent une importance cruciale dans le cadre de l'examen de la politique nationale. Ces ententes se fondent sur le principe selon lequel l'accès au site sera échangé un-contre-un. En dépit de tous les droits et paiements qui doivent être versés par l'entreprise requérante, on considère la clause d'accès à un pylône ou à un toit comme un avantage commercial pour cette dernière. L'équilibre de cet avantage économique est assuré par le fait que ces ententes prévoient un protocole de « mise en réserve ». Chaque fois qu'une entreprise de service sans fil permet à un concurrent d'être co-implanté sur son site, elle obtient un crédit. Si des crédits s'accumulent dans la réserve au point de la saturer, alors il n'est plus possible de partager de sites tant que le concurrent n'a pas rétabli l'équilibre en partageant certains de ses sites. Toutes les entreprises de télécommunications sans fil suivent étroitement les accès accordés aux concurrents pour la co-implantation. En raison de ces ententes, ces réserves fonctionnent à l'échelle nationale.

Bien que les diverses ententes conclues entre les grandes entreprises de télécommunications sans fil aient établi une structure contractuelle rigide en regard aux crédits bancaires, le système est actuellement utilisé de façon plutôt informelle. Le nombre limite de crédits nécessaires pour remplir la réserve (à partir duquel l'hôte refuse les demandes de co-implantation du requérant) a été assoupli entre certaines entreprises. De plus, certaines entreprises utilisent la réserve à l'échelle régionale plutôt qu'à l'échelle nationale : un déséquilibre des crédits bancaires pour un concurrent d'une région donnée ne nuit pas aux activités de co-implantation de ce dernier dans une autre région. Ces démarchent visant à assouplir le système bancaire n'ont pas cours dans l'ensemble de l'industrie. L'une des grandes entreprises de télécommunications sans fil insiste pour que le système bancaire soit utilisé conformément aux ententes contractuelles. Elle cessera donc de donner accès à ses installations si la réserve d'un concurrent est pleine, et ce, partout au pays.

Quelques précisions s'imposent relativement à l'affirmation de Microcell selon laquelle les entreprises de télécommunications sans fil négocient des clauses d'exclusivité dans les ententes privées qu'elles concluent avec les propriétaires pour la location de toits ou de structures utiles. Les rencontres individuelles tenues avec les quatre entreprises ont permis d'apprendre que ces dernières négocieront des clauses d'exclusivité dans leurs ententes de location lorsque le propriétaire est d'accord et que le prix afférent est raisonnable. Le problème, pour ces entreprises, vient du fait que les propriétaires ont récemment pris conscience de la valeur potentielle de leur propriété comme emplacement à louer pour l'implantation d'antennes; ils refusent donc de signer des clauses d'exclusivité ou exigent un prix d'or en retour. Même si le marché limite maintenant le nombre de nouvelles clauses d'exclusivité, de nombreux emplacements loués dans les années 1980 et 1990 sont toujours visés par de telles dispositions. Il s'agit de contrats de location à long terme prévoyant des options de renouvellement au choix de l'entreprise. Dans les principales zones urbaines du Canada, ces ententes de locations surannées s'appliquent aux emplacements les plus recherchés. En outre, on a toujours recours aux clauses d'exclusivité dans les zones non urbaines, où les propriétaires sont confrontés pour la première fois à l'implantation d'antennes et peuvent être inconscients du potentiel qu'offre la location de sites à plusieurs fournisseurs de services radio.

Lorsqu'on les a interrogées au sujet de ces ententes d'exclusivité, certaines des entreprises ont expliqué que ces dispositions étaient nécessaires pour assurer le contrôle des sites pour la radiocommunication. Elles ont indiqué que les clauses d'exclusivité leur permettaient de contrôler l'arrivée de nouvelles entreprises et que ces clauses pouvaient être abandonnées (pour chaque nouvelle entreprise) une fois que des arrangements satisfaisants étaient conclus afin de contrôler le brouillage et de faire en sorte que le rayonnement ne dépasse pas les limites d'exposition fixées dans le Code de sécurité 6. D'autres entreprises ont admis qu'elles établissent des clauses d'exclusivité lorsqu'elles le peuvent afin d'acquérir des crédits de co-implantation pour participer au système de crédits bancaires mis en œuvre par les entreprises de télécommunications sans filFootnote 310.

L'examen de la politique nationale permet de conclure que les ententes de mise en réserve et de location qui ont cours dans le secteur de la radiocommunication cellulaire et des SCP nuisent au partage des pylônes, des toits et des autres sites existants au Canada. Ces ententes gênent le partage de sites entre les concurrents du secteur des télécommunications sans fil. De plus, les clauses d'exclusivité font obstacle au partage de sites entre les entreprises de télécommunications et d'autres catégories de services de radio commerciauxFootnote 311. Les statistiques fournies par l'ARC devraient appuyer ces conclusions.

Les clauses d'exclusivité ne constituent pas le meilleur moyen de résoudre les nombreuses questions techniques qui se posent lorsque plusieurs services radio se partagent un toit ou un bâti. D'elles-mêmes, les entreprises de télécommunications sans fil ont déjà préparé des protocoles contractuels pour résoudre ces questions et établir le coût de revient. Au cours d'une consultation, l'une des grandes entreprises s'est plainte du fait qu'elle attendait depuis quatre ans qu'un concurrent suspende les clauses d'exclusivité de certains sites et qu'elle ne s'expliquait pas ces délais.

Le fait que le système bancaire soit utilisé à l'échelle nationale est particulièrement problématique. Lorsqu'une ou deux entreprises établissent rapidement l'infrastructure du réseau sans fil dans une région, les sites de co-implantation remplissent la réserve de l'entreprise pour l'ensemble du pays. La co-implantation a donc été refusée dans d'autres régions, et de nouveaux pylônes ont été érigés même si la co-implantation aurait été possible sur le plan techniqueFootnote 312. Même lorsque le système de mise en réserve fonctionne à l'échelle régionale, on s'inquiète que le nombre élevé de co-implantations accordées dans les zones urbaines puisse mener à la construction de pylône superflus dans les zones rurales de cette même régionFootnote 313.

Recommandation 32 : Qu'Industrie Canada examine les arrangements en matière de mise en réserve et d'acquisition d'emplacements qui sont utilisés dans le secteur des services de la téléphonie cellulaire/SCP en vue de déterminer leurs répercussions sur les activités de co-implantation dans ce secteur et sur les autres catégories de service radio commercial. Advenant qu'il conclut que ces arrangements entravent les activités de co-implantation d'installations d'antenne, Industrie Canada devrait explorer les options d'action qui s'offrent à lui afin de réduire la conclusion de tels arrangements et travailler avec l'industrie des services sans fil en vue de trouver d'autres moyens pour protéger les intérêts légitimes des fournisseurs de services de téléphonie cellulaire/SCP dans le domaine de la concurrence.

Industrie Canada devrait tirer parti de toutes les occasions qui se présentent de livrer un message clair et cohérent aux fournisseurs de services de téléphonie cellulaire et de SCP pour leur signifier qu'il s'attend à ce qu'ils s'emploient sérieusement à accroître la co-implantation d'antennes. À ce sujet, notons que le 1eravril 2004, le Ministère a modifié les licences de téléphonie cellulaire octroyées dans les années 1980 et celles des SCP attribuées au cours des années 1990. Ces licences, converties en licences de spectre, comprennent les mêmes privilèges accrus que ceux prévus par les licences de spectre octroyées aux nouveaux titulaires de licences de SCP qui ont participé aux enchères du spectre tenues en 2001. Ainsi, tous les fournisseurs de services de téléphonie cellulaire et de SCP disposent maintenant du même type de licences, lesquelles comprennent des conditions (relativement) communes. Cette modification pose toutefois un problème : en effet, il semble que le document de politique n'exige pas que les nouveaux titulaires collaborent afin d'accroître le partage d'antennes entre eux. Il est clair que l'on a manqué une occasion de renforcer cette exigence. Dans la pire éventualité, les conditions des licences pourraient maintenant être modifiées par cette mesure pour que l'obligation qui existait préalablement y soit éliminée.

C. Partage de réseaux

Il est pratique courante de recourir à des ententes d'itinérance et de revente afin de permettre aux consommateurs de l'un des fournisseurs contractants d'utiliser l'infrastructure de réseau d'un autre fournisseur contractant contre un droit versé au fournisseur hôte. Il existe habituellement un chevauchement des zones desservies par les fournisseurs de service contractants; cependant, ces derniers n'ont peut-être pas établi leur infrastructure de réseau dans l'ensemble de leur zone de service autorisée. Ce type de partage d'installations exige des normes et des protocoles d'exploitation communs, ou au moins compatibles. Fréquemment, les politiques en matière de télécommunications précisent les exigences et les limites relatives à l'établissement d'ententes de partage de réseaux entre les fournisseurs de service.

Il est pertinent que le présent examen traite des ententes d'itinérance et de revente utilisées dans le secteur des télécommunications sans fil, car ces ententes négociées peuvent mener, de façon générale, à une réduction des installations de réseaux sans fil et, en particulier, à une réduction de l'infrastructure des antennes radio. Au moment de la rédaction du présent rapport, Industrie Canada terminait une consultation nationale sur une politique proposée visant à prolonger les conditions actuelles d'itinérance et de revente des licences octroyées aux fournisseurs de SCP jusqu'à 2011Footnote 314. La seconde politique envisagée aurait pour but d'obliger les titulaires de licence de services cellulaires à offrir des possibilités d'itinérance et de revente de services analogiques aux titulaires de licences de SCP qui ne fournissent pas de services cellulaires analogiques. Comme le Ministère détermine actuellement les mesures stratégiques qu'il adoptera relativement à ces propositions, il est important de prendre en compte les répercussions qu'aura l'élargissement des règles d'itinérance et de revente sur les pylônes d'antenne.

La politique d'octroi de licence de SCP (téléphonie cellulaire numérique), annoncée en 1994, exige que les futurs titulaires de licence de SCP offrent la revente de SCP dans la zone qu'ils desservent à d'autres titulaires de licences de SCP, et ce, de manière non discriminatoire. Cette exigence avait pour but de permettre aux forces du marché de stimuler l'implantation de ces nouveaux réseaux cellulaires évolués. Cette politique a, de façon générale, bien fonctionné. Lorsque le CRTC s'est penché sur l'état des ententes de revente et d'itinérance conclues par les fournisseurs de services cellulaires et de SCP au Canada, il a établi qu'il était dans l'intérêt du public de permettre aux entreprises de décider par elles-mêmes de proposer des possibilités de revente et d'itinérance à la concurrenceFootnote 315.

Pour illustrer les avantages que peuvent apporter les politiques de revente et d'itinérance actuelles, on donne l'exemple de Telus Mobilité et des membres de ce qui s'appelle maintenant Bell Wireless Alliance, qui ont, en octobre 2001, annoncé qu'ils avaient conclu une entente de revente de d'itinérance réciproque afin de faciliter le partage de leurs réseaux respectifs dans les petites zones urbaines et rurales du CanadaFootnote 316. On a estimé qu'en partageant leurs infrastructures respectives, chacun des parties contractantes épargnerait 500 millions de dollars en évitant de reproduire les installations servant aux services numériques dans certaines zones non urbaines du Canada.

Cette entente a permis à de nombreuses régions du Canada atlantique, du Québec et de l'Ontario d'être desservies par un nouveau fournisseur de service et d'obtenir quelques services différents sans que l'on doive doubler l'infrastructure du réseau, notamment les pylônesFootnote 317. Pour les clients de ces entreprises, la prestation de services semble s'effectuer sans heurt. Le nom de leur fournisseur habituel leur apparaît, peu importe le site cellulaire de concurrents qu'ils utilisent pour se brancher au service.

Recommandation 33 : Qu'Industrie Canada, lorsqu'il examine les conditions ou les règlements portant sur l'itinérance ou la revente, envisage les façons dont ces mesures pourraient contribuer à réduire le nombre total d'antennes de téléphonie cellulaire dans les petites zones urbaines ou rurales.Footnote 318